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XXVe sommet Afrique-France : un de plus, un de trop

D 29 juillet 2010     H 10:02     A Robin Guébois     C 0 messages


Comme il l’avait annoncé, Sarkozy a tenté de faire de cette
grande messe françafricaine un nouveau symbole de sa
prétendue politique de rupture. Mais derrière les effets
d’affichage, la volonté de domination économique et politique
reste inchangée.

Les débats entre chefs d’Etat étaient organisés autour de trois
questions principales : la place de l’Afrique à l’ONU, le climat et
les questions sécuritaires. L’Union africaine réclame la création au
conseil de sécurité de deux nouveaux membres permanents et de
deux membres non permanents attribués à l’Afrique. La
diplomatie française appuie officiellement cette demande mais se
contente en fait de promettre des « initiatives » en vue de
parvenir à « titre intérimaire » à la création d’un statut de
membre « semi-permanent » sans droit de véto. Concernant le
réchauffement climatique, la déclaration finale formule le voeu
pieux de 100 milliards de dollars que les pays riches devraient
verser chaque année, mais à partir de 2020 seulement, et évoque
« le principe d’une taxe sur les transactions financières
internationales », mais pour le principe seulement, puisque les
seuls mécanismes réellement encouragés relèvent du marché
carbone. Enfin la France a rappelé sa volonté d’être associée à la
formation des futurs soldats africains pour « le maintien de la
paix » : manière hypocrite de poursuivre sa politique d’influence
sur les armées africaines, de promouvoir son matériel et de
légitimer le maintien de sa présence militaire.

Voici du moins pour les conclusions publiques, puisque
l’ensemble de ces débats a été mené à huis clos, de même que
les discussions économiques, même les plus anodines en
apparence, auxquelles étaient conviées les principaux patrons
français et quelques entreprises africaines. Ceci constituait en
effet la véritable nouveauté de ce sommet dédié au business.
Face à l’accroissement de la concurrence internationale en
Afrique, la France entend conserver ses positions dans le « pré
carré » francophone et s’implanter plus fortement dans le reste
du continent, qui n’est vu que comme un gigantesque réservoir
de matières premières et un marché de nouveaux
consommateurs potentiels. Pour redorer l’image désastreuse des
multinationales françaises en Afrique, une charte contre la
corruption a été adoptée, qui restera bien entendu purement
décorative.

Aucun débat en revanche sur le respect des droits
démocratiques et sociaux. Les vraies revendications des
populations africaines ont été comme d’habitude soigneusement
éludées. Et pour cause : ces sommets comptent toujours bon
nombre de dictateurs ou de représentants de régimes autoritaires
qui profitent du soutien français. En la matière, les grandes
déclarations sur un « nouveau partenariat », une « nouvelle
étape » ou une « nouvelle période » que voudrait impulser la
politique africaine de la France relève désormais de l’exercice de
style obligé. Mais la seule traduction symbolique aura consister à
supprimer le traditionnel « dîner des amis » réunissant autour du
président français les chefs d’Etats francophones et Sarkozy s’est
volontiers affiché avec des chefs d’Etats anglophones, comme
lors de la conférence de presse finale. Il a néanmoins fait passer
des messages rassurants à « ses » dictateurs, qu’il retrouvera
d’ailleurs le 13 juillet prochain à Paris. Leurs armées, dont
certaines se sont illustrées encore récemment par des crimes
commis avec la complicité de l’armée française, défileront en effet
le lendemain sur les Champs Elysées.

Robin Guébois