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France-Rwanda : Complicité française dans le génocide des Tutsi,18 ans d’impunité

D 9 avril 2012     H 16:49     A Survie     C 0 messages


Le 7 avril prochain est le dix-huitième anniversaire du déclenchement du génocide des Tutsi au Rwanda. Depuis 18 ans, aucun présumé génocidaire vivant dans notre pays n’a encore été jugé, pas plus que leurs complices français. Depuis 18 ans, Survie réitère ses revendications de vérité et de justice, et demande l’instauration d’un véritable contrôle de la politique de la France en Afrique.

L’instruction des six plaintes contre X, déposées en 2005 par des victimes tutsi pour « complicité de génocide et complicité de crime contre l’humanité », visant des militaires français ayant participé à l’opération « humanitaire » Turquoise, pourrait continuer à être retardée si le pôle judiciaire « génocides et crimes contre l’humanité », opérationnel depuis le 1er janvier 2012, n’est pas rapidement doté de moyens plus conséquents. Par ailleurs, des éléments essentiels permettant d’éclairer l’implication française dans le génocide des Tutsi restent toujours couverts par le secret défense. Un acteur aussi central que Paul Barril n’a toujours pas vu son rôle, pendant et après le génocide, éclairci par la justice ou par des parlementaires : il n’a même pas été entendu par la Mission d’Information Parlementaire de 1998.

Le 10 janvier 2012, le rapport d’expertise sur l’attentat du 6 avril 1994, remis aux juges Trévidic et Poux, a posé les bases d’une réorientation complète de l’instruction sur l’événement qui servit de prétexte à un génocide planifié depuis de longs mois. Les vives réactions à ce rapport de la part de plusieurs acteurs de la politique menée par la France au Rwanda entre 1990 et 1994 témoignent une fois de plus que le génocide des Tutsi fait partie de l’histoire de notre pays. Il apparaît de plus en plus clairement que nos concitoyens ont été victimes de manipulations concernant tant l’identification des auteurs et commanditaires de l’attentat, que le lien entre cet événement et le génocide. L’attribution au FPR [1] de la responsabilité de l’attentat du 6 avril a été utilisée pendant des années par certaines personnalités du monde journalistique, universitaire ou politique pour servir une désinformation permettant de faire oublier ou de justifier la politique de soutien de l’exécutif français aux génocidaires. Un soutien qui a perduré avant, pendant et après le génocide. Un soutien confirmé par les nouveaux éléments qui n’ont cessé d’apparaître ces dernières années, et qui jettent une lumière crue sur ce scandale d’État.

Des citoyens français de plus en plus nombreux, maintenant rejoints par certains partis politiques, estiment que le travail de vérité et de justice sur ce passé douloureux est indispensable à notre démocratie. C’est aussi en acceptant de regarder en face la page la plus sombre de la politique africaine de la France que notre pays saura en tirer les conséquences et se doter d’institutions renforcées, notamment par un véritable contrôle parlementaire. Ce travail de vérité nécessite des parlementaires courageux.

Concernant le génocide des Tutsi au Rwanda, Survie demande :
 une prise de position publique des partis politiques, à l’occasion des élections françaises de 2012, pour soutenir la recherche de la vérité sur l’implication française dans le génocide des Tutsi ;
 la création d’une commission d’enquête parlementaire sur la politique de la France au Rwanda, qui complétera le travail partiel de la Mission d’information parlementaire de 1998, pour déterminer les responsabilités politiques et militaires, et devra notamment obtenir et rendre publics les documents encore occultés par le pouvoir exécutif, ainsi que les archives de François Mitterrand ;
 la dotation du pôle judiciaire spécialisé dans les crimes de guerre, crimes contre l’humanité, génocide et torture créé le 1er janvier 2012, en moyens permettant l’avancée sans délai de toutes les instructions liées au génocide des Tutsi du Rwanda : plaintes contre les présumés génocidaires présents sur notre sol et plaintes contre des militaires français de l’opération Turquoise ;
 une justice indépendante des pressions politiques, en particulier dans l’instruction sur l’attentat du 6 avril 1994.

Contact presse : Stéphanie Dubois de Prisque Chargée de communication stephanie.duboisdeprisque(a)survie.org 01 44 61 03 25