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Les expulsions forcées au Zimbabwe privent des milliers d’enfants d’accès à l’éducation

D 22 octobre 2011     H 04:37     A Amnesty International     C 0 messages


Le gouvernement du Zimbabwe doit veiller à ce que les enfants vivant dans les zones d’habitation qu’il a créées pour reloger les personnes qui se sont retrouvées sans domicile à la suite de son programme d’expulsions forcées massives il y a six ans puissent aller à l’école, a souligné Amnesty International dans un rapport publié mercredi 5 octobre.

Ce document, intitulé Left behind : The impact of Zimbabwe’s mass forced evictions on the right to education, montre que des milliers d’enfants et d’adolescents forcés à quitter leur domicile au cours de l’opération Murambatsvina ont très peu de chances de pouvoir être scolarisés comme il se doit.

« Ces villages créés par l’État étaient censés offrir une meilleure vie aux victimes d’expulsions forcées, a déclaré Michelle Kagari, directrice adjointe du programme Afrique d’Amnesty International.

« Au lieu de cela, elles se sont retrouvées dans une situation encore plus précaire, tandis que la privation d’éducation laisse les jeunes sans réelle perspective de se sortir de l’indigence permanente.

« Le fait que le gouvernement ait chassé des personnes de lieux où elles avaient accès à l’éducation et qu’il ne leur ait ensuite pas fourni d’éducation a porté un coup très grave à la vie et aux rêves de milliers d’enfants.

Le gouvernement a justifié son programme d’expulsions massives de 2005, l’opération Murambatsvina, en faisant valoir que les habitants concernés vivaient dans des conditions déplorables.

Il a mis sur pied un programme d’attributions de logement baptisé « Opération Garikai » (Une vie meilleure) en vue de reloger plusieurs milliers de personnes parmi les 700 000 victimes du programme d’expulsions, leur promettant un meilleur accès aux services.

Des milliers d’enfants et d’adolescents ont été contraints à quitter leur établissement scolaire ; dans certains cas, des écoles ont même été démolies dans le cadre du programme d’expulsion.

De nombreuses familles se sont retrouvées dans le dénuement car leur logement et leurs sources de revenus, comme par exemple des marchés et de petits commerces, ont été détruits au cours des expulsions forcées, si bien qu’elles ne pouvaient plus payer les frais de scolarité, les uniformes et les fournitures.

Six ans après, la plupart de celles qui se sont vu attribuer un terrain ou un logement dans le cadre de l’opération Garikai vivent dans des cabanes en plastique ou d’autres structures mal construites, sans accès aux axes routiers, aux transports publics et à l’emploi.

De nombreux jeunes ont indiqué à Amnesty International que, à la suite des expulsions, ils avaient été contraints de trouver du travail pour aider à nourrir leur famille.

Dans une zone d’habitation appelée Hatcliffe Extension, des enfants de seulement 13 ans cherchent un emploi dans le bâtiment aux alentours pour gagner leur vie. Beaucoup de jeunes femmes ont expliqué que, quand elles se sont retrouvées dans l’incapacité de poursuivre leur scolarité, elles ont décidé de se marier.

Irene, 21 ans, qui vit à Hopley et s’est mariée en 2007 à l’âge de 17 ans, a raconté à Amnesty International :

« J’ai décidé de me marier pour que quelqu’un puisse subvenir à mes besoins. Je ne pouvais pas trouver d’emploi. Je ne voulais pas me livrer à la prostitution comme la plupart des filles qui ont abandonné l’école. »

Dans certains villages, tels que Hopley et Hatcliffe Extension, des associations et des personnes ont créé des écoles non enregistrées pour assurer l’éducation des enfants. Cependant, la qualité de l’enseignement y est médiocre à cause du manque d’enseignants qualifiés, de meubles et de fournitures, ainsi que de l’absence de supervision du ministère de l’Éducation.

Fatima, une jeune femme habitant à Hopley, a déclaré :

« Même si nous envoyons les enfants à l’école locale, je reste préoccupée par la qualité de l’enseignement. On n’y apprend presque rien. Il n’y a pas de livres ni d’enseignants qualifiés. Nous ne faisons qu’envoyer les enfants passer le temps car nous n’avons vraiment pas d’autre solution. »

Amnesty International a également constaté que les enfants fréquentant des écoles élémentaires non enregistrées dans le village de Hopley risquaient de ne pas pouvoir passer d’examens car l’autorité chargée de l’organisation des examens scolaires ne reconnaît pas les établissements de ce type comme centres d’examen. Les enfants qui ne passent pas l’examen à la fin de leur cursus élémentaire ne peuvent pas s’inscrire dans l’enseignement secondaire et finissent pas abandonner l’école.

« Il est consternant qu’un gouvernement puisse en toute impunité rendre la vie plus difficile pour ses citoyens les plus pauvres et vulnérables. Les autorités zimbabwéennes doivent immédiatement employer toutes les ressources dont elles disposent pour adopter et mettre en œuvre une stratégie nationale d’éducation qui garantisse l’accès de tous les enfants à l’enseignement élémentaire gratuit », a ajouté Michelle Kagari.

Amnesty International