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Destruction écologique : Macron à la rescousse du méga-projet pétrolier de Total en Ouganda

D 4 octobre 2021     H 06:00     A Violette Renée     C 0 messages


Face au retournement de certains financeurs du projet de Total en Ouganda, Macron et l’Etat français apparaissent comme des garants pour la multinationale. Des profits économiques et diplomatiques en vue.

Pour rappel, le méga projet Tilenga détenu à 57% par TotalEnergies et en partenariat avec la China National Offshore Oil Corporation (CNOOC) et l’Uganda National Oil Company (UNOC) prévoit le déploiement d’un pipeline d’une distance équivalente à Rome-Paris, le tout chauffé à 50°C pour que le pétrole visqueux puisse s’écouler. Ce projet va déplacer autour de 1000 000 personnes entre la Tanzanie et l’Ouganda et ainsi les priver de lieu de vie et de leurs terres. Ce procédé rappelle le projet gazier de Total au Mozambique, où la multinationale main dans la main avec les autorités locales ont déplacé des populations entières les privant de leurs terres et de l’accès à la mer où ils pêchaient auparavant. Cette situation a d’ailleurs contribué à alimenter les tensions sociales sur lesquelles, pour le moment, des organisations islamistes surfent et qui ont abouti à une radicalisation d’une partie de ces personnes expulsées de leurs terres et à une militarisation de la région...

Deux des plus grands lacs d’Afrique, le lac Victoria et le lac Albert, qui sont aux abords de ces nouveaux puits, vont eux aussi payer les frais des déversements extrêmement polluants de ces nouvelles exploitations. Les associations écologistes dénoncent le fait que ce projet met en danger l’écosystème d’une région où vivent 50% des espèces d’oiseaux et 39 % des espèces de mammifères du continent africain.

Macron et l’État français à la rescousse de Total
En effet, face aux pression des activistes et de l’écho international de la dénonciation de ce projet, plusieurs banques ont annoncé en avril dernier la suspension ou l’annulation de leur participation au financement du projet. Face à cette situation le gouvernement français est venu en aide à la multinationale, notamment au travers d’un courrier du président français à son homologue ougandais. En effet, même si la presse en a peu fait écho, le courrier confidentiel entre Macron et le président Ougandais Yoweri Museveni a fuité. Macron y écrit que ce projet sera « une opportunité majeure d’intensifier le commerce entre nos deux pays et de développer davantage notre coopération. […] Vous pouvez compter sur moi pour mobiliser l’expertise et les investisseurs français pour augmenter la présence française en Ouganda. »

Mais ceci n’a rien d’étonnant. De même que de nombreuses opérations impérialistes françaises, comme l’opération Barkhane - mise en place par Hollande et poursuivie par Macron -, le président français suit la droite lignée des opérations impérialistes de positionnement de la France sur l’or noir ; car on le sait, le pétrole, qui domine toutes les énergies du monde par ses faibles coûts d’exploitation, sa grande efficacité énergétique et son incroyable rentabilité, a un poids central sur le positionnement des pays dans la concurrence internationale. D’autant que ce projet Tilenga est très intéressant : Total estime que ces nouveaux puits permettront l’exploitation d’un milliard de barils de pétrole à un prix imbattable : 50 dollars le baril contre 80 dollars en moyenne aujourd’hui.

Ce méga projet, qui devrait être opérationnel d’ici quelques années, représente une opportunité majeure pour la France, à travers Total, afin de réaffirmer ses jalons économiques et diplomatiques en Afrique de l’Est par l’ouverture de nouvelles vannes d’exploitation et d’exportation pétrolières. La multinationale précise pour Médiapart que « ce projet est mené par TotalEnergies sans intervention de l’État français ». Alors même que face à l’évidence, l’Elysée a été forcée de reconnaître la véracité de cet échange. De même, l’ambassadeur français en Ouganda soutient réaffirmer « l’engagement de la France à accompagner l’Ouganda dans le développement du secteur du pétrole et du gaz » lors de son allocution du 29 septembre 2020. Les liens être l’État français et le projet en Tilenga se trahissent également à travers de nombreux évènements organisés par l’ambassade sponsorisés par Total...

En finir avec le mythe de la fin du pétrole

Il n’y a pas un jour sans que l’on puisse lire dans la presse que « ça y est, c’est la fin du pétrole accessible et abordable ». Ce projet est un exemple de la naïveté de telles analyses. En réalité, depuis 1880 et de façon cyclique certains crient à l’avènement du fameux « pic pétrolier ». En plus d’être faux, ceci va dans le sens de la communication « verte » de ces mégacompagnies pétrolières comme Total qui se targuent de mettre en place un mix énergétique pour se rendre compatibles avec le monde de demain. Pourtant, nous pouvons lire dans les orientations stratégiques du groupe de 2020 que « les investissements rentables dans les renouvelables et l’électricité augmenteront progressivement en passant de 2 à 3 G$ par an, et représenteront alors plus de 20% des investissements nets du Groupe ». En d’autres termes, 80%, soit l’énorme majorité des investissements du groupe restent tournés vers les énergies fossiles.

Le futur de la planète ne peut pas être laissé entre les mains des gouvernements capitalistes et des multinationales. La lutte contre la crise climatique ne peut pas s’arrêter devant les intérêts économiques des capitalistes. Le cas du mégaprojet climaticide de Total, soutenu par l’Etat français, en est une preuve supplémentaire. Les travailleurs, à commencer par ceux du secteur de l’énergie, pourraient jouer un rôle central pour trouver de nouvelles sources d’énergie non polluantes. C’est dans cette perspective que nous nous battons pour sauver la planète et mettre fin à ce système mortifère pour la nature et les être humains.

C’est ce pour quoi se sont battus les grévistes de Grandpuits face au géant Total qui, sous couvert de reconversion du site vers une « bio-raffinerie » de greenwashing, a licencié plus de 700 personnes. Un des grévistes de Grandpuits, Adrien Cornet, réagit au soutien de Macron au projet Tilenga : « force aux travailleurs et aux agriculteurs ougandais : le seul programme qui vaille pour faire plier Total c’est les exproprier et mettre toutes les usines sous contrôle ouvrier ».

Violette Renée

Source : https://www.revolutionpermanente.fr/