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Burundi : DÉCLARATION DU DIRECTOIRE DU CNARED

D 15 novembre 2015     H 05:11     A CNARED (Burundi)     C 0 messages


REPUBLIQUE DU BURUNDI Le Conseil National « CNARED » REPUBLIKA Y’UBURUNDI Inama y’Igihugu « CNARED » Le Conseil National pour le Respect de l’Accord d’Arusha pour la paix et la Réconciliation au Burundi et de l’Etat de droit

Du 30 Octobre au 1er Novembre 2015, le Directoire du CNARED a tenu une réunion extraordinaire. Après une évaluation des activités politiques et diplomatiques du CNARED depuis sa création le 1er août 2015, les membres du Directoire ont passé en revue la situation politique et sécuritaire prévalant aujourd’hui au Burundi avant d’analyser la stratégie globale du CNARED pour mettre fin au chaos engendré par le 3ème mandat de Pierre NKURUNZIZA,

Avant d’entamer les travaux à proprement parler, les membres du Directoire du CNARED ont tenu, encore une fois, à s’incliner et à rendre hommage au peuple burundais qui, jour et nuit, consent des efforts et des sacrifices sans limites pour défendre l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation au Burundi et les multiples acquis auxquels il a fait parvenir le pays en matière de paix, de sécurité, de concorde nationale, de démocratie, de respect et de promotions des droits de la personne humaine et des libertés publiques, acquis contre lesquels le pouvoir en place est parti à l’assaut à travers le 3ème mandat de Pierre NKURUNZIZA. Au stade actuel, les Burundais, la Région, l’Afrique et la communauté internationale découvrent hébétés les véritables raisons qui poussaient Pierre NKURUNZIZA et le cercle autour de lui à chercher un mandat qu’ils savaient être en violation de l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation au Burundi et contre la Constitution du Burundi qui trouve sa source dans cet Accord, notamment dans son le chapitre I du Protocole II. Comme le CNARED n’a cessé de le rappeler depuis sa création, la violation de ces textes et des principes fondamentaux qu’ils édictent dans l’organisation et le fonctionnement de l’Etat a conduit le pays dans l’abime et sème le désordre et une désolation sans commune mesure.

Aujourd’hui, les Burundais, la Région, l’Afrique et la communauté internationale s’interrogent : que faire pour sortir de l’engrenage criminel dans lequel Pierre NKURUNZIZA et le cercle autour de lui enfoncent chaque jour le Burundi ?

Le Directoire du CNARED constate que les positions et comportements des plus hauts responsables qui gèrent illégalement les institutions de l’Etat ne font qu’enfoncer le Burundi dans des violences qui prennent des dimensions d’un génocide programmé. Cela se constate à travers les positions de la frange du CNDD-FDD qui demeure fidèle à Pierre NKURUNZIZA. Ces positions ont été exprimées à travers les deux dernières déclarations signées par le président à la tête de cette frange, Pascal NYABENDA, et portées à la connaissance du public par la voix de son porte-parole, Gélase NDABIRABE.

Jamais l’on n’avait entendu dans la vie du Burundi un pouvoir qui justifie ses crimes par d’autres crimes du genre que le pays a connus au cours des décennies passées. Jamais l’on avait vu un pouvoir qui, pêle-mêle, s’attaque sans discernement à tous ceux qui, au Burundi, dans la Région, en Afrique et dans le monde condamnent la dérive autoritaire et criminelle d’un pouvoir uniquement soucieux de défendre ses intérêts et non ceux du peuple burundais.

C’est malheureusement ce que cette frange du CNDD-FDD toujours fidèle à NKURUNZIZA sert quotidiennement au Burundi et au monde à travers des diatribes sans fondement contre l’Union Africaine, l’Union Européenne et d’autres partenaires bilatéraux et multilatéraux du Burundi. De même, Pierre NKURUNZIZA et ceux qui gravitent autour de lui dans le contrôle du pouvoir, distillent malicieusement un discours dégradant à l’endroit de ses opposants qu’il qualifie de « putschistes » ou de « terroristes » dans l’unique but de les exclure des négociations globales et inclusives auxquelles les Burundais, la Région, l’Afrique et la Communauté internationale ne cessent d’appeler les protagonistes de la crise actuelle. Cela rappelle étrangement la stratégie de certains responsables politiques et militaires qui, entre 1995 et 2000, s’opposaient viscéralement à toute négociation avec le CNDD qu’ils qualifiaient alors de « Groupe Tribalo-Terroriste Génocidaire » !

Malheureusement, les déclarations du président du Sénat de facto, Révérien NDIKURIYO, que d’aucuns considèrent comme un des animateurs assidus de la milice IMBONERAKURE, vont dans le sens d’accréditer cette assertion. Au lieu de plaider pour la consolidation de l’unité nationale dont le Sénat qu’il dirige est constitutionnellement un des garants, Révérien NDIKURIYO annonce l’apocalypse pour les quartiers et autres provinces contestataires du troisième mandat. Pour lui, la solution est de les « raser » ! Et comme pour chauffer davantage la hargne et la détermination de ceux à qui cette sale besogne sera confiée, il promet que les parcelles dont les propriétaires seraient disparus au cours de cette extermination pourraient être aisément récupérées à leur faveur ! Signe que cette déclaration extrêmement dangereuse du président du Sénat relève de la stratégie globale de l’Etat-NKURUNZIZA, ce denier vient, à son tour, de donner officiellement autorisation aux éléments des forces de l’ordre qui lui demeurent fidèles d’utiliser tous les moyens matériels à leur disposition contre tout résistant qui n’acceptera pas, endéans cinq jours, de courber l’échine et de se rendre sans conditions à ces éléments des forces de défense et de sécurité toujours fidèles à Pierre NKURUNZIZA.

Dans les faits, cette stratégie criminelle est en cours depuis des mois. Depuis le début des manifestations contre le 3ème mandat de Pierre NKURUNZIZA, une vague de répression aveugle et sanglante s’est abattue sur le Burundi. Cette répression est beaucoup plus féroce dans les quartiers de la capitale et dans les communes du pays qui ont pris les devants dans la contestation du 3ème mandat présidentiel de Pierre NKURUNZIZA.

Ainsi, des massacres qui prennent l’allure d’un génocide politico-ethnique sont observés. Pour faciliter ces massacres, des agents de la police de protection des institutions se placent dans les quartiers résidentiels et simulent des attaques de groupes armés. Par la suite, des agents du service national des renseignements (la documentation), de la brigade anti-émeute et de la police de protection des institutions, appuyés par des miliciens IMBONERAKURE sont déployés dans ces quartiers résidentiels pour soi-disant poursuivre ces groupes armés. Ils entrent systématiquement dans les maisons habitées, forcent certains habitants ciblés d’avance de sortir de leurs maisons, leur ordonnent de s’agenouiller et les massacrent le plus souvent chacun d’une seule balle dans la tête. Au cours de ces opérations terroristes, des familles entières sont décimées et des maisons saccagées ou incendiées. Les derniers de ces crimes ont eu lieu à Mutakura-Cibitoke, le 1er Juillet et le 3 octobre 2015, ainsi qu’à Ngagara, le 13 octobre 2015, quand une famille entière d’un cameraman de la Radiotélévision Nationale du Burundi a été décimée. Des assassinats et tentatives d’assassinats ciblés augmentent aussi dans le pays, tous planifiés par le Service National des Renseignements.

Cette situation politique et sécuritaire plus que délétère conduit chaque jour à l’effondrement total de l’économie burundaise. Depuis fin avril, l’économie burundaise est pratiquement à l’arrêt, les recettes internes sont en chute libre. En outre, depuis qu’il a décidé de s’octroyer un troisième mandat anticonstitutionnel, Pierre NKURUNZIZA a fermé les oreilles aux conseils des partenaires du Burundi qui lui ont toujours conseillé de renoncer à ce troisième mandat. Cet entêtement de Pierre NKURUNZIZA, combiné aux violations graves des droits de l’homme et à la remise en cause des acquis démocratiques du Burundi, a obligé les partenaires du Burundi à prendre des sanctions économiques. Celles-ci visent à contraindre Pierre NKURUNZIZA à rejoindre la table des négociations. Cette asphyxie totale de l’économie burundaise ne fait qu’aggraver la souffrance du citoyen ordinaire déjà étranglé par la misère qui s’accentue. En effet, outre la violation de l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation au Burundi, Pierre NKURUNZIZA et le cercle autour de lui sont des champions dans la corruption et les malversations économiques et financières, y compris en ce qui concerne le bradage des richesses nationales. C’est ainsi que les crimes politiques et économiques de Pierre NKURUNZIZA et du cercle autour de lui font qu’aujourd’hui le Burundi est classé au premier rang des pays les plus pauvres du monde !

Cette situation qui se dégrade dangereusement conduit le CNARED à adresser encore une fois un appel vibrant à toutes les forces vives du Burundi, à la Région, à l’Afrique et à la communauté internationale pour qu’elles prennent les mesures qui s’imposent pour éviter que le Burundi ne tombe inéluctablement dans un chaos total. Ne pas agir vite signifierait laisser aux forces aujourd’hui au pouvoir à Bujumbura de continuer leur oeuvre destructrice. Une telle situation risquerait d’entraîner l’ensemble de la Région des Grands Lacs dans un engrenage de la violence, dont on peut deviner les dimensions effarantes, quand on se souvient de la crise régionale consécutive au génocide Rwandais en 1994.

Au regard de cette situation :

a) Le CNARED salue les récentes prises de position de l’Union Africaine (lors de sa 551ème Réunion tenue le 17 octobre 2015) soutenues dans la suite par le Conseil de Sécurité des Nations Unies ainsi que par les Envoyés Spéciaux de l’Organisation des Nations Unies, de l’Union Africaine, de l’Union Européenne, des Etats-Unis d’Amérique et de la Belgique dans la Région des Grands Lacs. Il s’agit d’une avancée importante qui peut aider à maîtriser cette situation au Burundi qui se dégrade au jour le jour. Le CNARED appelle les membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies à saisir dans ses dimensions dangereuses la situation qui prévaut au Burundi. Pour cela, le Conseil devrait adopter une résolution vigoureuse qui contraigne le pouvoir de Bujumbura à mettre fin à une stratégie criminelle qui constitue une menace pour la paix et les droits humains au Burundi en même temps qu’elle porte les germes d’une extension de cette crise au niveau de toute la Région.

b) Le CNARED apprécie les positions de l’Union Africaine laquelle, à travers la Présidente de la Commission et le Conseil de Paix et de Sécurité, ne cesse de déployer des efforts pour accélérer la recherche d’une solution négociée à la crise burundaise. Le CNARED s’inscrit dans la ligne d’action de l’Union Africaine et réitère son soutien à une médiation consensuelle, capable de contribuer à la résolution du conflit burundais. Le CNARED se tient prêt à répondre, à tout moment, à une invitation de la médiation pour le montage du schéma que les négociations devraient vite emprunter afin de bloquer et mettre fin définitivement aux risques de dérapages de la crise burundaise. C’est un devoir auquel aucun acteur burundais qui travaille pour la paix, la sécurité, la concorde nationale, la démocratie, les droits de l’homme et les libertés publiques ne peut se dérober.

Le CNARED demande en conséquence à toutes les forces vives de la nation de combiner et coordonner leurs actions dans l’unité, la confiance et la solidarité afin de résister ensemble, et pour l’intérêt de tous, aux sirènes de la violence d’Etat contre un peuple pacifique que le 3ème mandat de Pierre NKURUNZIZA martyrise et paralyse aujourd’hui. Le CNARED appelle la population burundaise, dans toutes ses composantes, à rester sereine et à continuer à résister au Coup d’Etat constitutionnel de Pierre NKURUNZIZA en rejetant catégoriquement et vigoureusement les messages de haine et de division subtilement distillés et propagés par les serviteurs du cercle au pouvoir à Bujumbura. C’est ensemble et pour tous que les Burundais parviendront à mettre hors d’état de nuire tous ceux qui cherchent à pousser le Burundi à l’apocalypse. Le CNARED recommande alors :

 a) aux partis et groupes politiques oeuvrant au Burundi, de condamner sans ambages ni fuites en avant les dérapages que trahissent aujourd’hui les discours et autres messages des plus hauts responsables du pouvoir de facto de NKURUNZIZA. Se taire, c’est pécher par complicité et en conséquence se mettre du côté de causes négatives sans lendemain. Il s’agit ici d’un combat pour la paix et la dignité du peuple burundais aujourd’hui agressé dans sa quiétude et dans sa vie dans la concorde nationale qui se consolidait chaque jour depuis la signature et la mise en application de l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation au Burundi ;
 b) rappelle aux confessions religieuses, leur place dans la société. Elles n’ont pas droit d’être muettes face aux stratégies qui, quotidiennement, enlèvent la vie à des êtres humains. La violence doit être condamnée et ses commanditaires et auteurs doivent être réprouvés. Sinon, ce serait pécher par compromission et/ou lâcheté ;
 c) rappelle aux organisations de la société civile leur devoir citoyen d’être toujours des porte-paroles des sans voix, particulièrement en ces moments où les droits humains et les libertés fondamentales des citoyens subissent des épreuves sans précédent. Le CNARED exprime sa solidarité aux organisations, leaders et activistes de la société civile aujourd’hui dans le viseur de Pierre NKURUNZIZA et du cercle du pouvoir autour de lui à cause de leur engagement et de leur détermination à lutter contre le 3ème troisième mandat de Pierre NKURUNZIZA. Le CNARED fait un clin d’oeil aux organisations dites de la société civile qui analysent et se comportent de manière complaisante face à cette question. Ils pèchent par omission, de manière volontaire et regrettable.
 d) exprime aux organisations des femmes et des jeunes, son appréciation positive et son soutien à l’endroit de celles qui se sont levées pour dire non à un 3ème mandat de Pierre NKURUNZIZA. Ce mandat est en train de détruire le Burundi harmonieux qui s’édifiait depuis la signature et la mise en application de l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation au Burundi. Le CNARED salue particulièrement le courage des jeunes qui depuis la déclaration de la candidature de Pierre NKURUNZIZA pour un mandat illégal et illégitime n’ont cessé de dire non à la violation de cet Accord dans lequel ils voient un instrument efficace pour l’émergence d’un Burundi Nouveau protégé des excluions et des violences à caractère ethnique qui, au cours des dernières décennies, n’ont fait que fragiliser le Burundi. Le CNARED exhorte la jeunesse burundaise à oeuvrer ensemble, dans ses diversités ethniques, politiques et sociales pour réclamer des négociations rapides entre les protagonistes politiques burundais en vue de trouver une solution rapide à la présente crise. C’est la voie la plus rassurante pour chacun et pour tous ;
 e) rappelle aux membres des corps de défense et de sécurité, les missions qui leur sont confiées par l’Accord d’Arusha pour la Paix au Burundi et la Constitution qui en découle. « Les corps de défense et de sécurité doivent refléter la volonté résolue des Burundais, en tant qu’individus et en tant que nation, de vivre égaux, dans la paix et l’harmonie. Ils doivent enseigner à leurs membres à agir en conformité avec la Constitution et les lois en vigueur, ainsi qu’avec les conventions et accords internationaux auxquels le Burundi est partie, et exiger d’eux qu’ils respectent ces textes. Les corps de défense et de sécurité sont au service du peuple burundais. Ils doivent être un instrument de protection de tout le peuple burundais et tout le peuple doit se reconnaître en eux » (Article 241). D’autre part, « ni les corps de défense et de sécurité, ni aucun de leurs membres ne peuvent, dans l’exercice de leurs fonctions (a) porter préjudice aux intérêts d’un parti politique qui, aux termes de la Constitution, est légal, (b) manifester leurs préférences politiques, (c)avantager de manière partisane les intérêts d’un parti politique, (d) être membre d’un parti politique ou d’une association à caractère politique et (e) participer à des activités ou manifestations à caractère politique » (Article 244). C’est pourquoi, les membres des corps de défense et de sécurité doivent en ces jours agir avec discernement et refuser d’être entraînés dans la défense de causes uniquement partisanes ou, pire, de se soumettre au service d’un individu ou d’un groupe uniquement soucieux d’intérêts sectaires.

Le CNARED appelle les membres de corps de défense et de sécurité à refuser et se protéger contre les stratégies du pouvoir de facto qui tendent à les dresser les uns contre les autres sur base des appartenances ethniques et/ou de leurs appartenances politiques lors de la guerre civile (1994- 2006). Ce que le peuple burundais attend de ses corps de défense et de sécurité est qu’ensemble leurs membres se dressent et agissent comme un rempart de la paix et de l’unité de tous les Burundais.

Pour sa part, le CNARED réaffirme son engagement vis-à-vis du peuple burundais, de la Région, de l’Afrique et de l’ensemble des partenaires du Burundi à tout mettre en oeuvre pour qu’une solution politique soit rapidement trouvée à la crise actuelle. Pour cela, il appelle chacun des protagonistes et partenaires burundais et étrangers à ses responsabilités.

L’histoire récente, au Burundi et dans la Région, a démontré que l’inertie de la Région, de l’Afrique et de la communauté internationale a laissé émerger et se consolider jusqu’à laisser éclore des situations déshumanisantes dont la Région porte toujours des stigmates et vit des conséquences. Le CNARED rappelle que des déclarations du genre « plus jamais ça » ne suffisent plus. Il faut agir rapidement et efficacement pour que le « plus jamais ça » soit traduit en réalité.

Bujumbura, le 4 octobre 2015

Pour le Directoire du CNARED,

Leonard NYANGOMA

Président du CNARED

Source : http://afpafricaine.org