ALIMENTATION : Réduire la faim, soutenir les femmes agricultrices
3 avril 2012 05:38 0 messages
TILLABÉRI/KIGALI/JOHANNESBURG - Le thème retenu par les Nations Unies pour la Journée internationale de la femme - « Autonomiser les femmes rurales - En finir avec la faim et la pauvreté » n’a probablement pas grande signification pour des personnes comme Hani Issa, une femme qui vit dans la région rurale du sud-ouest du Niger et essaye de nourrir ses sept petits-enfants seule.
Il y a six mois, lorsque la sécheresse a frappé, les hommes valides de sa famille élargie (des fermiers) sont partis vers la ville la plus proche et lui ont laissé la charge de nourrir ceux qui restaient. Les hommes lui envoient rarement de l’argent, ce qui l’oblige à marcher plusieurs kilomètres chaque jour pour essayer de trouver des feuilles et des fruits sauvages pour nourrir sa famille. Certains jours, elle mendie.
Tout comme Issa, des centaines de milliers de personnes rurales pauvres à travers le monde ressentent les effets de conditions climatiques de plus en plus imprévisibles.
Lors d’une conférence sur le climat, qui a été organisée récemment dans la capitale rwandaise de Kigali, des travailleurs humanitaires et des spécialistes des catastrophes ont évoqué la probabilité de voir la sécheresse revenir dans la Corne de l’Afrique et la question de l’autonomisation des femmes comme Issa. Des intervenants ont relaté l’expérience de femmes et d’enfants abandonnés à leur sort après une sécheresse ou des inondations au Rwanda, au Kenya, en Ouganda et en Éthiopie.
Et si une femme comme Issa disposait d’une parcelle de terrain ou de bétail, ou bénéficiait d’un accès au crédit ? Et si on lui enseignait un savoir-faire qui lui permette de gagner sa vie ? Et si elle avait des connaissances dans le domaine de l’irrigation au-goutte-à-goutte - pourrait-elle utiliser l’eau qui provient du puits de son village pour cultiver des légumes ? Voici quelques-unes des questions abordées lors de cette conférence.
Uma Lele, une ancienne conseillère supérieure auprès de la Banque mondiale qui doit participer à la Conférence internationale sur les femmes dans l’agriculture [ http://www.gcwa.in/GCWAFinal.pdf ] (en Inde du 13 au 15 mars), indique que ces questions ont été évoquées à de maintes reprises. « Les hommes migrent des zones rurales et laissent les femmes s’occuper des fermes et des foyers pendant de nombreuses années ».
Regain d’intérêt
Ces dernières années, on a constaté un regain d’intérêt pour les femmes rurales et le rôle qu’elles jouent dans l’agriculture. Cela s’explique par le regain d’attention pour l’agriculture - provoqué par deux crises alimentaires ; des sécheresses liées au changement climatique, qui ont obligé les hommes à chercher de nouveaux moyens de subsistance loin de chez eux ; au VIH/SIDA, qui a frappé la main d’ouvre agricole, particulièrement dans le sud de l’Afrique ; et l’importance croissante accordée à la nutrition et à la qualité de l’alimentation.
Des études réalisées récemment par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et la Banque mondiale ont également mis en lumière le rôle clé que jouent les femmes dans l’agriculture.
Les femmes représentent 43 pour cent de la main d’ouvre agricole dans les pays en développement, a indiqué le rapport annuel 2010-2011 de la FAO [ http://www.fao.org/docrep/013/i2050f/i2050f00.pdf ] . « Dans certains pays, elle [la proportion de femmes dans l’agriculture] atteint 70 pour cent, voire 80 pour cent », a dit Mme Lele.
Le rapport de la FAO a montré que si les femmes disposaient du même accès aux intrants agricoles que les hommes, elles pourraient augmenter les rendements de 20 à 30 pour cent, et accroître la production agricole des pays en développement de 2,5 à 4 pour cent, et éventuellement réduire le nombre de gens qui souffrent de la faim dans le monde de 12 à 17 pour cent.
La réduction des inégalités entre les sexes en termes d’accès aux intrants agricoles permettrait à 100 ou 150 millions de personnes de sortir de la pauvreté, a indiqué la FAO.
Nouveau rapport
Un nouveau rapport de l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI),qui s’intitule Engendering Agricultural Research, Development and Extension [ http://www.ifpri.org/sites/default/files/publications/rr176.pdf ] et qui constituera l’un des principaux sujets lors de la conférence organisée en Inde la semaine prochaine, se prononce en faveur d’une agriculture plus respectueuse de l’égalité entre les hommes et les femmes.
Le développement de jardins potagers devrait recevoir la même attention de la part des responsables politiques que les activités dominées par les hommes, comme les cultures de rente, indique le rapport, qui promeut un concept élargi du secteur alimentaire - pour inclure les aliments de base, mais également le poisson, le bétail, les potagers, la valeur nutritionnelle des aliments et l’utilisation de l’eau.
Soulignant la corrélation entre les niveaux d’inégalité élevés entre les sexes et la faim dans certains pays, le rapport a préconisé l’octroi de microcrédits, le développement des compétences et la formation, ainsi que des possibilités de propriété des terres et du bétail pour les femmes agricultrices. Il a appelé à accroître l’investissement dans les femmes scientifiques agricoles, qui seraient plus sensibles aux besoins des femmes dans l’agriculture ; il a également indiqué qu’il faudrait apporter davantage d’attention à la transformation des aliments - entre autres choses afin de réduire les pertes alimentaires, de préserver les éléments nutritifs des aliments, de garantir la sécurité alimentaire, de réduire les tâches pénibles et de donner aux femmes le temps d’accomplir d’autres activités.
Mais la meilleure manière d’autonomiser les femmes rurales est de leur offrir une éducation et de leur donner la parole. « Si on leur donne les outils nécessaires, les femmes peuvent s’en sortir », a dit Mme Lele.
Source : http://www.irinnews.org
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