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L’incandescence du peuple togolais

D 2 juillet 2010     H 13:14     A Mathieu Cichocki     C 0 messages


Le soutien financier de l’Union européenne octroyé au
gouvernement sortant du Togo pour l’organisation de
l’élection présidentielle du 4 mars 2010 et la violence armée
par le biais de la Force Sécurité Election Présidentielle 2010
(FOSEP) se sont révélés être un levier répressif aux mains du
pouvoir sortant. Les Togolais-e-s ont rencontré de multiples
obstacles pour faire émerger la vérité des urnes et le choix
véritable qu’exprimait leur suffrage. Tout sauf Faure Gnassingbé !

Une situation politique intenable au Togo

L’impossibilité technique de vérifier les bulletins de vote et donc
de confirmer les résultats et les irrégularités graves en matière
électorale telles que constatées par la mission d’observation
électorale de l’UE devraient conduire à une invalidation immédiate
du scrutin. Une page s’est tournée aussi au niveau de l’opposition
togolaise en la personne de Gylchrist Olympio, leader
charismatique contre le régime Gnassingbé qui assassina le
premier président élu togolais, Sylvanus Olympio, père de
Gylchrist. En effet, que penser de son choix de se défausser lors du
dépôt de sa candidature à l’élection pour un accident imaginaire ?
Et celui de ne pas reconnaître la candidature de Jean-Pierre
Fabre du même parti que lui ? De recevoir, chez lui à Paris, une
délégation du pouvoir pour négocier unilatéralement en
catimini ? De trainer des pieds lors des actions populaires
organisés par le FRAC (front républicain pour l’alternance et le
changement), jusqu’à ce fameux jour où, rejoignant le meeting
sur la plage de Lomé escorté par la police, il sera lynché par la
population furieuse des signes de trahison du « Fils du Père » ?!
Mais malgré « l’abandon » du plus connu des opposants, la
contestation populaire est de grande envergure dans la capitale
sous formes de marches pacifiques, de veillées, de prières
spirituelles. Si ce n’étaient les intimidations et les actes de
malveillance des forces de police financées par la France et l’UE,
cette contestation populaire aurait déjà gagné toutes les villes
de l’intérieur du pays.

Les « métastases » de la résistance

Depuis le mois de mars 2010, l’opposition togolaise a
réalisée « l’union sacrée » autour du candidat Jean-Pierre
Fabre. Dans la diaspora, de multiples « filiales » de « l’Ablodé »(1) agissent également (grève de la faim en Pologne, rencontres de
députés européens à Bruxelles, manifestions devant la Maison
Blanche et les locaux de l’ONU, etc.). Ces « métastases » de la
lutte sont les conséquences de l’abandon par la communauté
internationale de ce peuple qui a décidé de passer outre les
multiples adoubements « collabos » et d’engager la lutte.
Car les schémas proposés par les pays bailleurs de fonds
comme « l’évolution palliative vers la démocratie » ne sont plus
tolérés par les populations qui croupissent depuis des années dans
l’indignité « d’un plat/jour » et du chômage trans-générationnel. Le
risque le plus évident est que pour les prochaines élections
législatives il n’y ait plus personne pour aller voter et que le taux
d’abstention dépasse tous les records. Comme en Thaïlande, au
Kirghizstan, en Grèce en ce moment où ce sont les tenant-e-s
du pouvoir « mafieux » qui pillent les deniers du peuple la
population togolaise n’a pas d’autre choix pour sortir de la
misère entretenue que de se révolter en s’unissant.

Les perspectives de l’espérance populaire

Suite à la prestation de serment du 3 mai, la dictature
togolaise pensait que « le soufflé » de contestation allait
retomber, que les principaux opposants allaient quémander des
postes dans le nouveau gouvernement « d’Union nationale ».
C’est oublié de prendre en compte la détérioration du tissu
social et économique du pays qui se retrouve dernier dans ce
domaine dans la région, au bout de 5 ans de pouvoir du jeune
dictateur, après avoir assassiné plus de 500 compatriotes,
blessé, amputé, handicapé, violé et exilés encore à ce jour des
dizaines de milliers ! Chaque famille togolaise a en son sein une
martyre de la dictature de la famille Gnassingbé. Alors se pose
cette question cruciale : comment un peuple peut-il voter à plus
de 60% pour son bourreau ? Il faut aussi rappeler que le pari
de Faure Gnassingbé, qui avait affirmé qu’il allait organiser des
élections transparentes, qui ne prêtent d’aucunes discussions
dans ses résultats comme au Ghana, au Sénégal, est
totalement perdu !

Enfin, en cette année du cinquantenaire de l’indépendance
du Togo, les compteurs de la mémoire collective populaire se
sont remis à zéro, dans la majorité des esprits des résistants, la
lutte pour la 2ème indépendance ne fait que commencer !

Mathieu Cichocki


(1) « Indépendance », en langue ewé