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Les groupes armés en RCA

D 2 octobre 2014     H 05:21     A IRIN     C 0 messages


BANGUI - Le lancement officiel de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) a eu lieu cette semaine. La MINUSCA a pris le commandement des 6 000 soldats déployés par la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (MISCA) de l’Union africaine. [ http://www.un.org/fr/peacekeeping/missions/minusca/mandate.shtml ]

Le déploiement des forces de maintien de la paix suit l’accord de cessation des hostilités signé en juillet par plusieurs groupes armés agissants dans ce pays en proie à des insurgés de tout poil et frappé depuis une vingtaine d’années par une série de coups d’État.

Cette instabilité chronique était censée prendre fin en 2008 grâce à un « dialogue politique inclusif ». Cependant, les engagements pris lors de cette initiative historique n’ont pas été appliqués conformément aux attentes des principaux groupes armés ou d’autres groupes qui ont depuis pris les armes par frustration.

Au cours des deux dernières années, certains de ces groupes ont été neutralisés militairement ou dissouts, d’autres sont en passe d’être dissouts et d’autres encore sont toujours actifs.

Voici un aperçu de ces groupes.

Les Forces armées centrafricaines (FACA)

Ces dernières décennies, les 7 000 à 8 000 membres des FACA ont davantage constitué une menace envers la population qu’une garantie de leur sécurité. Les FACA sont craintes pour leur brutalité et les violations graves des droits de l’homme qu’elles ont commises en toute impunité. Elles ne s’éloignent jamais vraiment de la capitale, Bangui.

C’est là que l’armée, sous-financée, ethniquement déséquilibrée, mal administrée, à peine entraînée et mal payée a été vaincue par la rébellion de la Seleka, qui a pris le pouvoir en mars 2013, pillant toutes les armes trouvées dans les casernes. Michel Djotodia, leader du coup d’État, a ensuite annoncé la dissolution des FACA.

Actuellement, l’armée est à peine fonctionnelle et, grâce à un embargo des Nations Unies sur les armes, elle n’est même presque plus armée.

Reconstruire une armée reflétant la diversité de groupes ethniques du pays et capable de contribuer à la sécurité nationale est l’une des tâches les plus importantes et difficiles auxquelles la RCA doit faire face.

La Seleka CPSK-CPJP-UFDR

La Seleka (« alliance » en sango, la langue nationale) était une coalition de mouvements rebelles formée dans le but de destituer le président, M. Bozizé. Créée en septembre 2012, elle comprenait la Convention Patriotique du Salut du Kodro (CPSK), la Convention des patriotes pour la justice et la paix fondamentale (CPJP-Fondamentale - faction dissidente de la CPJP) et l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), fondée en 2006 par le futur leader du coup d’État, Michel Djotodia, revenu de son exil au Bénin pour prendre les commandes du groupe.

Dans sa déclaration inaugurale, la Seleka appelait à ce que les termes d’un accord entre le gouvernement et l’UFDR soient respectés et à l’application des conclusions du dialogue national.

La Seleka a brièvement participé à un gouvernement d’union nationale décrété par M. Bozizé, avant de se retirer puis de renverser le président le 24 mars 2013. Une fois au pouvoir, la Seleka, qui a dirigé le pays pendant 10 mois, a rapidement été marquée du sceau de l’infamie pour ses violences envers les civils dans les villes qu’elle occupait. Selon l’analyste en sécurité, Yves Golo Gatien, la Seleka comptait d’ailleurs dans ses rangs des « délinquants, des criminels, des bandits de grands chemins, des fugitifs recherchés par la justice et des mercenaires soudanais et tchadiens ».

M. Djotodia a annoncé la dissolution de la Seleka le 14 septembre 2013. Depuis, le groupe porte le préfixe « ex », même si les combattants de l’alliance demeurent actifs, sous le commandement de Joseph Zoundeko, et n’ont pas été désarmés.

Après la démission de M. Djotodia en janvier 2014, la plupart des anciens rebelles ont quitté Bangui. Quelques milliers sont restés, avec leurs armes, dans trois camps militaires de la capitale. Ils ont maintenant le contrôle de facto de la majorité du territoire centrafricain du centre au nord.

La présidente de transition, Catherine Samba Panza, a supervisé un cessez-le-feu entre les ex-Seleka et les anti-balaka (voir ci-dessous), mais certaines factions ne reconnaissent ni cette trêve, ni le gouvernement de transition formé en mars. Des groupes d’ex-Seleka rivaux se sont affrontés à plusieurs occasions.

La milice anti-balaka

Fin 2013, monseigneur Nestor Désiré Nongo Aziabgia, évêque de Bossangoa, écrivait : « Les nombreuses atrocités et violations des droits de l’homme perpétrées par la Seleka ont créé un sentiment de rébellion et poussé des hommes, incités par la violence, à organiser leur propre défense et leur propre justice [...] Les troubles au sein de différents segments de la population ont conduit à l’émergence de groupes d’autodéfense, dont les anti-balaka. »

Cette déclaration explique en partie la recrudescence du mouvement anti-balaka, mais pas sa véritable origine. Cette dernière date du début des années 1990. L’absence de toute institution de sécurité nationale avait alors entraîné l’apparition d’unités d’autodéfense dans le nord-ouest pour protéger les villages des bandits. [ http://www.irinnews.org/report/99634/briefing-who-are-the-anti-balaka-of-car ]

Si une grande partie des violences en RCA a été présentée de manière simplifiée comme un conflit entre musulmans et chrétiens et bien que de nombreux civils musulmans aient été tués ou attaqués parce qu’ils étaient soupçonnés de soutenir la Seleka (dont la majorité vient du nord-est, une région marginalisée majoritairement musulmane), les anti-balaka ne se considèrent pas comme une organisation chrétienne. Nombre d’entre eux portent d’ailleurs des accessoires propres aux animistes.

Un diplomate de Bangui a décrit les anti-balaka comme un ensemble hétéroclite de « paysans sans terres désoeuvrés, de bandits sans emploi [et] d’enfants des rues déscolarisés rejoints par d’anciens membres des FACA et de sympathisants de l’ancien président Bozizé. »

« Tout aussi désorganisés que les ex-Seleka, mais répartis en petits groupes de quelques individus, [les anti-balaka] ont été abandonnés à eux-mêmes, forcés de saisir les propriétés d’autrui - souvent avec une extrême violence - pour survivre », a-t-il ajouté.

Les anti-balaka contrôlent maintenant près de la moitié de la RCA, sous les ordres d’une douzaine de commandants répartie en différents secteurs et dont certains ont été arrêtés.

Un membre éminent des anti-Balaka, Patrice Edouard Ngaissona, a été ministre du gouvernement de M. Bozizé.

Révolution Justice (RJ)

Brièvement appelée Union des forces armées centrafricaines pour la restauration de la démocratie, RJ a été créée officiellement en 2013 par d’anciens membres de l’Armée populaire pour la restauration de la démocratie fondée par Jean Jacques Demafouth en 2006 et démantelée en 2011. Dirigée par le commandant Armel Sayo, RJ est active dans le nord du pays, plus précisément dans les préfectures d’Ouham et Ouham-Pende, près de la frontière tchadienne. Nombre de ses membres ont servi dans la garde présidentielle de l’ancien président Ange Felix Patassé. Son chef actuel a été commandant de la garde présidentielle.

D’autres membres appartiennent à des groupes d’autodéfense du nord-ouest et la plupart sont de l’ethnie Sara-Kaba. Le mouvement possède peu d’armes, de véhicules ou d’autres équipements. La plupart de leurs armes à feu sont artisanales.

À l’origine, l’objectif du groupe était de renverser M. Djotodia. Après le départ de ce dernier, RJ a annoncé que son but était d’assurer « la stabilité de tous les Centrafricains, quelle que soit leur communauté » et de lutter « contre tout ce qui va compromettre à la tranquillité des Centrafricains », comme les ex-Seleka et Baba Laddé, le chef des rebelles tchadiens actifs dans cette région.

Le Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC)

Le FDPC a été créé début 2006 par Martin Koumtamadji (plus connu sous le nom d’Abdoulaye Miskine), un associé de l’ancien président Ange-Félix Patassé. En décembre de la même année, M. Miskine a signé un accord de cessez-le-feu avec le gouvernement de M. Bozizé, mais l’accord a été violé plusieurs fois. Composé à l’origine d’un petit nombre de combattants, le FDPC ne contrôlait qu’un étroit secteur près de la frontière tchadienne. Le mouvement s’est développé fin 2008 et a alors lancé des attaques contre l’armée. En février 2009, le FDPC, soutenu par le MLCJ (voir plus bas), a menacé de redoubler de violence, accusant M. Bozizé de rompre avec ses engagements passés dans le cadre du traité de paix et de faire acte de mauvaise foi.

En 2012, le FDCP s’est rapproché de la Seleka lors de son avancée vers Bangui, avant de prendre des distances avec la coalition. En juin 2013, le groupe a affronté la Seleka à une centaine de kilomètres de Baboua, dans l’ouest de la RCA, essuyant de lourdes pertes. Le FDPC avait quitté sa base le long de la frontière tchadienne pour s’installer dans l’ouest de la RCA, plus précisément dans la région de Baboua, près de la frontière camerounaise. De là, les hommes de M. Miskine ont attaqué des villages et des camps peuls dans les deux pays, prenant des enfants en otage pour exiger des rançons. Leur chef a été arrêté au Cameroun, où il demeure incarcéré.

La Convention des patriotes pour la justice et la paix (CPJP)

La CPJP a été créée fin 2008 dans le nord-est du pays (dans la région de Ndélé plus précisément). Le groupe a signé un accord de cessez-le-feu avec le gouvernement en juin 2011 et a rallié la Seleka après la destitution de M. Bozizé. Après avoir passé un autre pacte avec Bangui, le mouvement a été dissout en septembre 2013.

Le Mouvement des libérateurs centrafricains pour la justice (MLCJ)

Créé par Abakar Sabone, le MLCJ est un groupe issu d’une scission au sein de l’UFDR en août 2008. Son chef a signé un accord de paix en décembre 2008 avant d’annoncer avec le FDPC, en février 2009, qu’il reprenait les armes. M. Sabone a accusé M. Bozizé de faire preuve de mauvaise foi, lui reprochant d’avoir exclu ses hommes du processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR). Il s’est ensuite rapproché de ce dernier, qui l’a nommé en 2010 commissaire au sein de la Commission électorale mixte et indépendante (CEMI). Après l’accord de Libreville signé en janvier 2013 par le gouvernement, les anciens rebelles de la Seleka et des politiciens, il a rejoint le gouvernement d’union nationale. Mais il a vite changé d’allégeance après la chute de M. Bozizé pour rejoindre la Seleka. Il est même devenu conseiller spécial de Michel Djotodia, son ancien compagnon de l’UFDR.

L’Union des forces républicaines (UFR)

L’UFR a été fondée et est dirigée par le lieutenant-colonel Florian Ndjadder, fils d’un général de police tué dans une tentative de coup d’État contre l’ancien président Ange-Félix Patassé. Le groupe opérait dans le nord-ouest, mais est inactif depuis plusieurs années. Le mouvement s’est divisé en deux en 2010, donnant naissance à l’UFR-Fondamentale, dirigée par Askin Nzenge Landa. Les deux groupes ont signé l’accord de cessation des hostilités à Brazzaville.

Le Front populaire pour le redressement (FPR)

Le FPR a été créé début 2011 par Baba Laddé, ancien officier de la gendarmerie tchadienne, pour « défendre les communautés peules ». M. Laddé est lui-même peul.

Le FRP a été considérablement affaibli début 2012 après une attaque par hélicoptère et forces terrestres des FACA et de l’armée tchadienne. L’attaque a entraîné la destruction des bases d’opérations du FPR.

Un accord de paix passé en 2012 avec le gouvernement centrafricain appelait les combattants du groupe à rentrer au Tchad, mais nombre d’entre eux sont restés dans les régions frontalières et certains ont combattu contre des unités de RJ et des ex-Seleka.

L’Armée de résistance du Seigneur (LRA)

Créée en Ouganda au milieu des années 1980 dans le but de destituer le président Yoweri Museveni, la LRA, connue pour ses monstrueuses violations des droits de l’homme, est présente en RCA depuis 2008 avec environ 200 combattants, malgré les efforts combinés des FACA, de l’armée ougandaise et des conseillers de l’armée américaine.

Les Bandits

Des bandits, connus localement sous le nom de zaraguina, opèrent en bandes organisées et bien armées qui tuent, enlèvent en vue de demander des rançons, pillent et incendient des maisons. En l’absence de forces de sécurité nationale efficaces, ils agissent en toute impunité. Les éleveurs peuls sont leur principale cible en raison de la valeur de leur bétail. Leurs attaques ont conduit des dizaines de milliers de personnes à fuir leur village pour mener une vie précaire dans la brousse, sans accès à leurs champs ni aux marchés. Les importations par les principales voies commerciales ont été coupées, notamment en provenance du Cameroun. Le rapatriement des réfugiés de RCA au Tchad a également été entravé par leurs activités.