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Tchad, Idriss Déby se retire des opérations militaires extérieures

Par Aza Boukhris

D 16 avril 2020     H 00:30     A Aza Boukhris     C 0 messages


Après avoir délogé Boko Haram lors d’une brutale attaque du 29 mars au 9 avril, le chef de l’Etat tchadien, Idriss Déby, annonce que ses troupes n’interviendront plus en dehors du Tchad aussi bien au sein de la Minusma qu’en appui de la force conjointe G5 Sahel.

A la suite de l’attaque de Boko Haram, du 23 mars 2020, contre une base militaire tchadienne sur le Lac Tchad, qui avait coûté la vie à une centaine de ses militaires, Idriss Deby Itno avait repris son bâton de commandant en chef de l’Armée.

Après son offensive guerrière, le président tchadien vient de décider de cesser d’envoyer ses militaires hors des frontières du Tchad.

La réplique sanglante d’Idriss Deby Itno


L’Opération « Colère de Bohoma », commencée le 29 mars 2020, s’est terminée, le jeudi 9 avril 2020. Cette offensive de grande ampleur de l’Armée tchadienne était à la mesure du désastre subi le 23 mars 2020. Les commandos tchadiens ont pourchassé et anéanti de nombreux groupes djihadistes de Boko Haram et de l’Etat islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP).

Leur offensive s’est poursuivie en pénétrant dans les territoires du Niger et du Nigeria. Le bilan dressé par Ndjamena est éloquent avec la neutralisation d »un millier de terroristes, la destruction de deux bases de Boko Haram et la saisie de nombreux engins logistiques et de matériels militaires. L’Armée tchadienne déplore 52 victimes au combat.

Le coup de colère

Cela faisait plusieurs mois que le chef de l’État tchadien dénonçait la faible collaboration des Etats subissant également les attaques de Boko Haram et des groupes de l’ISWAP, très présents aux abords du Lac Tchad. Créée en 2015 par les quatre pays riverains du Lac Tchad (Cameroun, Niger, Nigeria et Tchad), la Force Multinationale Mixte ( FMM) est peu opérationnelle.

Quant aux armées nationales du Cameroun, du Nigeria et du Niger, elles n’offrent pas le professionalisme et la bravoure des soldats tchadiens. De même, Idriss Deby Itno regrettait que les soutiens des alliés, dans la lutte contre le djihadisme au Sahel, étaient beaucoup plus déclaratoires qu’opérationnels.

Déjà au Sommet de Pau du13 janvier 2020, Idriss Deby Itno, était de mauvaise humeur. Il réclamait davantage de soutiens financiers et matériels. La lassitude d’Idriss Deby Itno s’est transformée en colère.

Des menaces à exécution


Après l’Opération « Colère de Bohoma », Idriss Deby Itno a immédiatement mis ses menaces à exécution. Jeudi 9 avril 2020, en arabe, il a déclaré solennellement : » Les soldats tchadiens sont morts pour le Lac Tchad et le Sahel. A compter d’aujourd’hui, aucun soldat tchadien ne participera à des opérations militaires en dehors du Tchad ».

L’annonce fracassante a été reprise, en français, le vendredi 10 avril 2020, par la télévision nationale.

Cette décision a peut-être été prise sur le coup de la colère. Si elle devenait irrémédiable, ses conséquences seraient considérables. Les contingents militaires tchadiens sont les plus nombreux et les mieux aguerris de la Mission des Nations Unies au Mali (MINUSMA) et de la Force conjointe du G5 Sahel dans la lutte contre les terroristes au Mali, au Burkina Faso et au Niger.

Les plusieurs milliers de soldats tchadiens de ces opérations militaires sont difficilement remplaçables. La décision d’Idriss Deby Itno signifierait aussi la fin de la Force Multinationale Mixte. Quant à la France, elle risque de perdre son meilleur allié dans l’Opération Barkhane, dont le quartier général est actuellement situé à Ndjamena. Un nouveau dossier brûlant pour Emmanuel Macron.

Au bord de l’explosion sociale


Ce n’est pas la première fois que le président tchadien menace et même décide de retirer ses militaires de théâtres d’opérations extérieures. Cette fois-ci, le contexte est plus dramatique. Le Tchad connaît une crise économique et financière sans précédent et va subir, de surcroît, les conséquences désastreuses de la pandémie du Covid-19 et de l’effondrement du prix du baril de pétrole.

La décision du chef de l’Etat tchadien est certes la résultante de l’absence de réactions à ses multiples demandes de soutiens aux efforts de guerre de son pays, mais elle est aussi probablement un appel retentissant pour sauver le pays de la banqueroute et au bord d’une explosion sociale qui risquerait de se propager au-delà de ses frontières.


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