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La Côte d’Ivoire en guerre

D 16 juin 2009     H 21:06     A Moulay     C 0 messages


Le conflit ivoirien n’est pas seulement un conflit ivoiroivoirien
mais bien un conflit régional. En effet, les
conséquences de cette crise dépassent largement les
frontières de la seule Côte d’Ivoire, d’abord à cause du pouvoir
économique de ce pays dans la sous-région, ensuite parce que de
nombreux « étrangers » de la sous-région (Burkina Faso, Mali,
Sénégal…) y vivent depuis des lustres. Depuis le 19 septembre
2002, date de la tentative de prise de pouvoir par des rebelles, la
Côte-d’Ivoire est coupée en deux. Le Nord est contrôlé par les
Forces Nouvelles et le Sud par les Forces Loyalistes.

Dès l’indépendance en août 1960, le Parti Démocratique de
Côte-d’Ivoire, PDCI, et son leader, Félix Houphouët-Boigny,
placent le pays sur les rails de la croissance en appliquant une
politique donnant, certes, un rôle central à l’Etat mais aussi aux
investissements privés et aux capitaux étrangers. Les
transformations positives pour l’économie, la santé, ainsi que
l’éducation sont alors spectaculaires et le niveau de vie des
Ivoiriens s’en trouve fortement amélioré. D’environ 4 millions en
1960, la population augmente et atteint 12 millions d’habitants en
1980. Cette augmentation est certes due à l’amélioration des
conditions de vie mais aussi à l’immigration. De nombreux
Maliens, Burkinabé et Sénégalais s’installent dans le pays en
quête d’une vie meilleure. Ils vont largement contribuer au
développement de la Côte-d’Ivoire. D’ailleurs, Félix Houphouët-
Boigny encourage ces migrations et la Côte d’Ivoire est reconnue
dans la sous-région comme un pays ouvert, tolérant et
chaleureux. Mais à partir de 1980, l’économie stagne à cause de
la détérioration des termes de l’échange.
À la mort de Félix Houphouët-Boigny, Henry Konan Bédié du
PDCI remporte les élections de 1995 mais celles-ci sont
largement boycottées par l’opposition. Contrairement à son
prédécesseur, Bédié commence à poser un
concept nouveau, l’ivoirité, qui finit par
gangrener tout le pays. Ce concept flou, mis
au départ en exergue pour affirmer une
identité ivoirienne reposant sur l’ethnicité,
devint finalement un moyen d’empêcher le
principal opposant Alassane Ouatara, du
Rassemblement des Républicains de Côted’Ivoire
(RDR) d’accéder à la présidence en
mettant en doute sa nationalité ivoirienne.
Notons seulement que Ouatara a été le
Premier Ministre de Félix Houphouët-Boigny.
Konan Bédié est renversé en 1999 par des
soldats mécontents qui placent à leur tête le général Robert Gueï
qui tente de s’imposer par la force aux élections d’octobre 2000
mais est contraint de reculer à cause des manifestations de rue.
La cour suprême déclare alors Laurent Gbagbo, leader du
principal parti d’opposition le Front Populaire Ivoirien (FPI),
président de la République. Ce dernier, socialiste, décide pourtant
de renouer avec le vieux concept d’ivoirité et tient un langage
double et assez trouble. Il met cependant en place un
gouvernement d’union nationale.
Le 19 septembre 2002 marque une nouvelle étape dans le
conflit. Des militaires partis du Burkina Faso s’emparent de
plusieurs villes du Nord (Bouaké et Khorogho) mais sont mis en
échec à Abidjan. Et depuis, malgré plusieurs tentatives de
médiation africaines et française, c’est le statut quo, chaque
camp gardant ses positions. Le principal leader des forces
nouvelles (qui contrôlent plus de 50% du territoire), Guillaume
Soro, est alors nommé Premier Ministre après les accords de
Ouagadougou.

Au Burkina Faso, le pouvoir en place profite de la situation
pour créer une union nationale autour du président burkinabé
Blaise Compaoré, arrivé lui-même au pouvoir par un coup d’Etat
militaire, le 15 octobre 1987. Son règne est aujourd’hui troublé
par l’assassinat du journaliste Norbert Zongo, dont le pouvoir
n’arrive pas à se défaire. Ainsi, l’instrumentalisation du conflit
ivoirien par le régime de Campaoré est un véritable « coup
politique » et prouve que ce dernier est un fin politicien. Soutenu
par la France, il a su tirer les ficelles comme un véritable
marionnettiste pour rester au pouvoir depuis plus de 22 ans,
devenant même un poids lourd de la sous-région, capable de
déstabiliser les pays voisins. Le rôle du Burkina Faso dans les
conflits libériens et ivoiriens est connu de tous, mais le bon élève
du FMI et de la Banque mondiale a les reins solides. Tant que
l’économie va, tout va… même si on est plutôt proche d’un « Etat
voyou ».

La Côte-d’Ivoire doit sortir de la crise
qu’elle traverse, c’est nécessaire. Ce pays
a su pendant de nombreuses années
accueillir ses voisins à bras ouverts.
Comment en quelques années a-elle pu
changer à ce point ? Un proverbe africain
dit que le bois a beau séjourner dans
l’eau, cela n’en fait pas un crocodile.
Espérons seulement que le bois ivoirien
noyé dans la mare politicienne retrouve sa
véritable nature et ne devienne jamais un
crocodile. Espérons que la Côte-d’Ivoire
retrouve sa véritable nature, celle d’un
peuple de tolérance, d’ouverture et celle d’un peuple de
travailleurs.

Moulzo