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Tchad : La grève des travailleurs se durcit, les étudiants ne reculent pas

La police réprime avec férocité et Deby donne de mauvaises réponses !

D 15 novembre 2011     H 12:50     A     C 0 messages


S’il n’est pas de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre, l’autre évidence est qu’il n’y a pas de pire chef d’Etat que celui qui ne veut ni entendre, ni tenir compte de la colère de son peuple. Les Ben Ali, Moubarak, et autres Kadhafi ont joué obstinément les sourds et les autistes à l’épreuve de la colère de leurs peuples respectifs. Ils ont fini par réaliser – mais bien tard - que la voix du peuple, c’est la voix de Dieu. Au Tchad, depuis plusieurs semaines, le peuple bat le pavé, manifeste avec obstination, et réclame avec détermination ce qui lui est dû, mais Idriss Deby Itno s’obstine à se boucher les oreilles, s’entête à garder ses yeux fermés et pense, bien à tort, que c’est par les bombes lacrymogènes, les coups de fusils à balles réelles, les arrestations en masse, et l’irréductibilité que les multiples récriminations du peuple Tchadien seront résolues. Ce sont là de mauvaises réponses.

Mercredi, 09 Novembre 2011 - une incandescente manifestation animée par les étudiants Tchadiens - désormais soutenus par une marée des élèves du secondaire - a instauré un climat d’apocalypse sur une grande partie de la capitale Tchadienne, notamment sur l’axe reliant le lycée Félix Eboué et le building de Moursal.

Les policiers et gendarmes dépassés par la furia des enfants ont largué un nombre incalculable de bombes lacrymogènes, avant d’ouvrir carrément le feu sur les pauvres enfants.

Jeudi 10 Novembre 2011 : Même scénario à N’djamena, la manifestation a commencé très tôt le matin avec des élèves et étudiants qui, de plus en lus déterminés ont amené toutes les écoles privées de N’Djamena à fermer. Ces manifestations, entreprises et courageusement animées par les étudiants depuis plusieurs semaines maintenant ont indubitablement pris une forme et un format désormais difficiles à contenir. Pire, le pays tout entier s’embrase :

Les étudiants de Moundou, Sarh et Abéché – une grande manifestation est prévue demain à la gare routière d’Abéché - sont pour leur part aussi déjà entrés dans le feu de la révolte. Ça chauffe aussi déjà très fort de ce côté et les forces de l’ordre, hésitantes au début, utilisent maintenant les bombes lacrymogènes à tout va, et procèdent à des arrestations en masse.

Mais le plus inquiétant est que les balles tirées par les forces de répression ont fait près d’une centaine d’étudiants gravement blessés le jeudi 10 Novembre à N’djamena. Des blessés qui ont été conduits dans différentes structures hospitalières de la ville, avec dans le lot plusieurs dizaines de femmes enceintes victimes des émanations des gaz.

Encore plus inquiétant, on parle déjà de plusieurs dizaines d’étudiants kidnappés et conduit vers des destinations inconnues.

Anecdote. Le mercredi matin, le nouveau ministre du plan qui passait non loin d’un foyer de manifestation a essuyé l’ire des manifestants, et c’est de justesse qu’il a pu éviter que son véhicule ne soit brûlé, ayant réussi à prendre la poudre d’escampette.

Mais que réclame au juste la jeunesse Tchadienne si furieuse aujourd’hui ?

Les étudiants réclament, ni plus ni moins le versement intégral, et dans un bref délai, de six mois d’arriérés de bourses, la revalorisation des bourses à 60 000 FCFA à compter du mois d’octobre dernier 2011, la création du cycle complet du système Licence Master Doctorat (LMD) ainsi que son application dans tous les départements et à tous les niveaux de l’université de N’Ndjamena, l’organisation des corrections des examens en commission pour permettre la proclamation des résultats dans un délai raisonnable conformément aux textes, la suppression des frais d’impression des cartes biométriques, la réhabilitation des bourses de recherche au niveau du Master I, l’octroi des bourses d’excellence et le recrutement des enseignants qualifiés.

« C’est seulement quand tous les acquis de l’année 2010 – 2011 et que toutes ces conditions seront remplies que l’année 2010 – 2011 ne sera pas déclarée blanche, » a confié un des responsables de l’Union nationale des étudiants du Tchad (Unet), il y a quelques jours.

Mais apparemment, Idriss Deby continue de s’emmurer dans l’indifférence. La preuve, Le ministre de l’enseignement supérieur, M.Djidda, a déclaré sur les ondes de la RNT que "l’État ne doit rien aux étudiants".

Une mauvaise réponse qui vient rejoindre celle que le Président Sultan a donnée aux travailleurs de la fonction publique en grève auxquels il n’a consenti à proposer qu’une revalorisation de leur grille salariale de 60 points sous le faux prétexte que les possibilités financières de l’Etat ne pourraient accorde davantage.

Mais, 60 points ne représentent en tout et pour tout que 20% des 300 points que les travailleurs revendiquent. Au final, Idriss Deby ne veut concéder que des broutilles, estiment les grévistes au regard de la vie rendue chère par la flambée des prix des denrées de première nécessité et du carburant fourni par la raffinerie locale.

Tentant de faire passer la pilule amère, le chef du gouvernement tchadien, s’est escrimé à tenter de faire croire aux grévistes que relever les salaires de la Fonction publique à hauteur de 20% aura une incidence de 2,5 milliards par mois sur la masse salariale de l’Etat estimée mensuellement à 33 milliards.

"Si nous satisfaisons entièrement aux revendications des fonctionnaires, prétend Emmanuel Nadingar, la masse salariale de l’Etat passera à 49 milliards de francs CFA par mois, soit 588 milliards par an. Or l’actuelle masse salariale engloutit déjà les recettes non pétrolières de l’Etat estimées à 390 milliards de francs CFA".

Voilà donc le peuple Tchadien qui a décidé de prendre son courage à deux mains pour exprimer son désarroi. En 21 ans de règne despotique, le Général Président n’avait pas encore essuyé une telle détermination de la part des travailleurs et des étudiants et élèves. Face à la résistance Armée, il n’a usé que du langage des armes à feu. Aujourd’hui que le peuple désarmé exige de meilleures conditions de vie, et surtout son dû, il continue sur la même logique. Au secours.

L’ONU et la communauté internationale sont-ils devenus aveugles ? Ne voit-on pas que le peupleTchadien n’en peut plus ?

Faudra-t-il attendre qu’il y ait encore plus de blessés, plus de morts et plus de manifestants enlevés et sommairement abattus pour décider d’une … zone d’exclusion aérienne au Tchad ? La balle est dans le camp de la communauté internationale. Le peuple Tchadien, lui, ira jusqu’au bout. Il n’a plus rien à perdre.

Source : http://www.tchadenligne.com