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De Ben Ali à Compaoré : les élites françaises contre les peuples

D 31 octobre 2014     H 14:08     A Survie     C 0 messages


Alors que le régime de Blaise Compaoré vacille sous la pression de
centaines de milliers de burkinabè, la classe politique française ne se
départit toujours pas clairement du soutien qu’elle apporte depuis 27
ans à l’autocrate. La France semble même tenter de s’opposer à un départ
précipité de Compaoré revendiqué par le peuple du Burkina Faso.

On ne trouvera pas cette fois de Michèle Alliot-Marie pour proposer au
régime de Compaoré le "/savoir-faire de nos forces de sécurité/", comme
elle l’avait fait en janvier 2011 à propos de la Tunisie de Ben Ali : la
coopération militaire et policière avec le Burkina est déjà en place
depuis bien longtemps [1
<http://survie.org/francafrique/burk...> ].
Les manifestants tués à Ouagadougou l’ont été par des forces qui ont
déjà pu bénéficier de la formation et de l’équipement français.

C’est au regard de ce soutien historique qu’il faut lire les appels de
la diplomatie française « /à toutes les parties de faire preuve de
retenue / ». Nombreuses sont les voix françaises qui appellent les
manifestants, mis sur le même plan que les policiers et militaires, au
calme et dénoncent indistinctement "/les violences/", renvoyant ainsi
dos à dos l’explosion populaire et la répression d’un régime
dictatorial [2
<http://survie.org/francafrique/burk...> ].

Surtout, on trouve encore des voix pour défendre Compaoré et le bilan
dont il aurait à se glorifier. Tel Claude Bartolone, qui aux dernières
heures du règne de Ben Ali tentait de rappeller les progrès que le
dictateur aurait apporté à la Tunisie, le socialiste François Loncle, au
micro de plusieurs chaînes, tente encore de vendre l’image d’un Compaoré
faiseur de paix et médiateur dans les crises régionales [3
<http://survie.org/francafrique/burk...> ].
Ce député, président du groupe d’amitié parlementaire France-Burkina
Faso, répète sur RFI ou BFMTV que faire pression pour le départ de
Compaoré correspondrait aux ingérences de la Françafrique, en même temps
qu’il défend fermement l’idée que le président burkinabè doit se
maintenir au pouvoir jusqu’à l’échéance de son mandat, contre l’avis
massif et manifeste du peuple de ce pays.

Lui emboîtant le pas, Laurent Fabius, déclarait que « /nous n’avons pas
à faire ou à défaire un gouvernement. Ce que nous souhaitons, nous les
Français, c’est que nos ressortissants soient protégés et que l’on aille
vers l’apaisement/ ». Mais ce que souhaite le peuple burkinabè, au cri
de "/Compaoré, dégage !/", c’est clairement le départ d’un dictateur
soutenu depuis toujours par la France. Plus inquiétant, le chef de la
diplomatie française a indiqué avoir « /demandé à notre ambassadeur sur
place d’être un facilitateur de cette solution d’apaisement/ ». Ainsi,
plusieurs témoignages font état de rencontres avec les différents
protagonistes (armée, opposition) où l’ambassadeur français aurait
poussé à l’acceptation du plan de transition proposé par Blaise Compaoré.

*Cette pression par la diplomatie française s’oppose clairement à la
revendication de démission immédiate de Compaoré formulée par les
manifestant-e-s. L’association Survie conteste fermement le droit de
l’ambassade de France à s’immiscer dans les décisions des opposants et
du peuple burkinabè, et demande à l’exécutif français de rappeler ses
coopérants militaires en poste au sein des forces burkinabè.*

[1
<http://survie.org/francafrique/burk...> ]
Outre la dizaine de coopérants militaires français présents détachés
dans les forces nationales, les cadres de la gendarmerie burkinabè sont
par exemple coutumiers de programmes de formation de l’Ecole des
Officiers de la Gendarmerie Nationale française
<http://www.gendarmerie.interieur.go...>

[2
<http://survie.org/francafrique/burk...> ]
Au lieu de condamner les manifestations, la classe politique française,
qui avait unanimement rendu hommage à Nelson Mandela en décembre
dernier, devrait se souvenir de ses propos : « /C’est toujours
l’oppresseur, non l’opprimé qui détermine la forme de lutte. Si
l’oppresseur utilise la violence, l’opprimé n’aura pas d’autre choix que
de répondre par la violence/ »

[3
<http://survie.org/francafrique/burk...> ]
Oubliant son soutien à des bélligérants de conflits sanglants au
Libéria, Sierra Leone, Angola, Côte d’Ivoire ou Mali.

— 
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