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Madagascar : Par honte, les familles dissimulent les victimes du Kere (1)

D 22 février 2015     H 05:45     A Léa Ratsiazo     C 0 messages


Les autorités de Bekily ne peuvent déclarer que 12 décès officiels tandis que certaines sources avancent le chiffre d’une centaine de morts de « kere » [1] rien que dans cette commune. « Par honte, les familles dissimulent la vraie cause de la mort de leurs proches », reconnaissent toutes les autorités du Sud ; ce qui rend difficile l’évaluation des victimes. La centaine de morts (102 ou 105) rapportée par la presse ne peut être vérifiée selon un notable interrogé par la presse sur le terrain, ce notable avoue toutefois que plus d’une centaine de morts est un peu excessif. Les autorités ne peuvent pas trop insister auprès des familles déjà affligées pour leur extorquer la raison du décès « quelle que soit la cause, avouer ne ramènera pas le mort » selon les familles. Officiellement, 200 000 personnes sont touchées par une grave insécurité alimentaire dans le Sud du pays.

Les images terribles et poignantes des enfants à gros ventre mais tellement maigres qu’on voit leurs os à travers leurs peaux, serrent le cœur. « Ils sont constipés à force de manger des cactus », expliquent les mères de famille. Ces dernières vendent sur le marché leurs maigres biens, marmites comme assiettes ou effets vestimentaires pour acheter un peu de riz à leurs enfants, « nous souffrons toute l’année » expliquent-elles aux reporters de la station de télévision TV Plus.

Sur terrain, ce sont les antennes des organisations internationales avec les autorités locales et les religieuses qui se démènent tous les jours auprès des populations. D’ailleurs en cas de maladies, les gens n’ont plus l’habitude de fréquenter les dispensaires d’Etat mais les dispensaires tenus par les religieuses car il n’y a, ni assez de personnel ni médicaments dans les centres publics de santé de base.

Au niveau central, on évite de trop aborder la question « kere ». Sur l’audio-visuel public, on préfère les sujets plus « positifs », du genre « réussite de la mise en place des bureaux du HVM dans tous les districts », « arrestation des malfaiteurs par la police nationale »…. A part la journée de solidarité nationale en hommage aux victimes du cyclone Chedza où on a ajouté in extremis les victimes de « kere », rien de concret et efficace n’est fait au niveau central ; les aides expédiées par le Bureau national de gestion des risques et catastrophes (BNGRC) sont insuffisantes et/ou ne répondent pas souvent aux réels besoins des sinistrés. La nouvelle ministre de la population, Onitiana Realy, est envoyée sur place mais après rien ; aucune déclaration officielle de ce que l’Etat va faire pour venir en aide aux victimes n’a eu lieu jusqu’ici. Ni le président de la République, ni le Premier ministre et encore moins le président de l’Assemblée nationale, n’est descendu sur place. D’ailleurs, les députés toujours prompts à prendre le micro pour réclamer 4X4 et autres avantages, n’ont pas brillé sur ce sujet tabou, exceptés deux députés dont Nicolas Randrianasolo et une Dame élue dans cette partie sud. Pareil pour les politiciens de tout bord et toutes les tendances. Apparemment c’est le dernier souci des tenants du pouvoir. Les « kere » du Sud sont les vrais oubliés de la politique générale de l’Etat.

Léa Ratsiazo

Notes

[1] kere : disette.

Source : http://www.madagascar-tribune.com