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La Baule, Hollande et l’Afrique

D 7 juillet 2015     H 18:40     A Abdoulaye HASSANE DIALLO     C 0 messages


Vous m’aurez sans doute bien compris. Surtout en ces temps où se déroulent beaucoup d’évènements dans le monde sans qu’aucun continent ne soit épargné ou à l’abri. Parce que, de jour comme de nuit, des fléaux se succèdent à un rythme incroyable si bien que personne ne sait plus où donner de la tête. S’ils ne viennent pas du ciel c’est sur terre que nous les sentons et les subissons avec violence. Quelques fois sans répit.

D’ où le choix du titre de cet article « la BAULE , HOLLANDE ET l’AFRIQUE » Car il nous fixe dans le temps et dans l’espace Enfin , lorsqu’on parcourt ces trois mots et qu’on y réfléchit , on trouvera aisément la relation. D’aucuns me rétorqueront que la Baule , c’est loin, c’est du passé etc…Oui c’est loin mais c’est aussi l’actualité. Puis on dira mais et Hollande qu’est qu’il vient chercher ici ? Cependant au fur et à mesure que je développe mon argument, disons mes arguments j’apporterai ainsi des réponses à ces pertinentes questions.

LE SOMMET DE LA BAULE

La Baule est une ville touristique française non loin de la célèbre et historique Ville de Nantes où sont conservés toutes les archives de l’histoire d’Afrique et tant d’autres documents sur notre Continent , ce Continent noir qui a payé cher , très cher au cours de cette honteuse période de la Traite et de l’Esclavage . Nantes comme je l’appelle est cette Ville Négrière à l’image de la célèbre Ile de Gorée au Sénégal par laquelle sont passés des millions de jeunes Africains, enfants, femmes et hommes où ils étaient vendus au poids pour rejoindre les villes Européennes ou les Antilles puis les Amériques dans les champs de canne à sucre. Quelle horreur ! L’île de Gorée à Dakar au Sénégal est cet endroit où les hommes valides, les femmes et les enfants étaient attachés à des chaines qui elles mêmes étaient fixées dans les murs. Quelle méchanceté ! C’est là que les Hollandais, Portugais avec la complicité de certains Noirs et d’autres acabits , que ces êtres vivants étaient échangés pour des broutouilles. Les marchands Hollandais eux , habitaient avec tout le luxe dans des belles maisons. Quelle honte ! Cependant , les Noirs malmenés, battus, attachés ces « marchandises » passaient par un portail pour être entassées dans des bateaux pour le voyage sans retour. Quelle ignominie ! Hollandais et autres serviles européens se partageaient le butin de leur vente. Ce que le premier conservateur du musée de Gorée Joseph NDIAGNE a qualifié « d’ignoble besogne » J’ai eu la chance et l’honneur de visiter cette ile et ce Musée en 198O. Nantes sera choisie pour abriter donc toutes les archives africaines de ces atrocités.

En Juin 1990, tant dis que la Baule avait servi de cadre pour couvrir le « fameux Sommet » des Chefs d’Etats et de Gouvernements africains sous la houlette du Président Socialiste François MITTERRAND, Nantes à la même période était devenue un lieu symbolique pour le Forum Panafrica qui rassemblait toute la Diaspora et des Délégations progressistes venues d’Afrique . Ce grand rassemblement, cette réunion de famille avait pour ordre du jour de tenir un langage de vérité à ces Dirigeants Africains afin qu’ils élargissent les nombreux prisonniers d’opinions qui croupissaient dans les geôles et de se préparer à accepter l’alternance et la contradiction avec l’organisation d’élections démocratiques , libres, transparentes et pluralistes. IIs ont dénoncé toute la dictature qui muselait les citoyens. Ce Forum a envoyé aux Chefs d’Etats réunis à la Baule , les conclusions de ses travaux. J’y étais personnellement et un certain Alpha CONDE, actuel Chef d’Etat de la Guinée se trouvait dans la salle aux côtés du Doyen le Professeur KAPET de BANA , Jean Paul N’GASSA, Suzanne Kalla Lobé et tant d’autres intellectuels Africains.

A la Baule pendant ce temps, le Président français, un autre François va sermonner les dirigeants Africains en leur intiment de se reconvertir en démocrates sinon « l’aide sera tiède ». En terme clair, cela voulait dire « que si l’on ne changeait pas de fusil d’épaule il ne faudra plus compter sur sa couverture. Celle de la France moralisatrice. La suite , nous la connaissons d’autant plus que le mur de Berlin était tombé, brisant ainsi la glace qui le retenait. Exit le fameux Est - Ouest permettant à ces Chefs d’Etats de choisir leurs partenaires , en fonction de leur sensibilité politique . Selon qu’ils soient progressistes ou non. Parmi les « dirigeants disciplinés » présents à cette rencontre, nous avions noté , le Général Ali SAIBOU Chef d’Etat du Niger à l’époque des faits, qui avait accepté la tenue d’une Conférence Nationale Souveraine. Ayant été obligé d’accéder à cette demande des Etudiants qui malheureusement avaient perdu des Camarades sous les balles de la force publique. Paix à leurs Ames ! Des Etudiants dont la cause a été soutenue par les syndicats et tout le Peuple. Un autre militaire, putschiste, Pierre BUYOYA également Chef d’Etat du Burundi qui avait organisé des élections et avait cédé son fauteuil à un civil élu. Depuis, il continue à servir l’Afrique à l’ Union Africaine où il apporte toute son expertise pour atténuer des conflits qui déchirent nos peuples .

Mais , deux Chefs d’Etat , celui du Tchad Hissène HABRE et celui du Mali le Colonel Moussa TRAORE à l’époque des faits , putschistes avaient haussé les épaules et n’étaient pas contents de cette « leçon de morale » Quelques temps après, ils avaient été contraints d’abandonner le pouvoir. Cela pour la petite histoire. Cependant, l’instabilité politique n’a toujours pas déserté notre continent.

Mais , l’Afrique c’est aussi un lot de fléaux : famines , sécheresses, tremblements de terre, manque des soins, pauvreté, injustices, illettrisme ou analphabétisme , manque d’eau ,coupures d’électricité, canicules, une solidarité biaisée , des passe droits, des corruptions , des privations des libertés que nous ne corrigeons pas ou n’essayons pas d’éradiquer . La liste est aussi longue « qu’un jour sans pain ».
HOLLANDE et l’AFRIQUE

Comme tous ses prédécesseurs Chefs d’Etat de France, le Président François HOLLANDE , tente aussi par sa dernière tournée en Afrique au début de ce mois de Juillet 2015 , d’imprimer sa marque au cours de son mandat, ce premier qui va tirer à sa fin dans quelques mois. II tente de donner un cachet, le sien pour marquer son époque en laissant aussi quelques traces. II avait comme CHIRAC , donné le ton lors de son élection en « disant qu’il tournait la page en rectifiant les rapports entre le Chef blanc et ses collègues d’Afrique. Mais, ce qu’il a chassé par la porte est revenu par une autre porte dérobée. Les habitudes ont la vie dure. Parce qu’on ne peut effacer en une tournée de 24h par un tour de magie plus d’une soixantaine d’années de compagnonnages ou de vie de couple. Le Président français, en faisant cette tournée a sans doute pris actes des réalités de nos pays tant soit peu. II a dû enregistrer les disparités de bonne gouvernance ici ou là Mais, le Continent est beaucoup malade et il faut plus que le concours d’un thérapeute pour guérir ce mal. Une Afrique que nous maltraitons à notre tour. Arrêtons nous dans cette région des Grands Lacs, au Burundi par exemple ou plus loin en Lybie où les populations éjectées de leur repaire pour occuper la rue face à des fusils ou autres canons d’avions ou des chars , se tirent dessus sans savoir ce qui leur arrive. Elles errent sans domicile à la recherche de quoi se nourrir. Quel triste tableau quand on sait qu’il y’ a quelques années au moins pour la Lybie c’était un véritable Eldorado où des citoyens du monde allaient travailler pour construire leurs vies. Ces hommes économisaient d’énormes pactoles qu’ils envoyaient dans leurs pays d’origine. Même si l’on pouvait penser que le Guide KADAFFI était peu fréquentable. Regardons autour de nous dans la région c’est Boko Haram qui tue chaque jour lâchement des pauvres innocents et des jeunes soldats qui perdent leurs vies. En défendant nos territoires. Si l’on pousse plus loin le raisonnement on se heurte à des violences dues aux élections que toutes les parties tiennent à gagner sans perdant. Mais , la sève de la démocratie se trouve dans un combat loyal où il y a un perdant et naturellement un gagnant. D’où une alternance. Sinon, on ne peut parler ni de droit, ni d’indépendance ni de liberté. Or , sans ces facteurs, il ne peut y’ avoir de communauté organisée disons un Etat de Droit. Nous avons aussi ceux qui refusent de céder le pouvoir en inventant des prétextes fallacieux pour continuer à gouverner sans limite comme en monarchie absolue. Là où l’on cherche à construire et à bâtir, les djihadistes : aqmi, mujao, ansardine et leurs dérivés détruisent des vies et des infrastructures dans les villes. Mais, comme l’a écrit notre Doyen le Professeur KI ZERBO dans un livre très pertinent « A QUAND L’AFRIQUE » Cette question n’aura pas de réponse de si tôt tant que nous continuerons à nous chamailler inutilement en refusant de regarder la vérité en face. A continuer à tendre la main pour chercher ailleurs ce que nous possédons chez nous. Comment peut on comprendre que des milliers de jeunes, de femmes et d’enfants puissent quitter chez eux à la recherche du bien - être , le minimum hors du continent pour finir leur parcours dans des calles de bateaux . Si ce n’est au bord des plages ou au fonds des mers .

Mais pour nous résumer on peut dire que la Démocratie n’est pas une panacée et les discours sinon les discours moralisateurs n’ont pas été accompagnés des actions de développement par les différents acteurs et partenaires . En tenant compte des réalités de nos entités respectives , de nos aspirations et de notre culture. Ce ciment qui doit nous unir dans nos contradictions. Les voyages et les visites des Chefs d’Etat occidentaux qu’ils effectuent chez nous ne sont qu’un feu de paille. Et le restera tant que nous Africains, nous ne nous unirons pas autour d’un projet ou des projets de Société avec un objectif pour discuter avant sa mise en œuvre . Nous devons travailler, pour mettre nos compétences et notre savoir faire à la disposition de nos concitoyens. Sinon, les Chefs d’Etats de France ou d’ailleurs auront beau visiter nos pays, ils ne pourront jamais se mettre à notre place. Cette construction est de notre responsabilité, nous peuples d’Afrique.
Mais face à toutes ces dérives que fait l’Union Africaine sensé accompagner les Etats dans leur construction ? Nous avons pour preuve le cas du Soudan un Etat morcelé en trois portions. De l’inédit. Pendant ce temps notre chère Union Africaine est aux abonnés absents. Vers qui alors doit-on se retourner pour trouver des solutions à ces brûlants fléaux ?

Abdoulaye HASSANE DIALLO Dr en Sciences Politiques,
Spécialiste des Questions Africaines, Journaliste, Ecrivain.