MADAGASCAR : le premier État de la planète à souffrir de la famine à cause du dérèglement climatique
5 décembre 2021 05:00 0 messages
Ce n’est pas la première fois que la sécheresse provoque la pénurie des ressources agricoles vivrières dans cette région de la Grande Ile de l’Océan Indien. Mais aujourd’hui, la famine touche plus d’un million de personnes et c’est bien le dérèglement climatique qui accentue le phénomène.
Dans cette région semi-aride, il n’a quasiment pas plu depuis les quatre dernières années. Jusqu’en janvier 2016, les gens n’avaient pas vu une goutte de pluie et en mars 2017, ils ont subi un autre fléau, le cyclone Enawo qui a provoqué de nombreuses destructions.
Le maïs, le manioc[1], les légumes ne poussent pas, les zébus meurent de déshydratation. Le riz cultivé dans les régions productrices, la principale ressource alimentaire de l’ile, un riz de haute qualité, est exporté… Celui vendu dans le pays subit des variations de prix très spéculatives. Or, il constitue la nourriture principale avec une consommation de 140 kg par an et par personne.
Le long de l’atroce piste qui descend de Manakara à Tôlagnaro les autorités et la FAO[2] livrent des brisures de riz importées d’Asie[3] aux populations affamées…ce riz qui chez nous, en Occident, sert à nourrir les chiens… Mais les populations éloignées de cet axe, qui vivent dans les forêts épineuses de didiéracées, ne reçoivent même pas ces ressources. Quand les feuilles de cactus rouge sont aussi épuisées, ces victimes trompent la faim en mangeant du cuir tanné, des morceaux de cuir destinés à fabriquer des chaussures, récupérés dans les poubelles du cordonnier[4], ou de la boue. C’est la pire sécheresse connue depuis quarante ans.
En octobre dernier, le Programme alimentaire mondial (PAM) et la FAO, tiraient la sonnette d’alarme. Parmi les personnes touchées par la crise alimentaire aiguë dans le pays, 14 000 ont atteint l’indice 5 du PAM, la phase la plus élevée dans la classification de la sécurité alimentaire, qui nécessite une « protection très urgente des vies humaines par une assistance complète pour les besoins essentiels ». Cet échelon ne concerne que trois pays au monde : le Soudan du Sud, le Yémen et désormais, Madagascar.
Aujourd’hui, selon l’ONU, le pays est devenu le premier État à l’échelle de la planète à souffrir de la famine à cause du dérèglement climatique.
Cette année, « les récoltes ont été réduites de 40 % », observe Claire Kaboré, représentante du Gret à Madagascar, une ONG internationale de développement : « entre les invasions de criquets, le manque de pluie, l’érosion du vent, les tempêtes de sable et la déforestation… La situation est plus alarmante que dans le passé ! ». Et à ces calamités, il faut ajouter l’insécurité et les vols de zébus.
L’État ne soutient pas vraiment les initiatives et tente d’étouffer l’information dans ce sud qui est surnommé « le cimetière à projets ». Il accuse les ONG de diffuser de fausses informations pour nuire à l’image du pays…
Les associations et organisations internationales multiplient des distributions alimentaires qui demeurent insuffisantes pour sécuriser le quotidien des familles. Un programme d’aide massive et de développement à long terme, comme la culture de céréales et de légumineuses résistantes à la sécheresse, des techniques pour éviter l’érosion de la terre, la réhabilitation des routes et pistes pour un meilleur accès à l’eau, devraient être mis en œuvre.
Madagascar pays failli, des ONG dépassées par l’ampleur de la catastrophe, des institutions internationales impuissantes, des pays impérialistes uniquement préoccupés de leurs rivalités stupides, et pendant ce temps un peuple se meurt victime de dérèglements de toute sortes, le dernier en date étant climatique. Il nous faut espérer que les gouvernants réunis en COP 26 à Glasgow entendent quelque chose de cette grande misère mais la vigilance est plus que jamais de mise et le Parti de Gauche saura le rappeler haut et fort.
Allain Graux
Déclaration de la commission Afrique du Parti de Gauche
[1] Le manioc, la deuxième production agricole est auto-consommé par 60 % de la population.
[2] Organisation pour l’alimentation et l’agriculture
[3] Pakistan
[4]Gaëlle Borgia, journaliste indépendante basée à Madagascar
Source : http://afpafricaine.org/
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