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Pour une Union africaine des peuples : Les Leçons du Burkina Faso

Par Désiré Assogbavi

D 12 décembre 2014     H 18:13     A     C 0 messages


Les critiques portées contre l’Union africaine sur la situation au Burkina Faso son le reflet d’un sentiment réel éprouvé par les fils et filles de notre continent face à la seule organisation panafricaine dont nous disposons. Ces commentaires doivent interpeller l’Union africaine et son leadership. Elle a réagi positivement, mais hélas trop tard… comme d’habitude, après que le peuple ait lui-même chassé le dictateur avec tous les risques que cela comportait.
Suite aux évènements qui ont cours au Burkina Faso et qui ont conduit à la chute du régime de Blaise Compaoré et à la prise du pouvoir par les militaires, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine s’était réuni le 3 novembre 2014 et avait donné un délai de 15 jours aux militaires pour remettre le pouvoir a une autorité civile de consensus. Le Conseil a notamment « exigé que l’Armée du Burkina Faso quitte le pouvoir, qui doit être transféré à une autorité civile, conformément à la Constitution, dans un délai maximal de deux semaines… »

Ceci est certainement une prise de position catégorique en faveur de la primauté du droit et de la démocratie auxquelles aspirent nos frères et sœurs du Faso. Mais alors que je m’attendais (peut être naïvement) à une réaction très positive et de soulagement du peuple burkinabè face à ce soutien de l’Ua les commentaires des internautes du Faso et d’ailleurs nous interpellent. En voici une sélection que j’ai copiée sur le site de Rfi tout en évitant les plus insultants :

 « Où était l’Ua, ce syndicat de dictateurs, quand Compaoré menaçait la démocratie en refusant aux Burkinabè le droit à l’alternance ? Ce que nous voulons, c’est une Union africaine des peuples, qui se préoccupe un peu plus du progrès du continent »

 « L’UA !!! ça existe toujours ??? »

 « Que l’Ua aille se faire voir en l’enfer. Où était ce SYNDICAT DE MALHONNETE quand Blaise voulait faire son coup constitutionnel ? Qu’est-ce que l’UA a dit ou fait quand l’OTAN a tué son père Kadhafi ? » Ils ne s’occupent que de leurs poches, de leurs VENTRES…

 « Quand Blaise matait la révolution on n’a entendu ni l’UA ni la France ni les USA ni l’ONU… »

 « Nous demandons à l’UA de dire un mot sur ce qui se passe en RDC avant qu’il ne soit trop tard, bientôt il y aura révolte contre la révision constitutionnelle

 « L’Union Africaine est une organisation à supprimer sur la liste des organisations internationales a cause de son inefficacité… »

 « Pourquoi l’UA n’a pas voulu sanctionner Blaise Compaoré lorsqu’il voulait modifier l’article 37 et maintenant c’est le peuple Burkinabé qu’elle veut sanctionner honte à toutes ses institutions »

 « Mieux vaut pour l’UA de s’occuper d’Ébola, nous réglons nos affaires… »

En toute honnêteté, ces commentaires sont le reflet d’un sentiment réel éprouvé par les fils et filles de notre continent face à la seule organisation panafricaine dont nous disposons. Ces commentaires doivent interpeller l’Union africaine et son leadership. Ces commentaires doivent être pris au plus grand sérieux. L’Union Africaine a réagi positivement, mais hélas trop tard… comme d’habitude, après que le peuple ait lui-même chassé le dictateur avec tous les risques que cela comportait. Il n’y a pas eu une seule déclaration de principe en direction de Compaoré depuis qu’il machinait pour changer la Constitution, afin de briguer un autre mandat après 27 ans de pouvoir absolu suite à l’assassinat de Thomas Sankara, Lingani et Zongo.

Aujourd’hui, l’Union Africaine est elle-même dirigée un autre auteur de coup d’Etat, le Mauritanien Abdel Aziz… le Conseil de Paix et de sécurité est présidé par la Guinée Equatorial, pays dirigé par un autre auteur de coup d’Etat, Obiang Nguema (35 ans au pouvoir)…. Beaucoup d’autres présidents ont confisqué le pouvoir depuis des décennies et ne sont pas prêts à partir : Dos Santos (35 ans), Robert Mugabe (34 ans comme Pm puis Pr), Paul Biya (32 ans), Museveni (28 ans), Yahya Jammey (20 ans), etc., la liste est longue…. Malheureusement ils constituent l’Union africaine … Alors qui peut dire quoi a qui ?

QUE FAUT-IL FAIRE ?

 La Commission de l’Union africaine et son leadership doivent effectivement jouer leur rôle de moteur de l’Union en saisissant les occasions appropriées pour rappeler publiquement aux chefs d’Etats les contenus des beaux textes et principes qu’ils ont eux-mêmes adoptés, y compris les valeurs partagées

 L’Union doit faire un effort sérieux, honnête et non-discriminatoire, pour encourager la participation citoyenne dans ses affaires et mieux faire connaitre l’Union et ses défis aux citoyens africains.

 La Commission de l’Union doit réagir plus promptement et prendre position en amont sur la base des textes et principes déjà existants, quand de pareils problèmes de posent. Ceci catalyserait sa crédibilité auprès des populations

 L’Union et la Commission doivent comprendre que sans le soutien des populations africaines, l’organisation serait vouée à l’échec. Elle doit donc travailler sérieusement pour montrer aux populations des actes et faits concrets qu’elle peut générer. Je suis convaincu qu’elle en est capable si la volonté politique et le courage y sont.

 Pour avoir travaillé pendant huit ans auprès de l’Union africaine (pas pour l’Union Africaine), je suis convaincu que l’Union regorge de ressources importantes et de potentialités qui sont encore non utilisées… Le leadership doit être dépolitisé et se mettre au travail avec courage en ayant comme seul objectif le bienêtre commun et l’avenir de l’Afrique qui accuse déjà beaucoup de retard.

Nb : Je précise que mes opinions sont personnelles, elles sont celle d’un fils du continent et n’engagent aucunement l’organisation pour laquelle je travaille.

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** Desire Assogbavi est directeur du bureau d’Oxfam auprès de l’Union africaine

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