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Burundi : les autorités doivent mettre un terme à la répression et garantir la protection des libertés fondamentales

D 29 avril 2015     H 05:38     A FIDH, Ligue Burundaise des droits de l’Homme (ITEKA)     C 0 messages


Bujumbura, Paris, 27 avril 2015 - La FIDH et la Ligue ITEKA condamnent les actes de violence survenus hier dans les quartiers de Bujumbura qui auraient conduit à la mort d’au moins quatre personnes et fait plusieurs blessés. Nos organisations condamnent par ailleurs l’arrestation, survenue ce matin à la maison de la presse, de monsieur Pierre Claver Mbonimpa, ainsi que les décisions prises par les autorités burundaises de suspendre la diffusion, en province, des informations émises par trois radios indépendantes. Alors que de nouvelles manifestations sont attendues, nos organisations appellent l’ensemble des acteurs politiques à prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter de nouveaux affrontements et exhortent les autorités burundaises à respecter strictement le droit de manifestation pacifique, de même que la liberté d’expression et le droit à l’information.

« Les autorités burundaises doivent comprendre que les blocages politiques ne peuvent trouver de réponse dans la répression. Le pire est à craindre si les confrontations se poursuivent et que les libertés fondamentales continuent d’être bafouées. Face à ces menaces, la communauté internationale doit immédiatement condamner la répression et mener une médiation pour garantir des élections libres, transparentes, seule façon d’éviter l’irréparable » ont déclaré nos organisations.

Le Président Pierre Nkurunziza a été investi samedi candidat du CNDD-FDD, le parti au pouvoir, pour l’élection présidentielle prévue en juin 2015. Depuis plusieurs mois, de nombreuses voix, parmi lesquelles celles de l’opposition politique, des organisations de la société civile, des églises et des diplomaties étrangères, se sont élevées contre cette candidature de Nkurunziza jugée contraire aux dispositions de l’Accord d’Arusha (2000) et de la Constitution (2005). La FIDH et la Ligue ITEKA avaient alerté sur les risques d’escalade de la violence et appelé les acteurs politiques à s’abstenir de tout acte qui pourrait conduire à un embrasement de la situation.

Hier, pour protester contre l’investiture de Nkurunziza, des centaines de manifestants sont descendus dans les rues de Bujumbura. Les policiers, déployés par centaines dans plusieurs quartiers de la capitale, se sont confrontés aux manifestants en usant de grenades lacrymogènes, de canons à eau, de balles en caoutchouc et de balles réelles. D’après les informations recueillies par nos organisations, dans certains quartiers, notamment dans celui de Cibitoke, les Imbonerakure, les membres de la ligue des jeunes du parti au pouvoir, auraient prêté main forte aux policiers pour repousser les manifestants. Des témoins ont par ailleurs rapporté que dans plusieurs quartiers, notamment dans celui de Kanyosha, des groupes d’Imbonerakureauraient défilé dans les rues par groupes de 50 à 100 personnes, armés de bâtons et scandant des slogans violents tels « on va vous savonner si vous continuez à manifester ».

D’après les autorités, les violences d’hier auraient conduit à la mort d’au moins deux personnes, dont un jeune de 15 ans tué par balle dans le quartier de Ngagara, et fait plusieurs blessés, y compris parmi les policiers. Les informations recueillies par nos organisations laissent entendre qu’au moins deux autres personnes auraient été tuées par balles dans la soirée dans le quartier de Mutakura à Cibitoke (au niveau de la 9ème avenue). Alors que ce bilan pourrait encore s’alourdir, nos organisations exhortent les autorités burundaises à enquêter sur ces faits pour faire toute la lumière sur les circonstances qui ont conduit à la mort de ces personnes.

La FIDH et la Ligue ITEKA condamnent également l’arrestation, survenue ce matin à la maison de la presse, de monsieur Pierre Claver Mbonimpa, Président de l’Association pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH). La FIDH et la Ligue ITEKA, qui rappellent que monsieur Mbonimpa a fait l’objet ces derniers mois de harcèlement judiciaire, exhortent les autorités à procéder à sa libération immédiate et à garantir son intégrité physique. Nos organisations appellent par ailleurs les autorités à s’abstenir de toutes représailles contre les défenseurs des droits humains et les journalistes indépendants et dénoncent à cet égard leur décision de suspendre la diffusion, dans les provinces du pays, d’informations transmises par les radios privées indépendantes, Radio Publique Africaine (RPA), Bonesha FM et Isanganiro. Dans la matinée d’hier, les Ministres de l’Intérieur, de la Sécurité publique et de la Communication se sont rendus dans les locaux de la RPA accusant la radio de participer à un mouvement insurrectionnel. Ils ont décidé que les trois radios privées ne pouvaient plus continuer d’émettre en direct et ont suspendu toute retransmission dans les provinces. À l’inverse, la radio REMA FM, réputée proche du pouvoir, continue d’émettre librement en direct et dans les provinces.

Nos organisations rappellent que d’après le HCR, le nombre de Burundais fuyant les violences pré-électorales pour se réfugier au Rwanda aurait atteint hier plus de 15,000 personnes. D’autres réfugiés cherchent à se mettre à l’abri en République démocratique du Congo et en Tanzanie. Selon le HCR, les réfugiés, qui proviennent principalement de la province de Kirundo, au nord du Burundi, auraient invoqué des actes de harcèlement et d’intimidation à motivation politique, des disparitions forcées de leurs proches et des recrutements forcés par les membres de la ligue des jeunes du parti au pouvoir, les Imbonerakure.

FIDH - Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme
et son organisation membre au Burundi
Ligue Burundaise des droits de l’Homme – ITEKA