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Erythrée : Dawit Isaak, arbitrairement détenu depuis 24 ans sans jugement dans l’opacité la plus totale

D 25 novembre 2025     H 05:00     A Reporters sans frontières     C 0 messages


Le journaliste suédo-érythréen Dawit Isaak ainsi que ses trois codétenus journalistes entament leur 24e année de détention sans jugement. Reporters sans frontières (RSF) s’alarme du silence inacceptable des autorités érythréennes sur le cas de ces plus anciens professionnels des médias détenus sans procès. L’organisation demande à la Suède et à la communauté internationale de tout mettre en œuvre pour faire cesser cette grave violation des droits de ces journalistes.

Il est derrière les barreaux depuis près d’un quart de siècle. Loin de sa famille et de ses amis, le journaliste suédois-érythréen, Dawit Isaak entame ce 23 septembre sa 24e année de détention au secret en Érythrée. De même que ses trois confrères érythréens Temesgen Ghebreyesus, Seyoum Tsehaye et Amanuel Asrat, ils sont aujourd’hui les journalistes les plus longtemps emprisonnés au monde sans procès depuis 24 ans, malgré les différents rappels à l’ordre de leurs soutiens partout dans le monde, et du groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire qui a déclaré leur emprisonnement comme arbitraire, il y a deux ans.

“Passer 24 ans derrière les barreaux sans jugement et sans contact régulier avec sa famille, ses amis et ses confrères est une situation intolérable qui s’apparente à une torture morale et psychologique entretenue par les autorités érythréennes. Elles démontrent ainsi à la communauté internationale qu’elles peuvent continuer à violer systématiquement et impunément les règles les plus élémentaires du droit. Cette détention arbitraire hors normes ne peut plus durer : Dawit Isaak, Temesgen Ghebreyesus, Seyoum Tsehaye et Amanuel Asrat doivent être libérés sans délai.”

Dawit Isaak a été arrêté le 23 septembre 2001 dans le cadre d’une vague de répression entamée par le président érythréen Issaias Afeworki, qui installait alors une dictature dans le pays, n’épargnant ni opposants ni médias indépendants. Setit, le bihebdomadaire pour lequel travaillait Dawit Isaak a été fermé et le journaliste a été arrêté dans la foulée. En 2005, il est libéré pendant deux jours avant d’être de nouveau arrêté. Depuis, aucun signe de vie.

RSF, aux côtés de sa section suédoise, mène un plaidoyer pour la libération de ce journaliste et de ses confrères avec lesquels il avait été arrêté. En septembre 2024, une nouvelle plainte pour crimes contre l’humanité contre le président de l’Érythrée a été déposée auprès du parquet suédois. L’organisation avait, de concert avec PEN Suède et le Centre Raoul Wallenberg pour les droits humains, publiquement interpellé les autorités suédoises “qui ne semblent pas vouloir écouter, et le ministère public suédois (SPA) qui semble faire la sourde oreille dans l’affaire Dawit Isaak”. Or, le pays s’était déjà positionné sur plusieurs autres cas, en faisant valoir, “après avoir reçu des plaintes, qu’une enquête serait impossible car l’Érythrée ne coopérerait pas.”

“Dawit Isaak et ses trois confrères sont les survivants des 11 professionnels des médias arrêtés en septembre 2001 et sont les journalistes détenus depuis le plus longtemps au monde sans procès. Cette brutalité doit cesser immédiatement. Ils doivent être libérés et l’interdiction des médias indépendants en Érythrée doit être levée. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a conclu que l’Érythrée violait 19 articles de la Déclaration des droits de l’homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dans le cas de Dawit Isaak. La Commission africaine des droits de l’homme a exigé que Dawit et ses confrères soient libérés et autorisés à retrouver leurs familles. Il faut mettre fin au mépris total d’Asmara pour l’humanité et la vie de nos confrères et de leurs familles, ainsi que pour les organismes internationaux. »

L’Érythrée est un pays totalement fermé à l’exercice du journalisme libre et indépendant. Pourtant, en octobre 2023, des officiels avaient présenté devant la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) à Arusha, en Tanzanie, la situation de la presse sous un jour favorable. En 2018, RSF avait déjà souligné “l’écart abyssal entre la situation décrite par les autorités érythréennes et la réalité”.

Aucun média étranger ou national n’est autorisé à exercer dans le pays. Ceux qui étaient accessibles depuis l’étranger ont été bloqués et les seuls “médias” existants sont ceux directement contrôlés par le ministère de l’Information, qui relaient la propagande du régime.

L’Érythrée occupe la dernière place au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2025 : il est 180e sur 180 pays et territoires.