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Burkina Faso : Communiqué officiel de la société civile gabonaise

D 4 novembre 2014     H 12:29     A Ça suffit comme ça !, LE FRONT DES INDIGNES     C 0 messages


Le 30 octobre 2014, le Burkina Faso, patrie du capitaine Thomas Sankara, tournait une triste page de son histoire. Une page qui fut une longue parenthèse de 27 ans après l’assassinat de l’espoir que suscitait celui qui changea le nom de Haute-Volta en Burkina Faso, « patrie des hommes intègres ».

Blaise Compaoré a quitté le pouvoir comme il l’a conquis : par la petite porte. C’est le lieu de rendre un vibrant hommage au peuple burkinabé, et particulièrement aux forces vives de cette nation constituée de la société civile consciente et agissante, de l’opposition civile et responsable et de l’armée républicaine, pour avoir mis un terme au régime dictatorial et faussement démocratique de Blaise Compaoré, désormais réfugié à Yamoussokro, en Côte d’Ivoire.

L’Afrique toute entière, et notamment francophone, observe avec un grand intérêt l’exemple venu de la patrie des hommes intègres. Cette leçon de démocratie populaire est servie à tous les peuples africains qui n’entendent plus cautionner le tripatouillage des constitutions devant garantir la pérennité du pouvoir à des hommes, des familles ou des clans qui considèrent la République comme leur bien privé.

Au Gabon, pays frère, la société civile, en toutes ses composantes, salue le courage et la détermination du peuple burkinabé qui a su prendre son destin en main en refusant de céder aux dérives constitutionnelles qui consacraient l’aveuglement politique d’un homme resté sourd à la volonté populaire et niant avec le plus grand mépris la souveraineté du peuple. Les Gabonais, via les médias locaux et internationaux, ont vécu heure après heure les évènements survenus dans la République soeur du Burkina Faso. Le non respect de la loi fondamentale par le Président Blaise Comparé qui entendait la modifier à sa convenance est à l’origine du rapport de forces dont le dernier acte s’est joué le 30 octobre 2014. La constitution gabonaise, depuis le consensus de 1991 survenu à la fin de la conférence nationale, a fait l’objet de multiples modifications qui ont expurgé à chaque fois l’esprit démocratique qui fut accepté à l’unanimité par les participants de ces assises politiques. L’élection présidentielle, dans la constitution de mars 1991, se faisait au scrutin uninominal à deux tours afin de dégager une majorité populaire qui assurerait au président élu la légitimité nécessaire pour conduire les rênes de la nation. Une modification constitutionnelle a ramené à un seul tour ce mode de scrutin permettant à un président qui ne dispose pas de la majorité absolue de diriger le pays avec une minorité. Le mandat présidentiel, selon la constitution de mars 1991, avait une durée fixée à cinq ans renouvelable une seule fois afin de permettre l’alternance politique et surtout le renouvellement de l’élite, gage d’une vigueur démocratique dans un État qui sortait d’un monolithisme politique trentenaire. Une autre modification constitutionnelle a remis le mandat à sept ans comme lors du parti unique. Et comme pour couronner le caractère monarchique du Gabon, le mandat septennal est renouvelable à souhait. Toutes ces modifications constitutionnelles, apportées par petites doses successives et qui furent l’oeuvre d’Omar Bongo, ont ôté à notre loi fondamentale tout esprit démocratique et souverain. Des rouages ont été fabriqués pour que le pouvoir soit à jamais confisqué par une caste minoritaire qui ne respecte pas la souveraineté populaire et entend faire valoir ses seuls intérêts égoïstes.

Arrivé au pouvoir, de manière frauduleuse en octobre 2009, Ali Bongo s’est attaché dès l’année suivante, en décembre 2010, à modifier également la constitution en conservant les amendements liberticides de son successeur, mais surtout en renforçant significativement les pouvoirs présidentiels, en réduisant la liberté d’expression de la presse et du peuple, en interdisant les marches populaires ou les manifestations pacifiques et en empêchant toute opposition politique à son régime d’exister et de s’organiser. La loi fondamentale gabonaise du 12 janvier 2011 est une ode à la monarchie. Elle n’offre aucun espace à l’expression de la souveraineté du peuple gabonais. Elle est a-démocratique et doit être changée avant les prochaines échéances présidentielles de 2016.

Les instruments juridiques qui concourent à l’expression démocratique et populaire, comme le code électoral, le découpage électoral, le fichier électoral, la biométrie, … empruntent la même réalité : la monarchisation du Gabon. Quant aux institutions républicaines comme la CENAP (Commission Électorale Nationale et Permanente), le ministère de l’Intérieur, les gouvernorats, les préfectures et la cour constitutionnelle, elles ont à leur tête des personnes qui ont fait allégeance au système PDG et n’envisageront jamais de voir ce parti battu et quitter le pouvoir. Ces mécanismes qui garantissent l’expression souveraine du peuple doivent être revus pour que triomphe la démocratie dans notre pays.

La constitution gabonaise, de même que tous les instruments juridiques et institutionnels qui fondent une république démocratique doivent faire l’objet d’une révision générale dans un cadre souverain et inclusif où le pouvoir, l’opposition et la société civile sont appelés à travailler ensemble pour l’intérêt supérieur de la nation. Vouloir maintenir le Gabon, à deux ans de la prochaine échéance présidentielle, dans un carcan constitutionnel qui nie toute souveraineté au peuple, c’est préparer inéluctablement le terreau d’une violence qui s’exprimera car aucune autre alternative démocratique n’aura été proposée aux Gabonais.

Fort de ce qui précède, la société civile, en toutes ses composantes, prend à témoin le peuple gabonais, la communauté nationale et internationale, en exigeant que le pouvoir gabonais, dans les meilleurs délais :
 1. mette en oeuvre ce cadre inclusif et souverain d’assises nationales ;
 2. consent à faire réviser la constitution gabonaise et les mécanismes institutionnels de souveraineté ;
 3. s’engage à réaliser les prochaines échéances présidentielles selon le calendrier qui sera arrêté par les recommandations des assises nationales.

En l’absence de toute réaction sérieuse du pouvoir gabonais, la société civile, en toutes ses composantes, prendra ses responsabilités devant l’histoire.

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Marc ONA ESSANGUI Prix Goldman Secrétaire Exécutif de Brainforest

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Mme Blanche SIMMONY ABEGHE Présidente

Fait à Libreville, le 03 novembre 2014.