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Souveraineté alimentaire : Le combat d’un consortium au Niger

D 1er novembre 2010     H 04:35     A H B Tcherno     C 0 messages


La souveraineté alimentaire est un sujet d’actualité. Depuis la crise globale de 2008, il est au cœur des revendications de la société civile et des mouvements paysans qui se battent pour un monde débarrassé de la faim. Au Niger, depuis quelques années, un consortium d’OSC a vu le jour pour prendre en charge cette thématique.

La crise de 2008 a remis à l’ordre du jour les enjeux de production et de politiques agricoles à l’origine de la pauvreté et de la faim dont souffre atrocement l’humanité. Face à cette crise d’une ampleur sans précédent, de nombreuses organisations paysannes et de citoyens vexés par la situation de dépendance alimentaire ont décidé de réagir en revendiquant l’érection immédiate des politiques agricoles et de développement ayant pour finalité la souveraineté alimentaire. Popularisé par le mouvement paysan transnational La Via Campesina -regroupement de centaines d’organisations d’agriculteurs et de familles paysannes présents dans 69 pays- en réplique au concept de sécurité alimentaire, la notion de souveraineté alimentaire est définie comme « le droit des peuples d’élaborer leurs propres politiques agricoles ».

Développée en opposition au concept de sécurité alimentaire qui fait surtout référence à la production d’aliments en quantité suffisante, sans se soucier du mode de production ou du type d’aliments, la notion de souveraineté alimentaire intègre la diversité des cultures, le choix du type d’aliments en mettant « l’accent sur l’auto-gouvernance du système alimentaire par ceux et celles qui vivent de la terre et la cultivent ». Cette approche constitue une rupture par rapport à l’organisation actuelle des marchés agricoles mise en œuvre par l’organisation mondiale du commerce (OMC).

Les contours et les grands axes stratégiques de ce concept ont été précisés dans une déclaration dite de Nyéléni qui, aussitôt rédigé, a reçu la bénédiction d’environ 600 délégués lors d’un forum consacré au sujet en Février 2007 à Sélingué, village malien situé à 140 km de Bamako.

En résumé, celui-ci implique que « chaque pays puisse nourrir sa population, dans le respect de la nature et des paysans, et sans que le commerce de ses denrées ne provoque de conséquences qui pourraient nuire à d’autres contrées ».

Les partisans de la souveraineté alimentaire militent pour une autre agriculture, axée d’abord sur les besoins des communautés de base et respectant l’environnement et les cultures. Bien qu’objet de critiques de la part de certains groupes y compris au sein du mouvement altermondialiste qui lui reprochent de promouvoir une politique d’autarcie et de fermeture, la campagne pour la souveraineté alimentaire rallie de plus en plus un nombre impressionnant d’acteurs sociaux et de citoyens aux quatre coins du globe.

Au Niger depuis quelques années, un consortium pour le droit à l’alimentation et la souveraineté alimentaire a vu le jour pour prendre en charge cette préoccupation citoyenne dans un contexte national caractérisé par des crises alimentaires récurrentes. Aussitôt constitué, ce consortium composé de cinq organisations de la société civile (ANDDH, Alternative Espaces Citoyens, Aren, Mooriben, Timidria) a mis en branle une vaste panoplie d’initiatives pour atteindre les objectifs qu’il s’est fixé dont celui de contribuer d’ici 2015 à rendre effectif le droit à l’alimentation, à travers des politiques et des lois garantissant la souveraineté alimentaire.

Appuyé par Oxfam Novib, le programme d’actions de ce consortium comprend plusieurs volets attestant de la diversité des thématiques d’intervention des acteurs qui le constitue. Il s’agit d’activités de plaidoyer, d’enquêtes de terrain, de sensibilisation -communication du public, de formation des acteurs (organisations paysannes, médias) d’assistance et de suivi des actions humanitaires en situation d’urgence. Le plaidoyer du consortium cible les décideurs (membres de l’exécutif, élus) car leur rôle est crucial pour la mise en œuvre des politiques et mesures devant garantir un accès équitable aux ressources stratégiques pour une agriculture nourricière : terre, eau, financement...

Depuis sa constitution, le consortium a abattu un travail énorme de réflexion, de sensibilisation de l’opinion publique et de mobilisation, et de formulations de propositions alternatives aux logiques néolibérales. En 2007, il a conduit un projet de soutien aux ménages vulnérables à l’insécurité alimentaire dans 226 villages et campements répartis dans cinq départements de la région de Tillabéry. En dépit des difficultés rencontrées, l’évaluation externe indique que le projet a reçu un satisfécit des bénéficiaires et des autorités locales.

« Nous avons tant attendu les vivres a prix modéré de lEtat, mais jusquici nous n`avons rien reçu. Heureusement que vos associations ont pensé à aider nos populations sinon c’est la catastrophe ! Nous remercions vos associations et votre partenaire OXFAM Novib » indique le document du bilan de la phase pilote.

Au chapitre des activités, il faut citer l’organisation d’une série d’ ateliers de formation des membres du Consortium, des responsables des OP et des animateurs des médias communautaires en vue de renforcer leurs capacités à conduire ou à s’impliquer dans des actions de plaidoyer en faveur du droit à l’alimentation. Le consortium a réalisé une multitude d’émissions radiophoniques dans trois langues diffusées dans les radios communautaires, de bulletins spéciaux et un manuel sur le DA et la Souveraineté alimenatire. Toujours dans le domaine de la communication, plusieurs films documentaires de bonne facture ont été réalisés par l’unité de production audiovisuelle de Alternative. Le consortium compte également à son actif la célébration annuelle de la JMA marquée par des conférences publiques et l’organisation de diners sociaux au profit des enfants des ménages et écoles des quartiers défavorisés.

C’est sur la base des résultats obtenus, que le consortium a décidé d’élaborer un programme de plaidoyer sur le droit à l’alimentation et à la citoyenneté au Niger et dans la sous région. Celui-ci a été exécuté avec des organisations du Mali et du Burkina Faso qui ont présenté le fruit de leurs expériences lors du forum social africain organisé à Niamey en 2008.

Fort des acquis engrangés, le consortium s’est doté d’un plan stratégique pour la période 2010-2015. Ce plan a été établi lors d’un atelier d’autoévaluation de la phase pilote du programme régional de plaidoyer.

Conscient que son défi majeur est de donner un contenu opérationnel au concept de Souveraineté alimentaire et de lui trouver une traduction effective dans les politiques nationales, le consortium a rédigé une proposition de loi-cadre sur le droit à l’alimentation qui a fait l’objet d’un partage avec le public lors d’une table ronde organisée à l’occasion de la JMA 2009.

L’organisation du forum thématique de Niamey sur le droit à l’alimentation et la souveraineté alimentaire qui a clos ses travaux dans l’après midi du 18 octobre est à inscrire dans le registre des réalisations du consortium qui n’entend pas s’arrêter à mi chemin.

H B Tcherno

Source : http://www.alternativeniger.org