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MALI : résolument contre l’intervention française

D 23 mars 2013     H 05:38     A Paul Martial     C 0 messages


La décision d’intervention militaire française au Mali suscite
beaucoup de débats dans la gauche française, mais aussi
dans les milieux anti-impérialistes, notamment africains.
Beaucoup ont été sensible à la politique du moindre mal. Au
regard des horreurs dont se sont rendus responsables les
djihadistes, la libération des populations par l’armée française
représentait une solution, à défaut d’être positive, au moins
acceptable.

D’autres, toujours dans les milieux progressistes, considèrent qu’il
y a une offensive généralisée des djihadistes soutenue par les
pétromonarchies du Golf et, dans ce cas, l’intervention française
peut porter un coup fatal contre la montée en puissance des
djihadistes et qu’il convient donc de soutenir.
Pour notre part, nous considérons l’intervention non comme un
fait isolé, mais comme une action qui s’inscrit dans un cadre
global, celui de l’ingérence française au Mali.
Depuis le début les autorités françaises savent qu’elles ne
peuvent compter sur Amadou Toumani Touré pour rétablir la
sécurité au Nord Mali ; cette région est proche des mines
d’uranium (exploitées par AREVA) qui demeurent un élément
essentiel pour l’approvisionnement de sa politique nucléaire.
Pourquoi ATT n’est pas un élément fiable dans la lutte contre les
djihadistes ?

En premier lieu ATT sait très bien que l’armée malienne ne fera
pas le poids, tant au niveau de son moral que de son équipement
face à des djihadistes bien armés et cela risque d’être un danger
pour la stabilité de son pouvoir. En deuxième lieu, il sait aussi
(certains ajouterons parce qu’il en bénéficie) que la corruption de
son clan, tant politique que militaire, touchent leur part dans les
différents trafics du nord Mali. Ainsi la solution préconisée par le
gouvernement Sarkozy était de s’appuyer sur les Touarègues qui
s’enfuyaient de Libye et c’est ce qui explique que le MNLA pourra,
sans encombre, traverser la frontière nigérienne et/ou algérienne
pour rejoindre le Nord Mali, sans être désarmé, alors que les
milices touarègues retournant au Niger, elles, ont tout de suite
été neutralisées.

L’idée est simple, en échange d’une quasi-indépendance du nord
Mali, le MNLA s’engage à sécuriser la région contre les djihadistes
qui s’attaquent aux intérêts français. Ce que n’ont pas prévu les
stratèges du Quai d’Orsay c’est que la dynamique enclenchée a
précipité l’effondrement de l’État malien. Au nord où le MNLA, dés
le début fait alliance avec les Djihadistes, s’empare des grandes
villes pour ensuite se faire expulser par leur ancien allié qui font
régner la terreur sur les populations. Au sud du pays, notamment
à Bamako face à une mutinerie, le pouvoir s’effondre et les
mutins se retrouvent au pouvoir sans réellement l’avoir prévu.

La France va donc porter une très grande responsabilité dans la
crise malienne, ce qui ne l’empêche pas de continuer son
ingérence à travers la CEDEAO, l’organisme des pays de l’Afrique
de l’Ouest qui est surtout, à l’exception des deux pays
anglophones, le club de la Françafrique. En effet, un embargo
contre le Mali est décrété immédiatement dans le but d’empêcher
la tenue d’assises souveraines permettant au peuple malien, dans
toute sa diversité, de prendre sa destinée en main et de créer des
institutions politique légitimes à même de diriger la libération du
nord du pays, y compris avec l’aide d’armées étrangères, mais
sous sa direction.

On imagine bien qu’un tel scénario n’était pas du goût des
dirigeants de la France, aussi bien de Sarkozy que de Hollande,
même si on nous répète que la Françafrique est finie. Nous
n’avons pas vu la preuve de la fin de l’impérialisme français et les
derniers faits marquant tendent à prouver le contraire avec les
interventions militaires en Côte d’ivoire, au Tchad et en Libye.
Bien que cela ne soit pas déterminant, l’épisode reste néanmoins
révélateur de l’ingérence française au Mali ; en effet pendant des
mois la CEDEAO à bloqué les armes pourtant régulièrement
achetées par le Mali., ces dernières ne furent libérées trois jour
après que Dioncounda Traoré ait demandé officiellement l’envoie
d’une force militaire étrangère au Conseil de Sécurité de l’ONU.

Croire que l’intervention française se limitera uniquement au
domaine militaire est une illusion. La preuve c’est que Paris
insiste, par la voix de son ambassadeur, pour que l’État d’urgence
soit réellement respecté à Bamako jouant le rôle de ministre de
l’intérieur, c’est la France qui décide où doit aller l’armée malienne
et surtout où elle ne doit pas aller. Le choix des autorités
françaises de travailler avec le MNLA, dans l’extrême nord du
mali, est un avant goût du futur dialogue politique malien. Une
négociation entre les anciens du régime d’ATT et la direction du
MNLA, prétendant parler au nom de toute la population du nord,
bref on prend les mêmes dirigeants, tant au sud qu’au nord, pour
déboucher sur des accords identiques à ceux du passé, avec les
conséquences catastrophiques que l’on connaît. Mais cette fois-ci
avec, en prime, une base militaire française permanente au Mali
qui s’ajoute à celle du Burkina Faso et du Tchad, plus une base
américaine avec des drones au Niger et un gouvernement malien
affaiblit redevable à (l’ex) puissance coloniale.

Nous considérons que l’on ne peut pas être contre l’ingérence
française au Mali, et plus généralement en Afrique, et être en
même temps pour l’intervention militaire française. Ici comme
ailleurs il est important de continuer à dénoncer, avec opiniâtreté,
la politique de la France au Mali qui a contré l’émergence d’une
solution malienne pour mieux protéger ses intérêts économiques
et politiques.

Paul Martial