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Sénégal : Téléphonie mobile, Miracle ou mirage ?

D 22 novembre 2011     H 04:39     A Olivier Sagna     C 0 messages


En ce mois de juillet 2011 où l’actualité a été largement nourrie par les rebondissements de l’affaire DSK, la guerre d’agression contre la Libye, le 93ème anniversaire de Nelson Mandela, le feuilleton de la dette grecque, la famine en Afrique de l’Est ou encore l’abyssal déficit budgétaire américain, la célébration du vingtième anniversaire de la première communication téléphonique émise sur un réseau téléphonique de type GSM par le Premier ministre finlandais, Harri Holkeri, le 1er juillet 1991, est passé pratiquement inaperçue.

Au Sénégal, la téléphonie mobile fêtera bientôt le quinzième anniversaire de son introduction suite au lancement du réseau GSM Alizé par la Sonatel en septembre 1996. A l’époque peu nombreux étaient ceux auraient prédit que la téléphonie mobile connaitrait le succès qui est le sien aujourd’hui. Ainsi, l’Union internationale des télécommunications (UIT) prédisait-elle, dans une étude publiée en 1998, que le seuil des 30 000 d’abonnés ne serait pas atteint avant l’an 2000. En fait, l’engouement pour ce nouveau moyen de communication fut tel que non seulement la barre des 200 000 abonnés fut franchie lors du changement de millénaire mais que par ailleurs le nombre d’abonnés à la téléphonie mobile dépassa par la même occasion celui des abonnés à la téléphonie fixe pourtant introduite dans le pays depuis 1901.

Il faut dire que l’annonce de l’arrivée de Sentel sur le marché avec une formule prépayée, en avril 1999, obligea Alizé à investir ce créneau qu’il avait négligé dans un premier temps. L’introduction de la formule prépayée eut pour conséquence une explosion du nombre d’abonnés et de service réservé à une élite, la téléphonie mobile devint un service de consommation courante. La croissance du marché prit alors des proportions impressionnantes avec un million d’abonnés en 2004, trois millions en 2006, quatre millions en 2007 entre les opérateurs et l’on vit le nombre d’abonnés passer à six millions cette même année puis à plus de sept millions en 2010.

En ce milieu d’année 2011, le seuil des 9 millions d’abonnés est en passe d’être atteint pour une population avoisinant les 13 millions d’habitants soit un taux de pénétration dépassant les 70%. Avec le passage au standard GPRS, puis à l’EDGE et tout dernièrement à la 3G, les réseaux de téléphonie mobile ont multiplié les services offerts à leurs abonnés ajoutant à la voix, les SMS, les MMS et aujourd’hui le transfert de données avec l’Internet mobile. Les taux de couverture du territoire comme de la population ont fortement progressé et il reste peu de zones blanches dans lesquelles aucun réseau ne peut être capté.

L’accroissement phénoménal du nombre d’abonnés a été rendu possible grâce à la conjonction de différents facteurs tels la baisse du prix des terminaux, la baisse du prix de vente des cartes SIM, la baisse du prix des télécommunications mais également la multiplication des promotions offrant des bonus de 50%, voire de100%, sur les recharges de crédit téléphoniques. A cela il faut ajouter toute une série d’innovations telles la baisse de la valeur faciale des cartes de recharge téléphoniques, l’achat de crédit au micro-détail, l’échange de crédit voire l’emprunt de crédit !

Enfin, il faut signaler que le transfert d’argent par mobile a été lancé par La Poste avec son produit Poste One et qu’il a été étendu au paiement par mobile par Orange avec Money Transfer et la Société générale de banques au Sénégal (SGBS)avec Yoban’tel. Malgré les nombreux progrès enregistrés, les problèmes ne manquent cependant pas dans le secteur. Depuis une décennie l’Etat est en contentieux avec Tigo quant au montant de sa licence, la couverture des zones rurales laisse encore à désirer, la qualité de service n’est pas toujours au rendez-vous, la 3G est loin d’être disponible partout, le niveau de la concurrence reste faible du fait notamment de la non-portabilité des numéros, en dehors des applications à caractère ludique (téléchargement de sonneries et de logos, jeux, connexion au réseaux sociaux, etc.), les services permettant de régler des problèmes pratiques sont quasi inexistants et ce quel que soit le secteur d’activité dans lequel on se place.

Cela étant, la bonne nouvelle est qu’il existe bon nombre de jeunes Sénégalais qui s’attèlent au développement d’applications mobiles et il faut espérer qu’un certain nombre d’entre eux seront capables de créer les applications qui demain feront fureur au Sénégal, en Afrique et pourquoi pas dans le monde. Enfin, on ne peut faire l’impasse sur le fait que le marché est dominé par des multinationales étrangères à l’Afrique…

* Olivier Sagna est secrétaire général de l’Observatoire des Systèmes d’Information et des Inforoutes au Sénégal (Osiris)

Source : http://pambazuka.org