Comment l’État français et Total poussent-ils à la militarisation du Mozambique ?
30 novembre 2021 04:30 0 messages
La militarisation de Cabo Delgado, où Total possède un investissement de près de 20 milliards d’euros, pourra-t-elle venir à bout de la révolte islamiste ? Se dirige-t-on vers un nouveau scénario à la malienne en Afrique australe ?
La province de Cabo Delgado, dans l’extrême nord du Mozambique, se trouve aux prises avec une insurrection se revendiquant de Daesh depuis 2017. Mais ces derniers mois la situation sécuritaire s’est largement dégradée, au point que Total a dû « suspendre » ses activités d’exploitation gazière dans la région en mars dernier à la suite de l’attaque de la ville de Palma située à quelques kilomètres de la base de la multinationale française. A cela il faudrait ajouter que depuis août 2020 les islamistes d’al-Shabab (comme ils sont connus dans la région, sans qu’ils soient liés à l’organisation du même nom en Somalie) avaient pris le contrôle de la ville portuaire de Mocímboa da Praia, qui vient d’être reprise par les forces mozambicaines et rwandaises.
La situation à Cabo Delgado a commencé à attirer l’attention au niveau régional et international notamment car la province concentre des projets et des investissements de plusieurs dizaines de milliards d’euros. En effet, en 2009 on a découvert des gisements de gaz au large de la province. Total a confirmé un investissement de près de 20 milliards d’euros, ce qui est devenu le principal investissement privé de l’histoire du continent africain. De son côté la multinationale nord-américaine ExxonMobile doit encore décider si elle s’engage dans un investissement de 30 milliards de dollars. De son côté l’italienne ENI, est en train d’avancer dans un projet de liquéfaction offshore du gaz d’autour de 7 milliards de dollars (le projet d’ENI est le seul qui échappe largement de la menace islamiste). A côté de ces multinationales d’autres entreprises de pays tels que l’Inde, le Japon, la Corée du Sud, la Chine, la Thaïlande et le Portugal sont également impliquées dans l’exploitation gazière au Mozambique. Certains analystes estiment que l’investissement total dans les gisements gaziers mozambicains varie entre 50 et 100 milliards de dollars. La province de Cabo Delgado a également attiré les appétits des multinationales du secteur minier à cause des richesses minières de la région, spécialement les mines de rubis.
Pour mieux saisir l’importance de ces chiffres pour le Mozambique rappelons que le PIB du pays n’est que de 14 milliards de dollars en 2021 selon le FMI ; le revenu annuel per capita de cette nation de 32,8 millions d’âmes n’est que de 425 dollars. Le Mozambique est en effet le huitième pays le plus pauvre de la planète, et Cabo Delgado est la province la plus pauvre du pays. Ainsi, selon la Fondation MASC, en septembre 2020 la pauvreté était de 44,8% dans cette province à majorité musulmane, et le taux officiel de chômage est de 16,2% ; l’illettrisme y atteint 53%, le plus élevé du pays ; l’espérance de vie n’est que de 48 ans. Quant aux services publics, outre des infrastructures très médiocres, voire inexistantes, le réseau d’eau potable couvre seulement 44,5% de la province et celui d’électricité 16%.
Autrement dit, les riches ressources minières et gazières se trouvent au milieu d’un océan de misère et de sous-développement. C’est dans ce contexte que la révolte islamiste surgit en 2017. Et ce n’est pas étonnant qu’une large partie de ses combattants islamistes soit composée de jeunes au chômage et de personnes ayant été expulsées de leurs terres ou contraintes d’abandonner leur activité agricole, minière artisanale ou de pêche pour permettre aux multinationales comme Total ou MRM (Montepuez Ruby Mining) de s’y installer. Dans ce contexte, le « pari risqué » des multinationales était donc d’exploiter les richesses naturelles d’une région plongée dans la pauvreté tout en essayant de ménager les conflits qu’une telle situation allait inévitablement provoquer. Le « pari » semble pour le moment assez raté.
En effet, outre le fait que Total ait dû suspendre ses activités et travaux, le conflit a fait depuis 2017 au moins 3 000 morts et 800 000 déplacés (des chiffres qui pourraient être plus élevés étant donné que l’information est très fortement contrôlée par le gouvernement). Les populations locales se trouvent ainsi coincées entre les violences et les crimes des islamistes d’une part, et la brutalité et les crimes de l’armée mozambicaine et des mercenaires que le gouvernement avait embauché pour combattre l’insurrection islamiste, sans succès, d’autre part.
Militarisation de Cabo Delgado
Depuis de longs mois le PDG de Total, Patrick Pouyanné, tentait de convaincre le président mozambicain, Felipe Nyusi, et les dirigeants de l’Union Européenne (UE) d’adopter une posture plus agressive face à l’insurrection islamiste à Cabo Delgado. Mais c’est l’attaque islamiste contre Palma en mars dernier qui semble avoir accéléré les choses. A la suite de cette attaque Total décidait de suspendre ses activités dans le pays. Le gouvernement mozambicain, qui était jusque là réticent à faire appel à une intervention militaire étrangère et préférait embaucher des mercenaires, craignant le départ des investisseurs, a commencé à multiplier les échanges afin de trouver des armées amies prêtes à intervenir à Cabo Delgado.
Cependant, cela ne veut pas dire que le gouvernement mozambicain a levé toutes les résistances qu’il pouvait avoir vis-à-vis d’une intervention militaire étrangère dans le pays. En effet, pour des questions historiques mais aussi pour des questions politiques, présentées sous couvert de « souveraineté nationale », le président Nyusi et son parti, le FRELIMO (Front de Libération du Mozambique), se méfient de la présence de troupes sud-africaines dans leur pays. L’Afrique du Sud est la principale puissance régionale et au sein de la Communauté de Développement de l’Afrique Australe (SADC pour son sigle en anglais), raison pour laquelle le Mozambique a rejeté jusqu’à récemment les propositions de cette organisation régionale.
En ce sens, tout en accordant un déploiement des troupes des différents pays de la SADC, le président Nyusi a également multiplié les rencontres avec des dirigeants d’autres pays du bloc pour arriver à des accords bilatéraux mais aussi avec des dirigeants de pays qui ne font pas partie du bloc, notamment le Rwanda. « Le président mozambicain était à Harare en juin et, selon le Zimbabwe Independent, son objectif était de s’assurer que le Zimbabwe, en plus de participer au contingent de près de 2900 soldats que la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) envoie au Mozambique, envoie également une force dans le cadre d’un accord bilatéral. L’Angola enverra vendredi 20 conseillers militaires, le Botswana a déjà envoyé 296 soldats, le Parlement sud-africain a approuvé l’envoi de 1495 soldats sud-africains (qui ont commencé à arriver ce mercredi) », écrivait fin juillet le journal portugais Publico.
Nonobstant, comme preuve de la méfiance du gouvernement mozambicain vis-à-vis de certains de ses voisins, une semaine avant le déploiement de la force de la SADC, un contingent de 1 000 soldats et policiers rwandais arrivait à Cabo Delgado et entrait immédiatement en action. Ce rapide déploiement a pris de court non seulement les membres de la SADC, à commencer par l’Afrique du Sud, mais aussi les organisations de la société civile et les forces politiques mozambicaines dont certaines ont dénoncé que le parlement n’a pas été informé de l’arrivée des forces rwandaises.
Pour certains analystes, le recours aux forces rwandaises répond à une tentative de la part de Felipe Nyusi de garder le contrôle sur les actions militaires menées par les troupes étrangères dans le pays. Les troupes rwandaises permettraient ainsi à Nyusi de faire contrepoids face à la SADC et à l’Afrique du Sud. Mais d’autres analystes pointent aussi le risque de conflits entre les différentes forces intervenantes et des quiproquos face au manque de commandement commun. L’analyste mozambicain Manuel de Araújo explique que « le Rwanda voudra montrer des résultats à la SADC. Il y aura de la concurrence sur le terrain, et cela pourrait ne pas donner les résultats escomptés. Ce que l’on attend, c’est une force qui dispose d’un commandement commun, interarmées, une force disciplinée qui travaille en parfaite harmonie, avec l’échange d’informations opérationnelles tactiques et stratégiques, ainsi que, si nécessaire, la possibilité de compter sur le soutien, que ce soit en termes d’informations, de moyens ou d’hommes, d’autre part. Dans le cas contraire, je vois un baril de poudre, où nous aurons Cabo Delgado divisé en parties, dans ce que j’appellerais une véritable conférence de Berlin pour Cabo Delgado, où chaque district serait sous le commandement d’une force ou d’un pays ».
Pour complexifier la situation, outre les troupes des différents pays africains, les puissances impérialistes de l’UE et les États-Unis ont déjà envoyé des militaires pour des missions diverses dans le pays. Ainsi, le Portugal, ancienne puissance colonisatrice du Mozambique, a envoyé 60 militaires au pays en avril dernier pour former les forces mozambicaines et en mai un autre accord a été signé avec Maputo pour l’envoi de 60 autres formateurs militaires. De leur côté, les États-Unis ont également envoyé des Bérets verts au Mozambique afin de formes ses forces armées une mission renouvelée en août dernier. Finalement, l’UE a décidé à la mi-juillet d’envoyer une force de formation d’entre 200 et 300 soldats, et là aussi ce sera le Portugal qui prendra la tête de la mission européenne. La France de son côté se dit prête à collaborer à la sécurisation du Canal du Mozambique à travers sa marine (une fonction qu’elle rempli largement déjà grâce à des accords militaires signés de longue date avec le Mozambique).
Il est difficile de dire pour le moment le nombre exact de soldats étrangers présents au Mozambique et plus particulièrement à Cabo Delgado mais on peut d’ores et déjà estimer leur nombre à entre 3 000 et 4 000, plus les militaires mozambicains. Même si ces missions sont, en principe, de courte durée, il est difficile de dire précisément pendant combien de temps ces forces militaires resteront effectivement dans le pays. Mais cette soudaine militarisation du Mozambique ne tombe pas du ciel. Elle est le résultat également des pressions des investisseurs, à commencer par Total, et des États qui les soutiennent comme la France mais aussi les États-Unis dont d’importantes banques sont impliquées dans le financement des investissements à Cabo Delgado.
Comme l’écrit l’observatoire du conflit à Cabo Delgado, Cabo Ligado, dans son rapport de mai : « le 17 mai, [le président Nyusi] a rencontré le président Macron et le patron de Total, Patrick Pouyanné, dans le but de les convaincre qu’il peut rétablir la sécurité à Cabo Delgado. Après la débâcle de Palma, un plan de sécurité convaincant pour Total et les Français est devenu une priorité urgente pour Maputo, qui est naturellement désireux de remettre sur les rails le projet de gaz naturel liquéfié de la société. Total s’est engagé à revenir lorsque la situation sera calme. Il est désormais essentiel de parvenir à un accord sur la forme que prendra ce retour et sur la manière dont la sécurité sera renforcée. Les prédictions d’un modèle dit d’"irakisation" (c’est-à-dire privilégiant la sécurité des intérêts stratégiques clés par rapport aux besoins de sécurité plus larges de la population) semblent se réaliser ».
Des questions autour de l’intervention du Rwanda
Parmi les armées intervenant à Cabo Delgado l’une attire particulièrement l’attention : la Rwanda Defence Force (RDF). Le Rwanda a de l’expérience dans les interventions à l’étranger dans la région, notamment en République Démocratique du Congo et en Centrafrique. Cependant, sa participation dans la lutte contre l’insurrection islamiste au Mozambique est surprenante étant donné que les deux pays ne semblaient pas avoir des relations particulièrement proches.
Il y a des spéculations sur le rôle de la France et les contacts que les deux pays ont entretenus ces derniers temps (nous y reviendrons plus tard). Nous avons déjà mentionné l’intérêt que le gouvernement mozambicain trouve dans l’appui des forces rwandaises face au poids de la SADC et l’Afrique du Sud. Cependant, le Rwanda a ses propres intérêts politiques et stratégiques pour intervenir à Cabo Delgado. Outre d’éventuelles opportunités économiques à Cabo Delgado, en partenariat avec les investisseurs étrangers, le Rwanda pourrait tenter d’utiliser son intervention au Mozambique pour renforcer sa position économique et politique dans la région. Nous avons interrogé Jasmin Opperman, analyste chez 14° North, qui couvre le conflit depuis le début, et à ce propos elle estime que « le Rwanda en tire divers avantages, et nous devons examiner la position du président Kagamé sur le sol national. Il se trouve dans une position relativement isolée et est constamment à la recherche d’alliances pour renforcer sa position (…) Regardez la couverture médiatique du Rwanda et les déclarations des médias. Leurs victoires sont dirigées vers les Rwandais, montrant une force formidable et un président prenant la tête de la région. Ils ont détourné le "récit de guerre" et se sont ainsi positionnés comme la force dominante. Nous le constatons également dans ses déploiements récents en République Centrafricaine ».
Le journal britannique The Economist abonde dans le même sens et ajoute un autre élément : « le Rwanda manque également d’amis, ce qui résulte de la chasse aux opposants dans d’autres pays et du soutien aux rebelles dans son voisinage. En aidant le Mozambique, le Rwanda gagne un nouvel allié. Et cela plaît à l’Amérique, à la Grande-Bretagne et à la France. La présence de dissidents rwandais au Mozambique peut également avoir joué un petit rôle dans la décision ».
Ce dernier élément, la traque des opposants au régime de Paul Kagamé dans les pays de la région, pose en effet question. Même si comme dit The Economist cet élément joue sans doute un rôle moindre par rapport à d’autres facteurs, on doit mentionner que ces derniers mois le gouvernement rwandais a cherché à passer des accords avec des pays de l’Afrique australe pour traquer des opposants réfugiés à l’étranger. Un autre élément important à signaler sur cette question est la disparition du journaliste dissident rwandais, Cassien Ntamuhanga, qui aurait été enlevé par des agents de Kigali en mai dernier au Mozambique où il réside.
Même dans le cas où la traque des opposants rwandais ne ferait pas partie des raisons principales de l’intervention rwandaise au Mozambique, les craintes que les forces rwandaises profitent de leur accès au sol mozambicain pour se renseigner et réprimer les opposants semblent justifiées. Et cela d’autant plus quand on pense au général responsable de diriger la mission rwandaise : Innocent Kabandana. Celui-ci est connu pour ses opérations de traque des opposants rwandais à l’étranger : « le major-général Innocent Kabandana est responsable de l’assassinat d’évêques catholiques à Gakurazo en 1994, et de la chasse aux dissidents rwandais aux États-Unis et au Canada lorsqu’il était attaché militaire à l’ambassade du Rwanda à Washington (...) Et Kabandana, en tant que commandant des forces spéciales rwandaises, aurait dirigé des opérations au Sud-Kivu, en République démocratique du Congo, avec pour mission d’éliminer les réfugiés hutus et de rapatrier les femmes et les enfants, de créer et de combattre au nom de RED Tabara - un mouvement de résistance contre le gouvernement burundais - et de démanteler les groupes de résistance soupçonnés d’être alliés aux groupes armés rwandais », écrit DW Africa.
Mais le général Kabandana n’est pas la seule inquiétude que cette intervention peut soulever. En effet, alors que certains louent les qualités et le professionnalisme de l’armée rwandaise, la réalité c’est qu’elle est entachée d’accusations et de soupçons de crimes commis dans des pays de la région. En ce sens, le rapport de mai de Cabo Ligado que nous avons déjà cité affirme que « le "Rapport Mapping" de 2010 du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme sur les abus a présenté des preuves de crimes de guerre présumés commis par les forces rwandaises en République démocratique du Congo (RDC) lors des première et deuxième guerres du Congo de 1996 et 1998 ». De son côté le Groupe Mars, proche des milieux de la défense française, écrit dans un article de La Tribune sur l’intervention du Rwanda en RDC : « une simple recherche sur internet conduit à une série d’études, francophones mais non françaises, tendant à montrer que les régimes en place à Kigali et Kampala tirent le plus grand profit économique de la catastrophe humanitaire qu’est devenu l’est congolais. Ainsi, le Rwanda serait devenu le premier exportateur mondial de coltan, un minerai indispensable notamment à l’industrie des télécoms du fait de ses propriétés conductrices. Or c’est dans les Kivu, en RDC, que se situe le minerai le plus pur. Il y est exploité dans des mines artisanales contrôlées par des milices qui défient l’autorité de Kinshasa et exportent le minerai au Rwanda où il est raffiné pour en extraire le tantale, ce qui concourt à rapporter au pouvoir rwandais l’une de ses principales sources de devises ».
Le Rwanda tente en ce moment de se projeter dans la région comme un État pourvoyeur de sécurité travaillant étroitement avec l’ONU et les puissances régionales et internationales, ce qui pourrait éventuellement lui ouvrir les portes à des investissements. C’est dans ce cadre qu’il faut également comprendre son intervention au Mozambique. Cependant, tous les éléments mentionnés ci-dessus posent évidemment des questions quant aux risques non seulement pour les réfugiés politiques rwandais au Mozambique mais aussi sur la sécurité des populations locales, qui ont d’ailleurs déjà été victimes d’abus de la part des forces mozambicaines et de leurs alliés. Alors que des premiers rapports de violences contre des civils commencent à surgir, ce risque d’abus augmentera encore si la mission des forces étrangères se prolonge dans le temps. D’un point de vue des intérêts économiques, cela pose aussi des questions sur ce que le gouvernement mozambicain a pu promettre au Rwanda en termes d’accès aux richesses naturelles du pays. Rappelons que Cabo Delgado est aussi une région riche en minerais.
L’État français et Total financent-ils l’intervention rwandaise ?
« Qui paie la facture ? » C’est la question que beaucoup de monde se pose mais à laquelle les responsables politiques des différents pays impliqués dans l’intervention au Mozambique répondent de manière plus que floue. Cela pose d’autant plus question quand on sait que la plupart des Etats impliqués se trouvent dans des situations économiques délicates. Etant donné l’importance des investissements dans la région de la part de plusieurs multinationales, notamment de Total, tous les regards se tournent alors vers la France. Et les spéculations sur un possible financement français résonnent de plus en plus fort. Et ce n’est pas sans fondements.
Sous fond d’une reconnaissance partielle de la responsabilité française dans le génocide des Tutsi en 1994 au Rwanda, les deux Etats ont entamé un processus de rapprochement et de normalisation de leurs relations. A cela il faut ajouter qu’en mai dernier Macron s’est rendu à Kigali, capitale rwandaise, avant sa visite en Afrique du Sud (un autre pays fortement impliqué dans l’intervention au Mozambique). Aussi, le président rwandais Paul Kagamé, ainsi que son homologue mozambicain Felipe Nyusi, avait été reçu à Paris par Emmanuel Macron pour le « Sommet de financement des économies africaines ». D’autre part, Nyusi s’est rendu au Rwanda le 28 avril dernier afin de s’entretenir avec Kagamé.
Tous ces éléments poussent à croire que la France a quelque chose à voir avec le déploiement rwandais (et sud-africain) au Mozambique. Comme nous l’explique J. Opperman : « l’amitié renouvelée fait partie de l’alliance. Le fait que le Rwanda soit responsable de Mocímboa da Praia [importante ville portuaire reprise aux islamistes récemment] et du corridor de sécurité en dit long. Une force militaire bien entraînée et bien armée est clairement en mesure de faire redémarrer le développement du GNL. Le Rwanda présente la meilleure opportunité pour le Mozambique et la France, et avec cela Total (…) Que la France apporte un soutien financier, je n’en doute pas ».
Mais celui qui va le plus fort en cette direction est António Rodrigues dans un article du journal portugais Público que nous avons cité plus haut. En évoquant le changement de la stratégie française au Sahel où Macron entend réduire le nombre de soldats français en les remplaçant éventuellement par des troupes africaines, Rodrigues écrit : « cette même stratégie semble être déjà adoptée au Mozambique pour protéger les intérêts de la multinationale française Total et son projet de gaz naturel à Cabo Delgado. Le contingent de troupes rwandaises qui a déjà commencé à combattre les djihadistes dans la province septentrionale du Mozambique serait financé par la France, qui a déjà fait savoir au Zimbabwe qu’elle était également disposée à payer les coûts de ses troupes s’il décidait d’envoyer ses forces à Cabo Delgado ». Pour Fernandes, qui ne donne pas ses sources, Total serait aussi impliquée dans le financement de ces opérations en accord avec l’Etat français. Ainsi dans le cas d’une possible implication du Zimbabwe financée par la France il affirme que « la suggestion serait venue du président français, auquel Nyusi a rendu visite à Paris à la mi-mai, et qui était prêt à financer l’opération (en fait, l’argent viendra de Total, qui pourra le comptabiliser comme frais de mise en œuvre, bénéficiant d’une réduction d’impôt). Macron aurait proposé d’établir avec le Zimbabwe le même type d’accord d’assistance technique et financière que celui qu’il a signé avec le Rwanda ». D’autres éléments font penser à une participation de la multinationale française dans le soutien des forces rwandaises comme le fait que celles-ci aient fait des installations de Total à Afungi leur base.
Le fait est qu’après les difficultés que rencontre l’intervention française au Sahel, qui semble se diriger tout droit vers un échec comparable à celui des Etats-Unis en Afghanistan (voire pire), la France tente d’éviter le plus possible d’être impliquée directement dans un nouveau conflit en Afrique. Cela est encore plus important dans une situation politique française où la population se montre de plus en plus hostile à l’opération Barkhane et où on est déjà rentré dans la période de campagne présidentielle pour l’élection de l’année prochaine. En ce sens, il n’est pas absurde de penser que les efforts français, face à la nécessité de venir en aide à Total, aillent dans le sens d’impliquer des partenaires régionaux, quitte à financer discrètement leurs interventions.
Cependant, ce serait une erreur de penser qu’il n’y a que l’Etat français (et Total) qui a intérêt à financer une telle intervention. Rappelons que la multinationale nord-américaine ExxonMobile envisage d’investir 30 milliards de dollars dans l’exploitation du gaz à Cabo Delgado. Des banques d’investissement étatsuniennes sont déjà engagées aux côtés de Total. Le Portugal, est en train de jouer un rôle central dans la coordination de l’implication de l’UE dans la région et l’Allemagne pour sa part a fait un don de 4,2 millions d’euros pour protéger la frontière entre le Mozambique et la Tanzanie, où des combattants islamistes pourraient tenter de chercher refuge. La Chine et la Russie possèdent également des intérêts dans le gaz de Cabo Delgado, mais l’Inde est sans doute l’un des Etats de la zone indopacifique qui a le plus de liens commerciaux avec le Mozambique : de 1996 à 2021 le Mozambique est le principal récepteur d’investissements indiens au monde. On pourrait ajouter à cette liste le Japon et la Corée du Sud également.
Tout cela veut dire que même si les principaux concernés ici sont Total et l’Etat français, les intérêts à « pacifier » Cabo Delgado sont multiples et impliquent plusieurs pays au niveau régional et international. Autrement dit, les candidats pour une intervention ou pour le financement d’interventions sont multiples dans le cas de Cabo Delgado.
L’Afrique du Sud, l’autre allié de la France
Alors que la France n’a pas d’ancrage historique dans l’Afrique australe comme elle l’a en Afrique centrale et notamment de l’ouest, conséquence de son passé colonialiste, son récent intérêt pour la région implique la recherche de nouveaux alliés fiables et le renforcement de partenariats déjà existants. C’est ainsi qu’elle s’est tournée « naturellement » vers l’Afrique du Sud. L’Etat français et Total son tout à fait conscients que l’Afrique du Sud est un acteur clé dans la région et sa participation était incontournable pour contrer l’insurrection islamiste à Cabo Delgado.
C’est ainsi que l’ONG Centro Para Democracia e Desenvovimento décrivait cette situation en juillet dernier : « la France exploitait l’influence économique et politique de l’Afrique du Sud dans la région pour jouer un rôle stratégique dans l’intervention militaire de la SADC au Mozambique. Pretoria a toujours préconisé une solution régionale pour Cabo Delgado plutôt qu’une intervention des puissances internationales. Conscient de cela, Paris s’est allié à l’Afrique du Sud pour influencer la structuration du soutien régional à la lutte contre le terrorisme. Avant la rencontre de Pretoria, Macron et Ramaphosa s’étaient rencontrés à la mi-mai à Paris et le terrorisme au Mozambique avait été l’un des sujets abordés ».
Ce rapprochement entre la France et l’Afrique du Sud se combine avec une augmentation importante d’exportations d’armes françaises vers l’Afrique du Sud. En effet, dans le rapport au Parlement sur les exportations d’armements de la France publié en juin 2021 on constate que le volume de matériels militaires français livrés à l’Afrique du Sud en 2020 a été multiplié par plus de trois, passant de 4,2 millions d’euros en 2019 à 14,1 millions d’euros en 2020. Ces chiffres sont certes encore loin des 20,2 millions euros de ventes au Maroc et encore plus loin des 51,3 millions d’euros pour l’Algérie, mais en 2020 l’Afrique du Sud a été le plus grand client de la France en Afrique sub-saharienne loin devant l’Ouganda (7,6 millions) qui arrive après elle.
Dans le document il n’y a pas de registres de ventes d’armes de la France vers le Mozambique en 2020. Cependant, l’Afrique du Sud a approuvé un demi-million de rands d’exportations d’armes vers le Mozambique au cours de l’année 2020. Etant donné le niveau de corruption et d’opacité du gouvernement mozambicain et des affaires dans la région il est très difficile de connaître le détail de ces ventes et même d’obtenir plus d’informations à ce propos. En ce sens, le site sud-africain spécialisé dans les questions militaires et de défense, DefenceWeb, cite le directeur de Human Rights Watch, Dewa Mavhinga, qui affirme que « son organisation "sait qu’officiellement, les autorités sud-africaines ont annoncé l’année dernière qu’elles fournissaient des armes au Mozambique pour aider à mettre fin à l’insurrection dans la province de Cabo Delgado. Elles n’ont toutefois pas fourni de détails supplémentaires. Ayant documenté des allégations de graves violations des droits de l’homme à Cabo Delgado, tant par les insurgés que par les forces de sécurité du Mozambique, notamment des meurtres, des enlèvements, des mauvais traitements infligés aux détenus et des détentions arbitraires qui se produisent en toute impunité, nous demandons instamment aux autorités sud-africaines de s’assurer que leur soutien n’entraînera pas de nouvelles violations" ».
Il est très difficile de savoir dans l’état actuel si des armes françaises ont été délivrées au Mozambique par le biais de l’Afrique du Sud ou autres circuits occultes. Cependant, ce qui semble ne faire aucun doute c’est que les armes que Pretoria s’est procurées auprès de la France serviront dans une large mesure pour l’intervention des militaires sud-africains à Cabo Delgado. C’est en effet une autre manière pour la France de pousser à la militarisation du Mozambique et de toute la région de l’Afrique australe. Toujours dans l’objectif de protéger les intérêts de ses multinationales.
L’option militaire impuissante face à la crise à Cabo Delgado
Alors que l’option militaire à Cabo Delgado est devenue « sens commun » parmi les décideurs locaux et régionaux, les investisseurs et politiciens des Etats impérialistes, et que les premiers succès sur le terrain militaire apparaissent, comme la reprise de Mocímboa da Praia par les forces rwandaises (ce qui pourrait accélérer le retour de Total), la question qui continue à se poser c’est : peut-on mettre fin à l’insurrection islamiste par des moyens purement militaires ? A l’heure où l’on constate le terrible échec de 20 ans d’occupation impérialiste en Afghanistan, dont le corollaire a été le retour fracassant des Taliban au pouvoir, ou encore la désastreuse opération Barkhane menée par la France au Sahel, on a des exemples contemporains du caractère néfaste de ces interventions militaires, notamment pour les populations locales.
Pour Jasmin Opperman une intervention militaire était nécessaire à Cabo Delgado, cependant elle pointe également les limites de cette option malgré les succès à court terme : « la reprise de Mocímboa da Paria intervient à un moment où les insurgés ont déjà tiré le maximum d’opportunités. Les rapports indiquent que les insurgés ont commencé à se retirer avant même l’arrivée du Rwanda. Le développement n’est qu’un cliché si nous ne le définissons pas dans le contexte d’un Cabo Delgado oublié, où la dignité humaine prend le dessus, où la peur est engagée dans un processus structuré de conquête des cœurs et des esprits au-delà des attentes économiques en matière d’emploi et de développement des infrastructures. Ces derniers ne sont que des facilitateurs dans la lutte contre les causes profondes. Négligez-les et la ligne de vie des insurgés reste intacte. Le gouvernement mozambicain est confronté au principe de Matthew et à une économie mondiale favorisant l’élite : "A ceux qui ont tout, on donnera plus. A ceux qui n’ont rien, tout sera pris". La population de Cabo Delgado en fait l’expérience depuis bien trop longtemps ».
Et c’est en effet là la clé de toute la situation : la pauvreté et la misère où est submergé Cabo Delgado, dont certaines chiffes ont été exposées plus haut. Les armées de la SADC et celle du Rwanda et même éventuellement celle d’autres Etats pourraient venir à bout de l’insurrection actuelle, mais tant que les causes sociales, économiques et politiques structurelles qui l’ont provoquée resteront là, d’autres insurrections apparaîtront. L’intervention militaire elle-même pourrait d’ailleurs alimenter la révolte parmi la population locale. Comme nous l’avons déjà dit, les abus des militaires agissent comme moteurs poussant certaines personnes dans les bras des insurgés islamistes. Mais il existe aussi d’autres facteurs liés à la guerre qui peuvent alimenter le mécontentement populaire.
Pour prendre un exemple, l’un des grands points de dispute entre les populations locales et les projets des investisseurs étrangers avait été la question de la terre. Beaucoup de pêcheurs, de mineurs artisanaux et d’agriculteurs ont été déplacés plus ou moins de force de leurs terres et eaux de pêche pour laisser la place aux multinationales, dans le cas des mineurs ils ont été criminalisés et forcés à abandonner leur activité. Certaines personnes, notamment des jeunes, ont même rejoint les insurgés après ces expulsions. Mais aujourd’hui que les combats se sont accentués, que le nombre de déplacés a augmenté, la question du retour des réfugiés et du sort de leurs terres devient de plus en plus un enjeu central qui pourra se traduire par des évènements importants de la lutte de classes dans la province. Comme c’est écrit dans le rapport de Cabo Ligado déjà mentionné : « alors que le gouvernement continue d’éviter de faire des efforts systématiques pour s’assurer que les personnes déplacées pourront retourner chez elles à l’avenir, on craint de plus en plus que ce qui semble être une réinstallation temporaire ne soit en fait permanent. Parmi les personnes déplacées, cela alimente les théories selon lesquelles le conflit n’existe que pour les priver des terres sur lesquelles elles vivent, cultivent et pêchent depuis longtemps. Pour les communautés d’accueil, cela laisse présager un avenir où la concurrence pour les terres sera beaucoup plus féroce, ce qui les incite à agir maintenant contre les personnes déplacées pour s’assurer un avantage dans cette concurrence ».
Ce n’est pas un hasard si dans le même rapport on fait état de craintes que les islamistes soient en train de tirer profit de cette situation et que secrètement ils recrutent parmi les personnes déplacées ou dans les camps de réfugiés. Cela conduit d’ailleurs les autorités mozambicaines à cultiver une grande méfiance à l’égard des réfugiés.
Une autre question susceptible d’alimenter le mécontentement populaire et donc la révolte dans la province c’est la perception par la population que tous les efforts sont dédiés non à la protéger des abus et atrocités des insurgés islamistes mais à protéger uniquement les intérêts des multinationales. En ce sens, la sociologue du travail portugaise Mariana Carneiro, dans un article intitulé « Le gaz de Total est une ‘malédiction’ pour Cabo Delgado », décrit comment la population de Palma face à l’aggravation des combats à été complètement délaissée alors que les aides et ressources allaient en priorité aux employés des multinationales sur place : « toute la nourriture est passée par la mer. Et même par la mer, il y avait parfois des incidents, des attaques sur les bateaux. Lorsque cela s’est produit, le gouvernement a conclu un accord avec Total et les autres entreprises opérant à Palma pour garantir leur sécurité. Tous les travailleurs des entreprises, des banques, ont déménagé dans les hôtels. En d’autres termes, la nourriture ne parvenait pas aux habitants de Palma, mais elle parvenait aux hôtels. Les quelques navires qui parvenaient à accoster à Palma allaient d’abord approvisionner les hôtels et les camps des grandes entreprises. Cette population est restée affamée ».
Même si ces derniers jours on a pu voir des images de soldats rwandais essayant de sympathiser avec les populations locales, il est clair pour tout le monde que la priorité c’est de sécuriser le périmètre et les voies de communication des bases où se trouvent les investissements de Total et des autres entreprises étrangères afin qu’elles reviennent au plus vite et reprennent leur activité. « La présence d’un contingent rwandais et le déploiement d’une force de la SADC semblent viser à protéger les intérêts des multinationales impliquées dans des projets de gaz naturel dans le bassin de Rovuma, ce qui pourrait donner lieu à une "enclave pétrolière" », estime le chercheur João Feijó.
Ce que tout cela montre c’est que l’intervention militaire et la militarisation de Cabo Delgado sont complètement impuissantes pour résoudre les problèmes de fond qui ont préparé le terrain au surgissement de l’insurrection islamiste. Son objectif n’est de toute façon pas celui-là. Les interventions militaires, pour lesquelles Total et les puissances impérialistes ont tant plaidé, ont pour objectif principal d’assurer la sécurité des investissements et nullement celle de la population. De fait, les multinationales n’ont que faire des problèmes socio-économiques structurels de la population de Cabo Delgado. C’est en ce sens que l’on peut parler d’un risque d’afghanisation de la situation. « La SADC est confrontée à des contraintes budgétaires et sa présence dépendra des donateurs étrangers. Le Rwanda, avec le soutien de la France, peut être présent plus longtemps. Cependant, compter sur une telle présence signifie simplement un Afghanistan II - une sécurité reposant sur une mentalité de guerre contre le terrorisme n’est pas durable, et à mon humble avis, les insurgés sont bien informés de cette réalité. S’impliquer est la partie la plus facile, en sortir sera plus difficile, car un départ signifiera simplement que les insurgés reviendront sur le théâtre du conflit », considère J. Opperman.
Aujourd’hui Cabo Delgado est complètement militarisé et l’Etat français et Total, par différents biais, comme on a pu le voir ici, sont responsables directs de cette situation. La militarisation de Cabo Delgado, et du Mozambique, ne va résoudre en rien le problème de l’illettrisme, du chômage, la question de la terre et des ressources naturelles de la région pour la population locale. Au contraire, la jeunesse, les paysans, les pêcheurs et les travailleurs de Cabo Delgado vont se voir confrontés à encore plus de violences et d’abus, que ce soit de la part des islamistes ou des militaires. Rien de tout le développement promis ne verra le jour pour les classes populaires de Cabo Delgado. Les capitaux impérialistes et la bourgeoisie nationale est incapable, et n’ont aucun intérêt, de résoudre les problèmes structurels des conditions de vie des populations locales. Cela va à l’encontre de leurs intérêts économiques même. Et cela ne peut qu’alimenter davantage le mécontentement populaire et entretenir un possible terrain favorable au recrutement pour les islamistes.
Cependant, nous ne pouvons pas envisager uniquement la canalisation du mécontentement populaire par les insurgés islamistes. Les missions militaires pourraient même écraser les islamistes, mais sans que cela élimine les sources de révolte. La lutte pour la terre, pour la dignité, pour la survie et contre le mépris et le cynisme des multinationales mais aussi des classes dominantes nationales à Cabo Delgado pourraient aussi prendre une forme progressiste, rejetant à la fois les intérêts des capitalistes et la barbarie des islamistes. A ce moment-là, les mêmes forces qui aujourd’hui sont envoyées contre les islamistes seraient utilisées pour réprimer une révolte légitime de la population et des plus opprimés et exploités de la province. C’est là un autre résultat du caractère réactionnaire de la militarisation pro-impérialiste de Cabo Delgado.
Pour différentes raisons, pour le moment, les puissances impérialistes, dont la France, préfèrent ne pas s’impliquer directement dans les combats privilégiant la formation des forces mozambicaines. Cependant, il n’y a pas de doute qu’elles sont en train de pousser les armées régionales à agir à leur place, très probablement en finançant leurs opérations. Comme on le voit aujourd’hui avec la catastrophe que vit le peuple afghan, le mouvement ouvrier, la classe ouvrière, des pays impérialistes ne peut pas rester les bras croisés. Il n’y a pas de réponse militaire simpliste pour une situation complexe comme celle à Cabo Delgado, comme prétendent les militaristes impérialistes. Le mouvement ouvrier en France gagnerait en s’opposant fermement à toute intervention militaire au Mozambique au nom de Total et des intérêts de l’Etat français. Une orientation ouvrière et internationaliste serait de soutenir tout éventuel mouvement progressiste dans la province et la région, contre les multinationales mais aussi contre les islamistes qui ne sont en aucun cas une solution face à la misère de Cabo Delgado. A la différence des impérialistes militaristes, nous parions sur le surgissement d’un mouvement des opprimés et des exploités qui balaye les islamistes de Cabo Delgado mais qui remette en cause également le pouvoir des multinationales. Un mouvement qui se batte pour que ce soient les masses et les travailleurs qui décident que faire des ressources naturelles de la région. C’est la seule issue progressiste possible, tout le reste amènera à un désastre.
Philippe Alcoy
Source : https://www.revolutionpermanente.fr/
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