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Le paludisme pèse sur le système de santé de la RDC

D 16 juin 2013     H 05:42     A IRIN     C 0 messages


KAMPALA - Selon les experts, les lacunes du système de santé de la République démocratique du Congo (RDC) entravent la lutte contre le paludisme, l’une des principales causes de décès chez les enfants.

Dans les dispensaires de la RDC, un tiers des consultations externes est dû au paludisme, a dit à IRIN Léonard Kouadio, spécialiste de la santé auprès du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). « [Le paludisme] est la première cause de décès chez les enfants de moins de cinq ans et il est aussi responsable d’une part significative des décès survenant chez les adultes et les enfants plus âgés », a-t-il ajouté.

« Des études rétrospectives sur la mortalité réalisées récemment ont révélé que la fièvre était associée à 40 pour cent des [décès d’]enfants de moins de cinq ans dans toutes les régions du pays », a continué M. Kouadio.

Le paludisme est également une cause importante d’absentéisme scolaire en RDC, et il pourrait aussi avoir d’autres effets négatifs. « Les enfants qui survivent à des épisodes graves de paludisme souffrent souvent de problèmes de santé sérieux comme l’épilepsie ou les troubles de la vision ou du langage », a-t-il dit.

Selon les estimations de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), au moins 40 pour cent des quelque 660 000 décès par paludisme survenus dans le monde en 2010 se sont produits en RDC et au Nigeria [ http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs094/fr/index.html ].

Le paludisme est à l’origine d’environ 50 pour cent des consultations et admissions d’enfants de moins de cinq ans dans les hôpitaux de la RDC, selon le Programme national de lutte contre le paludisme du gouvernement (National Programme for the Fight against Malaria, NMCP). Les enfants congolais de moins de cinq ans souffrent en moyenne de six à 10 épisodes de paludisme par année, selon M. Kouadio, de l’UNICEF.

Selon le programme de pays 2013-2017 de l’UNICEF pour la RDC, les principales causes de décès chez les enfants congolais de moins de cinq ans incluent, outre le paludisme, les infections respiratoires aiguës, les maladies diarrhéiques et la malnutrition.

Un système de santé déficient

« Il apparaît que les lacunes majeures du système de santé ont contribué à la gravité des épidémies récurrentes [de paludisme] », a dit à IRIN par courriel Jan Peter Stellema, responsable des opérations pour Médecins Sans Frontières (MSF).

« Des moustiquaires ne sont pas envoyées dans les zones vulnérables et il y a des pénuries de kits de diagnostic rapide, de médicaments et d’équipements pour procéder aux transfusions sanguines nécessaires aux enfants qui souffrent d’anémie à cause du paludisme. »

Parmi les autres problèmes, on peut notamment citer le coût élevé des soins et les défis en matière de gestion.

D’après le NMCP, le coût de traitement d’un épisode de paludisme sans complication oscille en effet entre 22 et 35 dollars, tandis que celui d’un cas sévère se situe entre 75 et 100 dollars. Dans un pays où une grande partie de la population vit avec environ un dollar par jour, ces tarifs sont prohibitifs pour de nombreuses personnes.

« Les habitants de la RDC sont vulnérables au paludisme en raison de l’absence d’autres fournisseurs de soins de santé et de l’incapacité des systèmes de santé à répondre à la demande. Puisque de nombreux centres de santé n’ont pas le matériel et les équipements nécessaires pour faire face à une nouvelle épidémie, des enfants ne peuvent être soignés et finissent par mourir du paludisme », a dit M. Stellema, de MSF.

Selon le programme de pays de l’UNICEF pour la RDC, « des problèmes de gouvernance, de gestion et de coordination pèsent sur le système [de santé] aux niveaux national, provincial et local et compromettent du même coup l’engagement politique, la planification, les dépenses budgétaires, la coordination et la formation de partenariats, la redevabilité et la transparence des fournisseurs de services et la participation de la population dans la gestion des services. »

« Combinés à l’extrême pauvreté, ces facteurs entraînent des barrières financières qui entravent l’accès des familles à la nutrition et aux services, ainsi qu’une fragilisation des normes sociales indispensables à la cohésion familiale et à un environnement protecteur pour les enfants », ajoute le document.

Investir dans la santé

« L’absence d’investissement de l’État et la fragmentation de l’aide publique ont érodé la capacité de la société civile et des structures publiques fonctionnelles à maintenir des services de qualité », indique le programme de pays de l’UNICEF pour la RDC.

« La réapparition et la propagation de certaines maladies (polio, rougeole et choléra) en sont la preuve. Peu d’efforts ont en outre été déployés pour moderniser les infrastructures. Les systèmes d’approvisionnement essentiels, comme les chaînes du froid par exemple, n’ont pas été mis en place », indique le document [ http://www.irinnews.org/Report/94516/DRC-Measles-immunization-campaign-targets-1-7-million-children ].

Selon les experts, il faut de toute urgence pallier les lacunes du système de santé congolais pour lutter contre le paludisme.

« La lutte contre ce fléau doit demeurer une priorité pour le pays en dépit du manque de ressources financières », a dit M. Kouadio, de l’UNICEF. « Le gouvernement et ses partenaires doivent consacrer davantage d’argent à la lutte contre le paludisme en RDC, et notamment à l’acquisition et à la distribution universelle de moustiquaires aux ménages, à la fourniture de médicaments essentiels et de kits de diagnostic rapide et à l’adoption de mesures d’assainissement de l’environnement. »

Le paludisme est présent presque toute l’année en RDC en raison du climat tropical et de l’imposant réseau hydrographique du pays. La RDC compte en effet une trentaine de cours d’eau importants totalisant au moins 20 000 kilomètres de berges et 15 lacs totalisant environ 180 000 kilomètres de rives. Ce réseau offre des environnements propices à la prolifération des maladies et des vecteurs de maladies, et notamment du moustique anophèle, qui transmet le paludisme.

Selon M. Stellema, de MSF, le gouvernement de la RDC et les acteurs nationaux et internationaux de la santé doivent prendre des mesures rapides et durables pour prévenir et traiter le paludisme afin de mettre fin aux décès évitables d’enfants. En 2012, MSF a traité un demi-million de Congolais pour le paludisme ; une grande partie d’entre eux étaient des enfants de moins de cinq ans.

« La réponse d’urgence de MSF vise à sauver des vies à court terme. À long terme, l’organisation ne peut pas faire face toute seule à la crise [du paludisme] », a dit M. Stellema.

source : http://www.irinnews.org