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Négociation entre Niger et AREVA

D 7 novembre 2013     H 05:55     A Réseau des Organisations pour la Transparence et l’Analyse Budgétaire (Niger)     C 0 messages


Depuis quelques semaines, le Niger et la firme AREVA ont entamé des négociations en vue du
renouvellement des conventions minières de la Société des Mines de l’Aïr (SOMAIR) et de la
Compagnie Minière d’Akouta (COMINAK), toutes les deux, filiales d’AREVA.

Ces négociations se déroulent à un tournant décisif de l’histoire de notre pays. Elles revêtent un
intérêt capital pour le Niger, avec la dénonciation officielle du déséquilibre de ces contrats par le
Gouvernement et les acteurs de la société civile ; l’objectif ultime étant de rééquilibrer
l’exploitation uranifère au bénéficie du Niger et de son peuple, comme le stipule l’article 148 de la
Constitution du 25 novembre 2010.

En effet, en plus de quarante (40) ans d’exploitation de l’uranium par AREVA, continuité de la
COGEMA (Compagnie Générale des Matières Nucléaires), il est unanimement admis que cette
activité n’a véritablement profité qu’à l’exploitant, l’Etat nigérien ne se contentant que des
royalties insignifiantes tandis que les populations riveraines des sites miniers croulent sous le poids
de la pauvreté, tout en subissant les effets néfastes de la radiation.

A titre illustratif, selon le Rapport ITIE (Initiative pour la Transparence des Industries Extractives) de
Décembre 2012 portant sur les revenus miniers de 2010, les produits miniers dont principalement
l’uranium représentent 70,8% des exportations du Niger et correspondent à seulement 7,8% du
Produit Intérieur Brut (PIB). A la lumière de ces chiffres, il est évident que l’uranium contribue de
manière dérisoire à la création des richesses au Niger, loin derrière le secteur primaire (agriculture,
élevage, forêt et pêche) qui représente 45,2% du PIB en 2010, selon les chiffres de l’institut
National de la Statistique (INS).

Il est également déplorable que, depuis l’ouverture des négociations pour le renouvellement des
conventions minières de la SOMAIR et de la COMINAK, les discussions se déroulent dans l’opacité
et le secret absolus, en violation de l’article 150 de la loi fondamentale. Aussi curieux que cela
puisse paraître, la seule information qui a filtré est la décision d’AREVA de suspendre sa production
au niveau de la SOMAIR, à partir de fin octobre 2013. Comme pour afficher son mépris vis-à-vis du
Niger, AREVA n’a pas officiellement notifié cette décision au Gouvernement nigérien en premier
lieu ; cette firme ayant préféré d’abord informer ses employés, ses fournisseurs et même ses soustraitants
de l’arrêt imminent de la production, comme si le Niger qui, conformément à l’article 149
de la Constitution de la 7e République, « exerce sa pleine et entière souveraineté sur les ressources
naturelles et du sous-sol », n’a pas son mot à dire. Pourtant, le Niger, en tant qu’actionnaire de la
SOMAÏR ne devrait pas subir ce comportement méprisant.

Le Réseau des Organisations pour la Transparence et l’Analyse Budgétaire s’insurge contre cette
attitude inélégante de AREVA qui s’apparente à du chantage, un comportement qui ne devrait pas
exister dans le cadre d’un partenariat sincère, d’autant plus que cette firme a marqué son adhésion
au processus de l’ITIE qui préconise l’intégrité et la transparence.

Toutefois, une telle attitude ne surprend guère le ROTAB au regard du comportement des
compagnies multinationales vis-à-vis des pays en développement ; AREVA en l’espèce se croit
toujours en territoire conquis au Niger. En réalité, cette posture s’explique dans une large mesure
par la complaisance des autorités politiques à son l’égard, avec notamment la non application des
dispositions du Code minier sanctionnant le retard dans le démarrage de la mine d’Imouraren. Pour
rappel, cette mine devrait être mise en exploitation à partir de 2012. AREVA a réussi le tour de
force de reporter l’échéance en 2016, en gelant de fait un gisement pourtant convoité par d’autres
partenaires. La complaisance et le laxisme des autorités nigériennes confortent AREVA dans un
sentiment hégémonique, au point de se sentir « roi » au Niger.

Au regard de tout ce qui précède, le ROTAB :

1. Dénonce l’opacité qui entoure les négociations en cours, en violation de l’article 150 de la
Constitution du 25 novembre 2010 ;

2. Condamne et regrette la non consultation des organisations de la société civile qui n’ont eu
de cesse de dénoncer les accords léonins qui ont toujours lié le Niger à AREVA ;

3. Dénonce la stratégie de chantage, orchestrée et mise en oeuvre par AREVA ;

4. Demande au Gouvernement de faire respecter les dispositions du Code Minier dans toutes
ses dimensions et ce, au niveau de toutes les conventions dont celles de Imouraren, par la
remise sur le marché international de ce permis ;

5. Rappelle au Gouvernement que le Niger, pays disposant du « Statut conforme à l’ITIE »,
devrait adhérer aux principes de consultation et transparence contractuelles qui forment les
nouveaux standards de ce processus.

6. Réaffirme que « les ressources naturelles et du sous-sol sont la propriété du peuple
nigérien » et que « l’État exerce sa souveraineté sur les ressources naturelles et du soussol »
en vertu des articles 148 et 149 de la Constitution du 25 novembre 2010.

Fait à Niamey, le 30 octobre 2013

Le Coordonnateur Exécutif

Ali Idrissa