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Togo – Des élections de nature à invalider la démocratie

D 4 avril 2010     H 11:50     A Moulay     C 0 messages



Alors que la Commission nationale électorale indépendante
(CENI) déclarait le 6 mars (2 jours après les élections
présidentielles) Faure Gnassingbé réélu avec 60,92% des
voix, les Togolais-e-s avaient espéré que l’Union européenne,
garante de ces élections, allait réagir fermement. Le Collectif de
solidarité avec les luttes sociales et politiques en Afrique, dont
« Afriques en lutte » est membre, appelait dès fin février à réfléchir
sur les possibilités de recours auprès des autorités européennes si
des fraudes massives étaient avérées. En effet, l’Union
européenne, principal financeur de l’élection dans le cadre d’un
« Projet d’appui aux processus électoraux » (PAPE), porte une
grande responsabilité dans l’organisation et la supervision de celleci
mais aussi dans les risques de dérive sécuritaire. C’est également
l’UE qui finance le volet « sécurisation de l’élection », sous-traité
par l’Agence française de développement (AFD). La France, soutien
indéfectible du clan Eyadema depuis plus de 40 ans, est chargée
du volet répression car elle doit former et équiper la FOSEP (Force
Sécurité Election Présidentielle), quasi bras armé du régime en cas
de contestation des élections.

Petit pays tout en longueur de seulement 56 785 km², le Togo
est un pays de l’Afrique de l’ouest, limité à l’est par le Bénin, à
l’ouest par le Ghana, au nord par le Burkina Faso tandis que sa
façade sud est ouverte sur le golfe du Bénin. En 2009, la
population du Togo est estimée à environ 6 millions d’habitant-e-s.
D’abord sous protectorat allemand de 1884 à 1918, le Togo est
ensuite partagé entre l’Angleterre et la France à la fin de la
Première guerre mondiale. La partie est revenant à la France (puis
sous tutelle de l’Onu en 1946) et la partie ouest revenant à
l’Angleterre (avant d’être rattachée au Ghana en 1956).
L’indépendance du Togo est acquise le 27 avril 1960 grâce à
Sylvanius Olympio qui devint premier ministre avant dêtre destitué
lors du coup d’Etat (où il trouve la mort) du 13 janvier 1963. Déjà,
l’ombre d’Eyadéma (père) plane sur ce coup d’Etat, qui porte
pourtant un civil (Nicolas Grunitsky) au pouvoir. Quatre ans plus
tard, un second coup d’Etat porte au pouvoir Gnassingbé Eyadéma,
celui dont on dit qu’il tua de ses propres mains le père de
l’Indépendance togolaise Sylvanius Olympio. Il restera président à
vie ( jusqu’à sa mort le 5 février 2005). Le coup d’Etat électoral du 24
avril 2005 qui porta le fils Eyadéma (déclaré vainqueur des
élections avec 60,22% des voix contre 38,19% pour le candidat de
l’opposition Emmanuel Bob Akitani) au pouvoir fit des centaines de
morts ainsi que des milliers de déplacés. Une coalition de
l’opposition démocratique représentant 6 partis politiques contre le
candidat du RPT, Faure Gnassimbé, garant de la continuité du clan
Eyadéma ne permit pas le changement tant attendu par les
Togolais-e-s qui sortirent groggy de ces élections.
Cinq ans plus tard, on prend les mêmes et on recommence.
L’opposition se regroupe cette fois derrière Jean-Pierre Fabre
(UFC), désigné candidat unique du Front républicain pour le
changement et l’alternance au Togo (UFC, Sursaut TOGO et
OBUTS). Malgré la présence de l’UE qui envoie plus d’une
centaine d’observateurs, les élections du 4 mars (initialement
prévue le 28 février) voient la réélection de Faure Gnassingbé
(60,92% des voix) tandis que Jean Pierre Fabre annonce aussi
sa victoire. Les nombreuses irrégularités pointées par les
observateurs de l’UE « ne sont pas de nature à invalider le
scrutin », formule choc qui ne permet pas de remettre en cause
les résultats du scrutin, ni d’invalider la victoire du clan
Eyadéma. Les Togolais-e-s, qui se sont battu-e-s avec beaucoup
d’espoir en 2005, ne demandent qu’une seule chose : la paix.
C’est ce qui semble ressortir de ce scrutin. La France doit cesser
de soutenir ce régime dictatorial ainsi que tous les autres
régimes dictatoriaux en Afrique. Les Togolais-e-s ont droit à la
démocratie totale et non à une pseudo-démocratie, validée par
des pseudo-observateurs européens, garant de la bonne
gouvernance. Les Africain-e-s doivent se tourner vers le
continent et l’union africaine pour mettre en place un système
valide de contrôle des élections. En effet, les irrégularités qui en
Europe auraient fait scandale ne sont souvent pas de nature à
invalider un scrutin en Afrique. Pour les Européens, l’Afrique doit
se contenter d’une démocratie bananière.

Moulzo