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Mouvement féministe en Afrique : ’’Nous revenons de loin’’

D 8 mai 2012     H 05:17     A     C 0 messages


"La vie des femmes en Afrique s’est considérablement améliorée." Il existe encore de nombreux domaines dans lesquels l’égalité des sexes n’est pas acquise, comme le droit à l’enseignement, au travail et à la propriété. "Mais il y a de l’espoir", estime Liesl Gerntholtz, directeur des droits de la femme à Human Rights Watch.

Liesl Gerntholtz, avocate de profession, est une spécialiste des droits de la femme en Afrique. Elle a pleinement confiance dans le dynamisme du mouvement féministe sur le continent. Elle est également convaincue que les problèmes des femmes en Afrique ne sont pas uniques en leur genre. "Elles se trouvent devant les mêmes défis que les femmes dans le reste du monde. Mais les problèmes en Afrique sont plus prononcés, étant donné que les droits humains et la pauvreté s’enchevêtrent. L’Afrique est probablement le continent le plus pauvre et les femmes y sont disproportionnellement touchées par la pauvreté.

Propriété

D’innombrables causes sont à l’origine de cette répartition inégale, poursuit Liesl Gerntholtz, qui cite notamment la discrimination dans le droit à la propriété et les conséquences du VIH/sida.

"Dans de nombreux pays africains, la femme n’a pas le droit à la propriété. Elle ne peut pas non plus hériter de biens. Dans des pays comme le Kenya, le Zimbabwe, la Zambie, le Botswana, le Lesotho, le Malawi, la Namibie et l’Afrique du Sud, où beaucoup de gens sont atteints du VIH et du sida, les hommes meurent plus tôt que les femmes. Et il arrive souvent que la femme soit alors dépossédée de ses biens à la mort de son mari. La belle-famille s’empare de la maison, de la terre et des meubles. La femme et les enfants restent totalement démunis. Elle n’a aucun avenir vu qu’elle ne peut pas obtenir de prêt ni acheter une terre. Elle a également du mal à trouver un emploi."

Dans divers pays d’Afrique australe et d’Afrique de l’est, des lois ont été promulguées ces dix dernières années pour améliorer le droit de propriété de la femme, constate Liesl Gerntholtz. Malheureusement, les autorités ne veillent pas toujours au respect de ces lois.

Enseignement

Les problèmes que rencontrent les femmes en Afrique s’expliquent aussi par l’inégalité économique. "L’indépendance économique est pour les femmes l’une de leurs priorités. C’est un cliché de dire qu’un pays n’est pas à même de s’élever au-dessus de la pauvreté. Surtout pas quand la moitié de la population ne peut participer à l’activité économique." L’accès à l’enseignement et aux emplois pour les femmes peut stimuler cette indépendance économique.

Dans le domaine de l’enseignement justement, l’Afrique enregistre de nombreux progrès : le nombre de filles à aller à l’école ne cesse d’augmenter. Mais la qualité de l’enseignement laisse encore souvent à désirer et les filles n’ont généralement pas accès à l’enseignement secondaire. "Elles quittent l’école pour se marier ou parce qu’elles tombent enceintes ou bien encore parce qu’on attend d’elles qu’elles s’occupent du ménage. Souvent aussi les filles sont gardées à la maison pour des raisons financières, les parents ne pouvant pas toujours payer les frais de scolarité."
Néanmoins, l’enseignement évolue dans la bonne direction. Mais il faut aussi que les femmes puissent acquérir les capacités qui leur permettent de se présenter sur le marché du travail. Or, cela n’arrive pas encore assez souvent, selon Liesl Gerntholtz.

Subordonnées

En résumé, le grand problème est que les femmes ne sont toujours pas considérées comme des égales. Elles restent subordonnées aux hommes. Et Liesl Gerntholtz de citer l’approche de la mortalité maternelle. "Nous savons depuis longtemps quelles mesures sont nécessaires pour réduire considérablement la mortalité maternelle, dit-elle. Ce ne sont pas des mesures qui sont très chères et que les pays pauvres ne peuvent pas se permettre. Il y a tout simplement un manque de volonté politique. Il ne s’agit en fait que de femmes enceintes qui meurent. Cela en dit surtout long sur la façon dont la société dans son ensemble considère les femmes. "

Femmes dirigeantes

D’un autre côté, l’Afrique connaît une forte tradition féminine. "Le travail des militantes pour les droits des femmes commence à porter ses fruits. Regardez la nouvelle procureure générale de la Cour pénale internationale : une Gambienne. Il y a au Malawi et au Liberia deux femmes à la présidence. De plus, l’Afrique connaît le plus grande nombre de députées femmes du monde. Tous ces changements découlent en grande partie du mouvement féministe, un mouvement fort qui stimule ces progrès."

"Il est bon de ne pas s’arrêter uniquement sur ce qui doit encore se produire, estime Liesl Gerntholtz. Il faut aussi parfois regarder dans le passé et constater que nous revenons de loin."

Source : http://www.rnw.nl