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Gabon : Allocution de ça suffit comme ça

Conférence Internationale de StrategiCo sur les pays en crise

D 23 novembre 2012     H 14:50     A Ça suffit comme ça !     C 0 messages


Mesdames et Messieurs, distingués invités, c’est au nom du principal Mouvement de la Société Civile Gabonaise engagé dans les pressions en faveur des reformes démocratiques au Gabon que je m’exprime. Par notre propos, je souhaite vous indiquer l’étendue de la crise générale qui affecte mon Pays et qui comporte des risques majeurs pour sa stabilité si la communauté internationale laisse les choses pourrir.

En effet, suite à la prise du pourvoir antidémocratique d’Ali BONGO en 2009, fondée sur un processus électoral complètement irrégulier, marqué par des fraudes à grande échelle et consacré par un coup d’état électoral avec la complicité active du ministère de l’intérieur, de l’Armée et de la Cour Constitutionnelle, trois Institutions inféodées à la famille Bongo, le Gabon traverse une crise politique, sociale et économique sans précédents dont les caractéristiques sont :

En matière politique :

On constate depuis l’arrivée au pouvoir d’Ali Bongo la mise en place d’une dictature particulièrement agressive et non respectueuse des droits civils et politiques des citoyens gabonais qui par ailleurs sont constitutionnellement reconnus. On enregistre de fréquentes violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La population de Port-Gentil, capitale économique a payé un lourd tribut en septembre 2009 avec l’assassinat de plusieurs dizaines de personnes et autres violences diverses dont se sont rendus coupables les milices et autres soldats agissant sous les ordres du régime. De ce fait, la Cour Pénale Internationale a accepté l’ouverture d’une procédure d’enquête.

Partout dans le pays, la société civile dénonce les arrestations arbitraires et le recours réflexif à la torture, et à sa pratique exponentielle sur les citoyens dans tous les lieux de détention et les centres pénitenciers à l’échelle nationale. Dans le même registre de violations des Droits de l’Homme, une féroce répression s’est abattue sur le mouvement estudiantin de l’Université de Libreville : une centaine d’entre eux ont été victimes d’arrestations arbitraires à l’intérieur du campus universitaire au mépris des franchises universitaires reconnues à ces hauts lieux de formation des élites appelées à construire le progrès de notre Pays. Le leader de ce mouvement a été condamné à 2 mois de prison par une Justice aux ordres d’Ali Bongo.

La restriction de la liberté d’expression marquée par de nombreuses suspensions d’organes de presse au motif qu’ils critiquent le régime, à l’exemple de l’UN et EZOMBOLO, deux des principaux qui écopé de six mois de suspension prononcés par le Conseil National de la Communication, un organisme sensé réguler la communication au Gabon, mais qui s’illustre par des entraves régulières à la Liberté de la Presse. TV+, la plus importante chaine de télévision privée a été durant toute cette année victime d’actes de sabotage par des éléments armés. La restriction de l’action des organisations de la société civile et des syndicats libres qui voient constamment leurs activités entravées par le Gouvernement : des Syndicalistes ont vu leurs salaires suspendus en 2011 pour avoir revendiqué des meilleures conditions de travail et plusieurs d’entre eux ont été emprisonnés.

Dans sa volonté d’imposer un système de parti unique et d’assoir l’hégémonie de son clan politique et de violer les règles fondamentales de la démocratie pluraliste, ALI BONGO a posé un certain nombre d’actes anti démocratiques qui traduisent avec éloquence la nature tyrannique de son régime :
 • L’interdiction d’un important parti politique de l’opposition à savoir l’Union Nationale, pour avoir légitimement contesté avec véhémence l’élection 2009 d’Ali BONGO ;
 • Des poursuites judiciaires arbitraires à caractère politique contre de nombreux cadres et sympathisants de ce parti.
 • l’interdiction des marches et autres modes d’expression pacifique ; Dernièrement, 48 citoyens ont été faits prisonniers politiques. Nos amis Partis Politiques Français nous ont rejoint dans celle nouvelle dénonciation.
 • La réforme Constitutionnelle unilatérale de 2011, décidé par Ali BONGO qui lui permet aujourd’hui de concentrer tous les pouvoirs et qui consacre de facto la Présidence à vie et la monarchisation du pays au profit de la famille BONGO et de ses inféodés ;
 • l’élection législative du 17 décembre 2011 qui s’est tenue dans l’indifférence générale car boycottées par plus de 90 % de la population Gabonaise. Les Gabonais ont refusé d’aller voter et de cautionner une parodie d’élection. Les centres de votes dans tout le pays étaient occupés par les forces armées sous la supervision exclusive des représentants du parti-état, le PDG. Sur les 120 sièges de députés que compte l’Assemblée Nationale Gabonaise, 116 députés sont aujourd’hui réquisitionnés par le parti totalitaire PDG et, les 4 autres sièges sont partagés entre 4 autres partis dont deux de la majorité républicaine, c’est-à-dire inféodés au PDG, et deux partis minoritaires et dissidents de l’opposition .

En matière économique :

Nous notons l’augmentation du nombre des chômeurs et par conséquent la précarité des ménages. Cela, suite à des décisions aussi illégales qu’hasardeuses comme celle relative à l’interdiction d’exportation de grumes. De plus, les petites et moyennes entreprises locales ferment les unes après les autres fautes de marchés. Alors que le pays manque d’hôpitaux, de médicaments, d’écoles, le pouvoir s’est lancé dans des dépenses somptueuses tels que :

 • L’achat d’un hôtel particulier à Paris d’un montant de soixante cinq (65) milliards de francs CFA ;
 • L’achat pour trois milliards (03) de francs CFA de la demeure du sénateur Ted KENNEDY ;
 • La constitution d’un parc automobile pour dix milliards (10) de francs CFA ;
 • L’achat d’un ranch en Afrique du sud d’une valeur de cinq (05) milliards de francs CFA ;
 • L’organisation à Libreville d’une course de bateaux de luxe pour quatorze (14) milliards de francs CFA ;
 • L’organisation d’une partie de la Coupe d’Afrique des Nations pour cinq cent (500) milliards de francs CFA. Au titre de cette manifestation, la passation de certains marchés de la CAN s’est faite sur le principe du gré à gré à des sociétés proches de la famille présidentielle. A ce jour, le Gouvernement n’a pas justifié au peuple Gabonais l’utilisation qui a été faite des milliards de la CAN. Nous attendons des réponses claires sur cette affaire. Nous voulons des informations précises sur la manière dont les agences ont géré l’argent de la CAN.

 • On constate également que la création d’Agences échappant à tout contrôle législatif et dépendant directement d’Ali BONGO a occasionné une utilisation non réglementaire du budget d’investissement, tout en vidant le Gouvernement de ses prérogatives constitutionnelles au point que les députés PDG ont ouvertement critiqué sous l’impulsion de Guy NZOUBA NDAMA, l’action des agences créée par Ali BONGO . En règle générale, on note que le gaspillage de l’argent public à travers l’organisation d’activités festives à coût de milliards de francs CFA au frais du contribuable et au détriment des investissements sociaux, est devenu la nouvelle norme de gestion des deniers de l’Etat.

 • L’accaparement des terres des populations en zones rurales et la destruction programmée de plusieurs centaines de milliers d’hectares de forets vierges au profit des industriels asiatiques dont la tristement célèbre société OLAM (Singapourienne-Malaisienne) constitue le projet du siècle du régime émergent.

Conçus dans l’objectif de faire du Gabon une source de production d’huile de palme et d’hévéa, en violation des engagements internationaux du Gabon en matière de préservation de l’environnement, les projets de plantations du Groupe OLAM sont le dernier haut fait d’armes du régime d’Ali BONGO. Dans un pays où la sécurité alimentaire n’est pas atteinte, et où le coût très élevé des denrées alimentaires s’explique par l’importation des produits vivriers auprès des pays voisins, la question qu’on peut se poser est celle de savoir pourquoi OLAM ne s’orienterait il pas vers la redynamisation de la culture du riz à Nyali dans la Nyanga, la Banane à Ndougou et le Woleu-Ntem en général, le tarot dans la Ngounié etc… afin cette fois, d’aider le Gabon à diversifier son économie sur des bases plus unanimes, saines, et de nature à permettre à notre Pays de retrouver sa souveraineté alimentaire comme se fut le cas jusqu’au début des années 70.

Dans sa propagande, le Gouvernement d’Ali BONGO avait fait miroiter d’hypothétiques potentialités qu’OLAM offrirait à l’Etat gabonais, en tant que fonds d’investissement apte à soutenir son processus de diversification de l’économie.

Après examen, force est de constater qu’OLAM n’est en réalité qu’une entreprise écran sans ressources véritables. OLAM utilise l’Etat Gabonais comme une caution pour lever des fonds sur le marché international. Les prétendues capacités financières d’OLAM sont inexistantes voire virtuelles. Les investissements promis par OLAM sont par conséquent fictifs. Face à cette imposture économique et aux activités suspectes de cette entreprise au Gabon, la présence du Groupe OLAM suscite de vives inquiétudes auprès d’une large majorité des Gabonais. Nous souhaitons que l’Union Européenne mène des investigations sur les activités criminelles d’OLAM au Gabon.

En matière sociale :

 • La destruction à Libreville en 2011 de plusieurs milliers de logements des populations économiquement faibles, sans proposition d’alternatives crédibles, aggravant du même coup la fracture sociale, a constitué un acte de bravoure à l’actif du régime émergent ;
 • La déstructuration du système sanitaire se traduit par la vétusté exacerbée des structures de santé et une dégradation innommable de la qualité des soins de santé ;
 • La vie chère est de plus en plus oppressante pour des centaines de milliers de ménages Gabonais, où assurer régulièrement des repas à une progéniture difficilement scolarisée et soignée relève de l’exploit alors que le Gabon s’offre un classement parmi les 5 pays les plus riches du continent ;
 • Pour se nourrir, certains compatriotes font leur marché à la décharge municipale de Mindoubé où ils récupèrent des cartons de vivres avariées quand la providence leur en donne l’occasion ;
 • Les mouvements de grèves sont endémiques dans la quasi totalité des secteurs de l’administration publique ;
• Le système éducatif va à veau l’eau avec une formation au rabais de notre jeunesse sur fond de grogne du corps enseignant.
Pour trouver une porte de sortie honorable à notre Pays, le Mouvement ça suffit comme ça, la Convention de la Diaspora Gabonaise, les Partis politiques de l’opposition démocratique invitent toutes les forces vives à une mobilisation pour la tenue de la Conférence Nationale Souveraine.

En tant que citoyens responsables et soucieux de la préservation de la Paix, de la cohésion sociale, déterminés à imposer la démocratie véritable dans notre Pays, nous appelons l’Union Européenne à nous aider et à faciliter la tenue d’une Conférence Nationale Souveraine incluant l’ensemble des forces politiques et la société civile avec l’implication de la Communauté Internationale et de la France. Les 45 années de gestion du Gabon par le clan Bongo et le système politique prédateur du PDG ont plongé le Gabon dans la désolation.

A tous les niveaux, le Gabon est un véritable champ de ruines. Notre pays est à reconstruire sur des bases nouvelles. Le Gabon doit cesser d’être la propriété des Bongo où ces derniers peuvent se servir à volonté au détriment de la majorité de la population qui croupit dans une misère ignominieuse. Nous voulons mettre fin aux injustices sociales et à la corruption qui gangrènent l’Etat et qui empêchent tout développement au Gabon. Il est urgent que l’Union Européenne prenne des mesures appropriées contre les Biens Mal Acquis présents sur son territoire. Nous voulons des signaux forts de l’Union Européenne sur la corruption politique au Gabon.

Nous voulons bâtir maintenant une nouvelle République fondée sur l’Equité, la Justice et la Démocratie. Nous voulons reconstruire le Gabon. Partout à travers le pays, une forte soif de liberté se manifeste. Les gens aspirent à autre chose et souhaitent vivement être débarrassés de 45 ans de médiocrité et d’obscurantisme à la tête de l’Etat.

La Conférence Nationale Souveraine s’impose résolument comme la seule alternative de sortie de crise pour sauver le Gabon de la faillite actuelle, traduction de la déliquescence généralisée de l’Etat qui fait que toutes les institutions n’ont plus aucune légitimité. C’est en définitive ce même message qui a été délivré lors du Forum Mondial sur la Démocratie tenu en octobre à Strasbourg que nous avons voulu vous renouveler afin qu’ensemble, nous puissions faire du Gabon, un Etat de droit démocratique, débarrassé d’un régime des plus corrompu, qui tue ses enfants.

Fait à Bruxelles, le 16 novembre 2012