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Vincent Mercier : "Les droits de l’Homme restent un sujet qui dérange au Cameroun"

Organisateur du festival sur les films des droits de l’homme, il revient sur l’annulation

D 1er mai 2011     H 04:57     A Nanyan Diane     C 0 messages


Quelles ont été les motifs de l’annulation du festival international du film des droits de l’Homme ?

La menace à l’ordre public est le motif principal allégué par les autorités. Les autres motifs n’étant, on s’en doute, que des prétextes administratifs, fallacieux et grotesques. A l’évidence, cette décision brutale est tout simplement une atteinte directe à la liberté d’expression au Cameroun. Après Twitter, c’est une manifestation organisée par des jeunes camerounais dynamiques et créatifs qui s’adressait à l’ensemble de la population que l’on censure. Mais ainsi que le soulignait Voltaire "C’est le propre de la censure violente d’accréditer les opinions qu’elle attaque". En interdisant le festival, les autorités auront démontré, non sans talent - car toute la presse nationale et internationale s’en sont désormais faites l’écho - que les droits de l’Homme restent un sujet qui dérange au Cameroun.

N’avez-vous pas eu une autorisation auprès des autorités compétentes ?

Les organisateurs ont naturellement suivi la procédure ad hoc pour obtenir les visas d’exploitation des films qu’ils avaient prévu de programmer. La demande d’autorisation a été introduite auprès de la Direction de la Cinématographie pour l’ensemble des films le 22 février 2011 au nom du collectif formé par les trois associations organisatrices. Elle porte la référence n° 2052. Elle inclut tous les films prévus dans la programmation dont le film « Révolutions, mode d’emploi ». Cette autorisation a été délivrée le 9 mars et porte le n° 06/CNCFPVES/2011.
Les organisateurs sont évidemment dûment enregistrés auprès des autorités :
 Association Kofi Annan pour la promotion et la protection des droits de l’Homme et de la paix : n° 006/RDA/F35/BAPP, délivrée le 03 mars 2005 à Bafoussam.
 Association Espace Lumière (association de consultants en développement local et institutionnel) : n° 00280/RDA/J06/BAPP, délivrée le 18 juillet 2000 à Yaoundé.
 Alliance Ciné, n° 0783010327, association loi 1901 à but non lucratif, déclarée le 8 août 2000 en sous-préfecture de Saint Germain (France). Les récépissés de déclaration obtenus portent les références N° 066 RDRP/J06-01/SP pour le centre Province, division de Mfoundi, arrondissement de Yaoundé I délivrée le 21 mars 2011.
N°82/RD/J06-02/BAAJP pour l’arrondissement de Yaoundé II, délivrée le 7 avril 2011.
Le dernier récépissé qui devait nous être délivré par Yaoundé VI le 12 avril a été annulé de facto par l’arrêté préfectoral.

Le Gouvernement parle d’absence des visas pour l’ensemble des films.
Le Ministère de la Culture évoque le fait que la demande des visas a été faite au nom d’un seul des organisateurs et non de tous. Cette assertion est rigoureusement fausse comme l’atteste la copie de la demande que nous tenons à disposition de la presse ainsi d’ailleurs que tous les documents officiels.

Est-ce que les messages que véhiculent les films programmés pour le festival portent-t-ils atteinte à l’ordre public ?

C’est l’annulation brutale d’une manifestation de ce type qui est susceptible de porter atteinte à l’ordre public et non l’inverse. Tous les films programmés ont été diffusés dans les plus grands festivals de films internationaux et sur les chaines de télévision du monde entier.

Après ce drame, pensez-vous que les films centrés sur les droits de l’homme sont reconnus à leur juste valeur ?

Le cinéma sur les droits de l’homme est le média le plus puissant pour sensibiliser le plus grand nombre à cette thématique. Dès lors, les autorités auront craint exagérément les conséquences de mobilisation que ces films auraient pu occasionner. Or ces films ont d’abord pour vocation à faire réfléchir et permettre le débat. Chaque projection devait être suivie d’un dialogue avec le public et des intervenants de la société civile que nous avions invités pour l’occasion. Mais ces films circuleront quoiqu’il arrive. La censure ne peut jamais être totale, à l’heure des réseaux et d’internet. Les autorités en agissant ainsi, leur auront donné une notoriété encore plus grande. (d’aucuns disent que l’annulation du festival est due aux films projetés qu’ils ont appelés « les 11 films qui font peur au pouvoir »).

Avez- vous engagé une procédure pour relancer le festival ?

Oui mais elle ne peut aboutir compte-tenu des conditions préalables qui ont été mises, à savoir : revisionnage de l’ensemble des films par un comité ad hoc constitué pour la circonstance au niveau du Premier ministre, dixit Madame la Ministre de la Culture. Il s’agit à l’évidence d’une manœuvre dilatoire pour que le festival ne puisse se tenir.

Au cas où le ministre de la culture vous donnait son accord, quand et où aura lieu le prochain festival ?

Nous retenterons l’année prochaine pour proposer ce festival à la population camerounaise. Cette année, nous prenons acte de la censure des autorités camerounaises à notre égard.

Source : http://journalducameroun.com