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Niger – Après nous, le désert...

D 3 décembre 2009     H 16:19     A Isabel Ferreira     C 0 messages


C’est le 4 mai 2009, jour où Areva et les autorités
nigériennes inaugurent l’exploitation uranifère d’Imouraren,
que le président Tandja annonce la tenue d’un référendum
sous l’oeil bienveillant et complice de Mme Anne Lauvergeon
(présidente d’Areva) et de Mr Joyandet (secrétaire d’Etat chargé
de la Coopération et de la Francophonie). C’est que la fin de
l’année 2009 sonne le glas du deuxième mandat de cet ancien
colonel de l’armée nigérienne et que selon la Constitution encore
en vigueur il y a trois mois, ce dernier ne pouvait se représenter.
Qu’à cela ne tienne. Mamadou Tandja a décidé de rester, qui
pourrait l’en empêcher ?

Le processus de coup d’Etat constitutionnel débute donc par
la tenue d’un référendum le 4 août 2009 qui lui permettra de
changer la constitution en s’octroyant d’abord une extension
exceptionnelle de son actuel mandat de 3 ans (jusqu’en 2012)
puis la possibilité par la suite de se représenter à sa propre
succession. La Cour Constitutionnelle et l’Assemblée Nationale
s’opposant à ce processus de violation de la Constitution, le
président du Niger décide de dissoudre purement et simplement
l’une et l’autre, créant ainsi un chaos total en détruisant toutes
les institutions nigériennes. C’est dans ce climat de déviance
dictatoriale que Mamadou Tandja organisera des élections
législatives le 20 octobre dernier entérinant ainsi son passage en
force, son installation durable au pouvoir et sa mainmise totale et
dangereuse sur le pays.

Face à cet état de fait, il faut souligner le rassemblement et la
résistance des partis d’opposition, des intersyndicales, de la
société civile et la presse privée unis en coalitions diverses des
formes démocratiques. Des mouvements comme la Fusad (Front
Uni pour la Sauvegarde des Acquis Démocratiques) restent très
actifs dans le pays et considèrent que la nouvelle constitution est
illégale et illégitime et se réfèrent donc toujours à la Vème
République en ayant refusé de participer aux législatives du 20
octobre dernier.

Côté international, la seule voix claire a été celle de la Cedeao
(Commission Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest)
suspendant le Niger de toutes les instances de l’organisation
sous-régionale. Au contraire, et comme l’on pouvait s’y attendre,
la France, face à ses énormes intérêts économiques dans le pays,
garde une ambiguïté sinon un silence coupable dans cette
nouvelle démonstration de l’ « Ami-Dictateur ». La Françafrique
bat son plein et place forcément la France dans une
attitude conciliante. En effet, depuis 45 ans, la France exploite et
importe elle-même le précieux uranium extrait des sols nigériens
dans la plus totale et scandaleuse opacité tant sur les questions
économiques, sociales qu’environnementales. Grâce au dernier
contrat minier signé par Areva (société française) dans le site
d’Imouraren (mine à ciel ouvert), le Niger devient le second
producteur mondial et perd définitivement toute souveraineté sur
l’exploitation de son uranium.

Au-delà des considérations économiques et du prix du minerai
souvent bradé aux multinationales, Areva est entre autre accusée
de participer activement à l’appauvrissement et à la
désertification de la région. Le comportement prédateur du
minier est responsable de l’assèchement de la nappe phréatique,
de la pollution et contamination de l’eau rejetée et par là même
de la disparition de l’économie pastorale et des nomades de toute
la région. Ce que l’on nomme ici « énergie propre » est en train
de détruire et d’anéantir à tout jamais des régions entières de
l’Afrique en accélérant leurs désertifications irréversibles et
sacrifiant au passage les populations vivant sur place et n’ayant
aucunes retombées ni bénéfices des contrats juteux passés entre
les multinationales et l’avidité de leur gouvernement.
C’est dans cette connivence argent-pouvoir que se déroulent
le pillage et la saignée de l’Afrique. Les hommes forts des pays du
sud ont encore de beaux jours devant eux, en tout cas tant que
leurs sols pourront intéresser le nord. Le processus de
normalisation des coups d’état est en marche, le processus de
normalisation du silence de l’occident les entérine. A quand un
nouveau massacre d’une population qui se soulève ? A quand
l’arrêt de la politique impérialiste et néo-colonialiste de la France
en Afrique ? Pour l’instant : après nous, le désert.