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Cameroun : AES CORPORATION A REUSSI LE HOLD-UP DU SIECLE AVEC LA COMPLICITE DU GOUVERNEMENT !

D 29 novembre 2013     H 06:12     A RESEAU ASSOCIATIF DES CONSOMMATEURS DE L’ENERGIE     C 0 messages


Depuis le 08 novembre 2013, l’annonce par la firme Américaine AES Corporation de la cession de l’intégralité de ses parts dans toutes ses filiales camerounaises ne cesse d’inspirer les chroniques médiatiques et d’alimenter les débats sous les chaumières au Cameroun. Si à l’évidence, aucun consommateur et au-delà, aucun Camerounais, ne regrette le départ des Américains, en revanche, ce tour de passe-passe actionnarial inédit suscite plusieurs interrogations au sein de la communauté consumériste nationale.

En effet, pendant que le groupe AES jubile de ce qu’elle appelle pompeusement : « … un exemple de partenariat public-privé réussi… », les consommateurs d’électricité et l’ensemble des citoyens camerounais ont le sentiment d’avoir été bernés et floués pendant plus de 12 ans.

Comment peut-il en être autrement lorsqu’on sait que le 18 juillet 2001, à l’issue d’un processus de privatisation bâclé et entaché de nombreuses irrégularités, AES Corporation avait acquis la défunte SONEL pour 35 milliards de FCFA et qu’aujourd’hui, le groupe affirme triomphalement l’avoir cédé à plus de 110 milliards de FCFA ? C’est-à-dire plus de 03 fois son prix d’achat. Rappelons en outre qu’au moment de la reprise de l’ancienne SONEL, le groupe AES était en quasi-faillite aux Etats-Unis et n’avait pu relever la tête – en moins de 05 ans – que grâce aux milliards de FCFA pompés au Cameroun et rapatriés à Arlington à travers des montages comptables frauduleux.

Comment ne pas établir la complicité active des pouvoirs publics dans cette fumisterie, lorsque, malgré les dysfonctionnements endémiques du réseau de distribution de l’électricité et le mépris permanent des clauses du contrat de concession, l’Etat a continué à cautionner, sans aucune condition préalable, le programme d’investissement du groupe américain évalué à ce jour à plus de 500 milliards de FCFA et volontairement orienté vers des sources de production « d’appoint » (c’est-à-dire les centrales thermiques) ? Pourtant notre pays regorge d’immenses ressources hydrauliques pour d’éventuelles infrastructures hydroélectriques. Comment comprendre qu’en en 12 ans de soi-disant « partenariat stratégique » avec AES/SONEL, en dépit des délestages quotidiens et des récriminations des organisations de défense des consommateurs, l’ARSEL, avec l’aval du Ministère de l’Eau et de l’Energie, aie autorisé pas moins de 06 augmentations du prix du kWh au Cameroun, le faisant passé de 58,15 FCFA en moyenne avant la privatisation à presque 100 FCFA aujourd’hui (plus exactement 99 FCFA), soit une hausse de 72% ?

Pourquoi l’Etat n’a-t-il pas profité de cette singulière occasion pour exiger la restitution des 5% des parts d’actions destinées au personnel salarié, prévues par le contrat de concession et confisquées depuis par AES Corporation ? Pourquoi, deux (02) ans après l’adoption controversée et la promulgation de la nouvelle loi N°2011/022 du 14 décembre 2011 régissant le secteur de l’électricité, l’article 23 de ce texte législatif qui prévoit la création d’une entité publique GRT (Gestionnaire du réseau transport), n’a-t-il pas encore été mis en œuvre ? Alors que tout le monde sait qu’à termes, ce GRT pourrait déboucher sur la nécessaire reprise en main du secteur par la puissance publique.

En tout cas, pour les consommateurs, la plus-value record engrangée par AES Corporation est symptomatique de la faiblesse et de la démission de l’Etat. Elle n’est nullement le fait des performances managériales du groupe AES comme il le prétend, mais bel et bien la résultante d’une vaste escroquerie, le hold-up du siècle opéré sous le regard bienveillant et complice du gouvernement de la République.

Comme nous l’avons déjà dit par ailleurs, si AES Corporation a réussi à transformer sa filiale camerounaise en une véritable « start-up » au point d’en faire un produit boursier et la revendre aujourd’hui à prix d’or, c’est essentiellement grâce aux consommateurs (ménages et entreprises) qui, malgré les désagréments récurrents et l’inflation du tarif de l’électricité, paient depuis le 18 juillet 2001, le très lucratif retour sur investissement de cette entreprise.

Devant le constat affligeant de l’incapacité des pouvoirs publics à garantir le respect de leurs intérêts et d’ici la fin du contrat de concession (qui arrive à échéance en 2021), le RACE invite les consommateurs à refuser de continuer à être considérer comme des « vaches à lait » uniquement bon à se faire traire. En d’autres termes, après avoir enrichi les fonds de pensions Américains – actionnaires d’AES Corporation – pendant plus de 12 ans, refusons de renflouer le fond d’investissement privé britannique ACTIS durant les 08 prochaines années, sans une juste contrepartie. Bref, quelle que soit la dénomination du fournisseur d’électricité, nous devons continuer, avec plus de détermination que jamais, à faire valoir notre droit légitime à une énergie électrique de qualité à un prix abordable.

L’accès à l’énergie est un droit essentiel et inaliénable !

Fait à Douala, le 11 novembre 2013

Pour le Bureau Exécutif du RACE

Aimée Florence TITCHO, Vice-Présidente

Jean Baudelaire BELENGUE, Secrétaire général adjoint

Pierre JEANVELA, membre du Bureau