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Burkina Faso : Ne pas se tromper d’adversaire !

De la réquisition du militant anti-impérialiste Rasmané Zinaba !

D 8 janvier 2024     H 05:30     A Gérard Amado Kaboré     C 0 messages


Nous vous proposons ci-dessous le portrait d’un militant réquisitionné pour aller au front. Une dizaine d’autres l’ont été en même temps que lui, d’origines politiques ou associatives très diverses. Nous avons choisi Zinaba parce que plusieurs membres de l’équipe du site le connaissent personnellement, dont l’auteur de cet article, Gérard, et le côtoient depuis longtemps. Il est l’exemple même de militant intègre, patriote et engagé. Sa page facebook est d’ailleurs particulièrement suivie. Faire son portrait c’est démontrer que, s’en prendre à lui, et à bien d’autres, et tenter de les faire taire, c’est se tromper d’adversaire.

Bruno Jaffré

Le Burkina Faso, pays des hommes intègres ou de Thomas Sankara, vit depuis plus de sept ans sous le coup d’attaques terroristes. Ce phénomène a créé une méfiance entre gouvernants et gouvernés et a conduit à un coup d’État le 24 janvier 2022 sur le président Roch Marc Christian Kaboré.

Le lieutenant-Colonel Paul Henri Sandaogo Damiba avait, en son temps, avec des officiers de son rang, justifié le coup de force du fait de la situation sécuritaire.

Huit mois après, un autre groupe de militaires, le MPSR2 (mouvement pour la sauvegarde et la restauration), conduit par le capitaine Ibrahim Traoré, opère un nouveau coup d’État tout en le justifiant par une déviation de leur agenda politique.

Le MPSR2 se positionne comme le salut tant recherché pour mettre fin à la détérioration de la situation sécuritaire. Le peuple dans sa majorité ne sachant à quel saint se vouer n’a que ses yeux pour pleurer et observer.

Des mesures ont été prises pour, en trois mois, régler des problèmes de logistique pour enfin empêcher la banalisation de vie humaine. C’était le credo du capitaine et la population a chanté le Gloria à son honneur.

Des recrutements massifs au sein des FDS (Forces de Défense et de Sécurité) ainsi que le recrutement des VDP (Volontaires pour la Défense de la Patrie) seront mis en place pour pouvoir restaurer le territoire national.

Le dimanche 05 novembre 2023, Bassirou Badjo, membre du Balai citoyen, BAMA Yacouba Ladji, Journaliste, DIALLO Daouda, Président du CISC, KORBEOGO Gabin, Président de l’ODJ, LINGANI Issaka, Journaliste, OUEDRAOGO Ablassé, Président du parti Le Faso Autrement et, ZINABA Rasmane, membre du Balai citoyen, ont reçu des appels téléphoniques les informant qu’ils sont réquisitionnés pour aller au front.

Zinaba Rasmane, un jeune de 37 ans, est chargé de mobilisation du mouvement le Balai Citoyen, un mouvement qui a participé activement à l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Il est venu, aux premières heures, retirer sa réquisition. Il faut aller au front. Ce front qui est un lieu de gloire car le combat est bien rude mais il s’agit de défendre sa patrie.

Né en Côte d’Ivoire de parents burkinabè, il y fait ses études primaire et le secondaire. Après cela, il tombe au pays de Thomas Sankara et dépose sa valise au campus de Zogona, l’Université Joseph Ki-Zerbo. Là-bas, il décide d’étudier la philosophie. Il faut comprendre l’homme pour mieux le servir et la philosophie, qui est ce discours rationnel et critique portant principalement sur les problèmes humains fondamentaux, va permettre au petit Socrate de mieux orienter son action.

Dans une société où l’homme est loup pour l’homme, dans un État où le fort traumatise le faible, dans un univers où l’inconscience combat la morale, dans un pays où la violence et l’injustice font la loi, Zinaba Rasmane s’est mis en route, sur les traces de la vérité afin d’atteindre la justice.

Zinaba Rasmane a toujours mené la lutte pour la bonne gouvernance au Burkina Faso. Lorsqu’on parcourt ses publications sur Facebook, cet activiste du Balai Citoyen à visage découvert a fustigé l’impérialisme sur toutes ces formes.

Il a pris position contre les bases étrangères, surtout françaises, au Burkina Faso, au Mali et même au Niger tout récemment.

Il fait partie des premiers sur les réseaux sociaux à écrire pour soutenir les FDS. Ses publications pour donner de la force à l’armée dans le but de relever le moral de la troupe sont très nombreuses. Les soi-disant “patriotes” du moment ne l’ont jamais égalé dans son engagement.

Membre influent du Balai Citoyen depuis sa création avec ses camarades de lutte comme Samsk Le Jah, Smockey, Eric Kinda, Basic Soul, et autres, il a participé activement à l’insurrection populaire de 2014. C’est cette même insurrection populaire qui a permis à ces jeunes capitaines d’être au pouvoir aujourd’hui.

Militant de la première heure de sa génération, il a participé en février 2011, à Dakar, au forum social de Dakar 2011 notamment aux activités organisées par SURVIE, le CADTM (Comité pour l’annulation de la dette du tiers monde) et ATTAC Afrique.

Orateur, il a l’art de convaincre par la force de l’argument (voir ci-dessous une vidéo où Zinaba rend hommage à Thomas Sankara). Il a participé à l’organisation d’activités d’éveil de conscience comme “10 mn pour convaincre” initié par Semfilm depuis 2009v, une maison de production engagée au Burkina, initiatrice notamment du festival Ciné droit libre qui se déporte dans les pays de la région.

Altermondialiste, il est dans la lutte contre les OGM, le franc CFA, et toutes les injustices sociales de l’impérialisme dominant.

La décision de réquisition se fonde sur l’article 5 du décret n° 2022- 0976/PRES/TRANS/MDAC/MATDS/MJDHRI/MEEA du 14 novembre 2022 portant organisation, attribution et fonctionnement du COTN.

Zinaba Rasmane, comme certains de ses camarades, avait répondu à l’appel de la nation et s’était enrôlé comme VDP national. En aucune fois, il n’a été appelé pour rejoindre ses frères sur le théâtre des opérations.

Ces réquisitions font couler beaucoup d’encres et de salives dans l’opinion nationale et internationale.

Plusieurs organisations et mouvements avaient fait des déclarations pour condamner ses réquisitions-sanctions. On peut citer entre autres, l’ODJ (Organisation Démocratique de la Jeunesse), le Balai Citoyen, le Centre national de presse Norbert Zongo, le CDAIP ( Comité de Défense et d’approfondissement des Acquis de l’insurrection Populaire), le MBDHP (Mouvement Burkinabè des Droits de l’Homme et des Peuples), le Collectif – CGT-B, ( Confédération Générale du Travail du Burkina) , du Ren-Lac( Réseau national de lutte anti -Corruption), le Manifeste des intellectuels, l’ANEB ( Association Nationale des Étudiants Burkinabè), le Mouvement SENS (servir et non se servir), le SYNAMUB (Syndicat National des Artistes Musiciens Burkinabè), le CISC (Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés), etc.

En dehors des protestations des organisations et mouvement épris de justice, un Collectif d’avocats, dont maître Guy Hervé Kam, Maître Prospère Farama, s’est constitué pour défendre les réquisitionnés.

Le collectif d’avocats persiste et signe que les “ORDRES DE REQUISITION”, signés par le Commandant du Commandement des Opérations du Théâtre National( COTN), comportent des illégalités.

Le 20 novembre, le Tribunal Administratif s’était déclaré incompétent pour annuler les réquisitions car s’agissant de sécurité nationale.

Le 6 décembre 2023, le juge des référés du Tribunal Administratif a ordonné la suspension des réquisitions contre Issaka Lingani, Bassirou Badjo et Zinaba Rasmane et au Commandement des Opérations du Théâtre National (COTN) de mettre fin à leur déploiement.

Zinaba Rasmane et les autres réquisitionnés ont attaqué la procédure en justice en demandant purement et simplement leurs annulations.

Par acte signé le 06 septembre 2023, le Commandant du Commandement des Opérations du Théâtre National (COTN) avait déjà réquisitionné le Dr LOURE Arouna, médecin, anesthésiste-réanimateur pour un mois. Sa réquisition vient d’être prolongée de 2 mois. D’autres personnes critiques envers le MPSR2, dont le Dr Daouda Diallo, Secrétaire général du Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés, ont été enlevées et conduites de force sur le terrain de bataille.

Il ne s’agit en réalité que de faire taire des militants qui ont gardé leur liberté de parole et émettent des critiques sur les méthodes employées aujourd’hui, appelant à créer l’unité du pays plutôt que de créer des divisions, en fustigeant et menaçant les militants pourtant reconnus pour leur participation contre le régime de Blaise Compaoré.

Source : https://www.thomassankara.net/