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Mauritanie : Marche de l’opposition, un Plébiscite

D 23 mars 2012     H 12:27     A     C 0 messages


La Coordination de l’Opposition Démocratique (C.O.D) a réussi son pari. La journée du 12 mars était, indéniablement, un plébiscite. Cette journée-là, à Nouakchott, appartient, désormais à l’opposition démocratique. On dirait une mobilisation, prélude à un jour de scrutin présidentiel, des plus décisifs. Pourtant, aucune échéance ne profile à l’horizon. Toutes les échéances électorales sont, d’ailleurs, remises à la Saint-Glinglin, par le pouvoir, en place, depuis, au moins août 2008.

Exactement, le 06 de ce mois, où Mohamed Ould Abdel Aziz délogea le premier président, démocratiquement élu, Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi. ‘’Un mouvement de rectification’’ jurèrent, alors, le général et ses hommes. ‘’Un holdup’’, tout simplement, martèle, lundi dernier, un revenant de taille, Ely Ould Mohamed Vall, au cours de l’imposant meeting, couronnant la plus grande marche, véritable démonstration de force organisée par l’opposition démocratique. L’implication de l’ancien président du Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie (C.M .J.D), transition démocratique 2005-2007, Ely Ould Mohamed Vall, dans cette manifestation a apporté du tonus à la sortie de la C.O.D. Il était le premier à intervenir après le président en exercice. Intervention, toute politique. Un message adressé, d’abord, à l’Armée, et en son nom : ‘’Ce qui s’est passé, le 06 août 2008, n’était pas un coup d’Etat, mais une rébellion, dit-il, perpétrée par un homme.’’ L’armée n’était pas concernée, par cette opération, surenchérit, l’homme, qui apparaissait, ce lundi, comme le porte-parole, s’appropriant, paternellement, au passage, ‘’le mot de pour le dire’’ de la grande muette. ‘’ ‘’L’institution présidentielle est, depuis lors, illégitime ; tout comme le sont, d’ailleurs, devenus les organes législatifs, qui légifèrent, aujourd’hui, en dehors de toute légalité, lance Ely Ould Mohamed Vall. ‘‘ Le message le plus significatif a été orienté, explicitement, vers les partenaires au développement, les chancelleries et missions diplomatiques, accrédités à Nouakchott, auxquels Ely a adressé une mise en garde contre la signature de conventions avec un régime illégitime et qui en aucun ne saurait engager le peuple mauritanien. Qui a la faculté de dénoncer tout contrat signé avec le gouvernement actuel et approuvé par un Parlement illégal.

A leur tour, les leaders de l’opposition se sont félicités du succès de cette marche qu’ils ont considéré comme le véritable début de…Ahmed Ould Daddah, Bedredine, Jemil, Alassane…..

La marche du 12 mars avait un nom : ‘’Irhal Aziz !’’Dégage Aziz ! L’intitulé revenait, en refrain, sur la bouche, scandé par plusieurs dizaines de milliers de manifestants. Soixante mille personnes, estiment certaines sources, plus, disent d’autres, un peu moins, modèrent d’autres. C’est ce nom qui a fait le succès de la marche. ‘’Ce n’est plus l’affaire exclusive de la C.O.D, mais l’histoire de faire dégager un dictateur, lâche un manifestant.’’ ‘’ Aziz doit déguerpir, là, maintenant, on en a marre de ses mensonges et facéties qui n’échappent, aujourd’hui, plus à personne, marmonne une jeune militante de nulle part. ‘’ ‘’ Je n’appartiens à aucun parti, aucune tribu, aucune ethnie, ma patrie est la colère, la misère qui s’expriment, en ce moment, et qui ne vont s’arrêter qu’après le départ du général, profère-t-elle.’’

La panique ‘’généreuse’’

Toute cette colère, qui s’est exprimée à Nouakchott, ce 12 mars, Mohamed Ould Abdel Aziz l’avait, peut-être, perçue, sur le tard un peu, à deux ou trois jours, avant la manifestation. Toute la République, tous les départements étatiques, tous les cadres et fonctionnaires ont été mobilisés pour faire échouer la manifestation de l’opposition. De réunions dans les mosquées, à des réunions dans les administrations, en passant par la convocation de rassemblements dans les quartiers, on alternait carottes et bâtons, poissons et poisons, promotions et destitutions. Les populations étaient très sensibles aux offrandes circonstancielles du régime. Mais, elles étaient tout aussi sensibles au mot d’ordre de l’opposition. Pas question de refuser le poisson. Il n’est pas antinomique à révolution. On mange son poisson et on lui fait la révolution. C’était un peu le résultat de la panique ‘’généreuse’’ du régime d’Ould Abdel Aziz. Il a été vaincu deux jours avant la manifestation. Le soir, la veille de la marche de l’opposition, au carrefour Bana Blanc, un homme, tout enturbanné, distribuait un texte, signé par un pseudo qui pourfendait l’opposition et déconseillait la participation à la marche.

Le régime a été défait avant même le jour ‘’J’’. Le jour ‘’ J’’ étant passé, arrivera-t-il, cependant, à titrer les conclusions de cette sortie on ne peut plus démonstrative de sa contre performance et du niveau de mécontentement dont il est le principal producteur. Tout dépend de la lecture qu’il se fera des événements. Les yeux des observateurs sont d’ores et déjà rivés vers la capitale économique où le président de la République devrait tenir, hier en fin de journée, un meeting pour lequel une mobilisation tous azimuts a commencée depuis un mois ou presque. S’évertuera-t-il, au cours de sa sortie, à ignorer, sinon, sous-estimer, sa disgrâce grandissante au sein de l’opinion, en s’auto-congratulant d’une majorité ‘’éternelle’’, pour reprendre l’expression d’une mauvaise langue de l’opposition ?

L’opposition a réussi son pari. C’est vrai. Mais est-ce suffisant de faire marcher des milliers de personnes dans les artères de la capitale politique et par de-là réussir un coup inespéré ? Une guerre s’emporte-t-elle par une seule bataille ? L’opposition, elle aussi, ne saurait s’émanciper de l’effort de la lecture. Elle a gagné une bataille. Et après ? Parviendra-t-elle à entretenir sa victoire, la consolider afin qu’elle puisse la conduire vers des lendemains meilleurs ? Où ira-t-elle dormir sur ses lauriers en restant sur l’euphorie née d’une sortie spectaculaire ? Tout dépend d’elle aussi. De sa capacité à se départir de l’euphorie d’une journée qui marque, c’est vrai, pour elle, un sacre exaltant ? Ou arrivera-t-elle comme l’a exprimé Ely Ould Mohamed vall à bâtir, à refonder, un mouvement citoyen qui ne lâchera prise avant d’aboutir à dessein ?

AVT

biladi

Source : http://fr.ufpweb.org/