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Cameroun : Liberté provisoire pour un condamné d’homosexualité

D 22 juillet 2012     H 12:26     A     C 0 messages


L’étudiant de 32 ans condamné par la justice camerounaise à 36 mois de prison pour homosexualité, a été remis en liberté le lundi 16 juillet 2012

Jean Claude Roger Mbédé 32 ans, et condamné fin avril 2011 par la justice camerounaise d’homosexualité, a été remis en liberté le lundi 16 juillet 2012 dernier. Les circonstances de cette libération ne sont pas clairement définies, mais pour les associations de défense des minorités sexuelles, c’est une victoire. « Ce n’était pas la première demande de remise en liberté que nous avons introduite à la cour. (…) C’est un combat permanent et nous pensons que les cultures vont évoluer », a indiqué Maitre Michel Togue, son avocat, dans une interview accordée à Radio France Internationale (RFI). Le jeune Mbede avait été arrêté en Mars 2011 sur la dénonciation d’une personne à qui il avait envoyé des SMS, à caractère homosexuel, invitant celui-ci à une rencontre coquine. Saisi par la police, il avait été placé en garde à vue, et gardé pendant sept jours au Secrétariat d’Etat à la Défense (SED), avant d’être inculpé et transféré à la prison centrale de Yaoundé après être passé aux aveux complets. Le 28 avril 2011, il était reconnu coupable de pratique d’homosexualité et condamné à trois années d’emprisonnement par le tribunal de première instance de Yaoundé qui s’est appuyé sur l’article 347 bis du code pénal camerounais, qui condamne les pratiques homosexuelles et prévoit que toute personne ayant « des rapports avec une personne de son sexe » risque jusqu’à cinq années d’emprisonnement. Une homophobie fustigée par l’Association de Défense de l’Homosexualité ADEFHO rejointe par les associations Human Rights Watch et Alternatives – Cameroun. Elles soutiennent l’opinion selon laquelle la loi camerounaise qui rend passible de sanctions pénales, un comportement sexuel consenti, viole les droits fondamentaux à la vie privée, à l’égalité et à la liberté d’expression reconnus au Cameroun.

En janvier dernier, Jean-Claude Roger Mbédé et six autres hommes détenus pour les mêmes raisons avaient adressé un message de vœux depuis leur prison pour encourager les associations à ne pas baisser les bras. « Votre soutien représente pour les LGBT ( lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres, Ndlr) du Cameroun en général, et pour nous en particulier qui sommes en prison… l’Espoir. L’espoir de sortir un jour de cette prison dans laquelle nous avons été jetés, mais aussi l’espoir qu’un jour les LGBT pourront marcher en toute liberté au Cameroun, la tête haute… Sans humiliation », avaient-ils fait savoir. Le gouvernement camerounais refuse de reconnaitre l’homosexualité comme un choix possible de la personne humaine. La société tolère encore des unions incroyables entre des personnes âgées et des mineures. Des arrestations, détentions et procès d’hommes homosexuels et de personnes soupçonnées d’être homosexuelles ont lieu fréquemment en vertu de l’article 347a du Code pénal camerounais. Mais la position des décideurs est difficile à cerner aujourd’hui. Il y a quelques années, lorsque des personnes haut placées dans l’appareil étatique avaient été citées dans une affaire d’homosexualité, l’affaire avait viré au scandale socio-politique. Evoquant le sujet, le président Biya a souvent fait savoir que c’était des questions relevant de la vie privée. En 2011 par contre, le gouvernement camerounais avait rappelé à l’ordre l’Union Européenne. Sa représentation camerounaise avait octroyé un financement de près de deux cent millions de FCFA pour assurer la garantie des droits des homosexuels lorsqu’ils sont devant des juges ou dans les prisons. Si l’article 347a est en vigueur depuis 1972, cela fait seulement quelques années qu’elle est appliquée avec grande force. Paradoxalement, cela coïncide aussi avec une augmentation de sa pratique dans la société et surtout parmi les plus jeunes. L’affaire Mbede est aujourd’hui en appel.

Idriss Linge