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L’impact de la flambée du prix du charbon de bois sur les moyens de subsistance au Somaliland

D 30 novembre 2014     H 05:57     A IRIN     C 0 messages


HARGEISA - Dans la République indépendante autoproclamée du Somaliland, les familles vulnérables, y compris les personnes défavorisées et déplacées à l’intérieur de leur propre pays, sont durement touchées par les fortes augmentations du prix du charbon de bois, le combustible de cuisson principal dans la région.

Un sac de charbon de bois de 25 kg coûtait 90 000 shillings du Somaliland (13,84 dollars) en octobre - contre 60 000 shillings (9,23 dollars) en septembre. Le même sac était vendu 18 000 shillings (2,76 dollars) en 2007.

« Avant, nous achetions deux sacs de charbon de bois pleins par mois, mais à cause de l’augmentation du prix, nous achetons une jaqaf [boîte] par jour », a dit à IRIN Asha Ahmed, mère de cinq enfants. Une jaqaf contient le dixième d’un sac de 25 kg.

Dans la famille de Mme Ahmed, le charbon de bois représente 64 pour cent des dépenses quotidiennes ; il reste donc peu d’argent pour l’achat de la nourriture.

« Nous dépensons 9 000 shillings du Somaliland [1,38 dollar] pour le charbon de bois sur les 14 000 shillings [2,15 dollars] de nos dépenses quotidiennes. Les 5 000 shillings [76 cents] qui restent ne suffisent pas pour les trois repas par jour de la famille », a expliqué Mme Ahmed.

Selon les estimations d’une étude réalisée en 2007 par l’Académie pour la paix et le développement (Academy for Peace and Development, APD), 70 000 foyers à Hargeisa utilisaient 105 000 sacs de charbon de bois par mois pour un coût de 1,89 milliard de shillings (300 000 dollars).

« Lors de nos recherches en 2007, nous avons découvert une carrière de production de charbon de bois à Odweyne [capitale régionale de Daad-Madheedh] où chaque jour, plus de 3 000 arbres étaient entièrement brûlés pour en faire du charbon de bois », a déclaré à IRIN Omar Aden Yusuf, chercheur à l’APD.

Les régions les plus touchées sont Sanaag et Badhan, dans l’est du Somaliland. « La pire dégradation de l’environnement concerne Sanaag et Badhan, car le charbon de bois produit là-bas est acheminé par camion jusqu’à Bosaso [sur la côte], où il est ensuite exporté vers les pays du Golfe », a ajouté M. Yusuf.

Depuis 2007, le nombre de foyers à Hargeisa a plus que doublé, d’après les estimations du gouvernement, et les foyers urbains utilisent en moyenne deux sacs de charbon de bois par mois, ce qui leur revient à environ 27,69 dollars.

Pourquoi cette pénurie ?

Les faibles réserves de charbon de bois seraient dues à la dégradation de l’environnement et aux efforts du gouvernement pour en limiter le commerce.

« Deux raisons expliquent la hausse du prix du charbon de bois : les amendes imposées aux marchands de charbon de bois par l’État et [la seconde est] le manque d’arbres à brûler pour produire du charbon de bois », a expliqué Ahmed Abdillahi, expert de l’environnement.

Toute personne qui coupe des arbres pour en faire du charbon de bois encourt une amende de 2 500 shillings (38 cents) par sac, d’après la législation du Somaliland de 1998 relative à l’environnement. Comme de plus en plus d’arbres verts sont coupés, le gouvernement entend durcir les sanctions.

Les maigres bénéfices poussent également les marchands de charbon de bois à abandonner le secteur, ce qui a un impact sur les réserves. « Nous ne pouvons plus continuer le commerce du charbon de bois, car si l’on vend chaque sac acheté 70 000 shillings (10,76 dollars) au prix de 80 000 shillings (12,30 dollars), demain ce sera 88 000 shillings (13,56 dollars) », a affirmé Yusuf Mohamed Ali, un marchand de charbon de bois à Hargeisa.

Peu de solutions de remplacement

Les stratégies à plus long terme qui visent à diversifier le nombre de sources d’énergie abordables au Somaliland n’ont pas encore décollé. En 2011, le gouvernement prévoyait d’investir dans les sources d’énergie solaire, au charbon et au gaz.

« Le gouvernement s’emploie à trouver des solutions pour remplacer le charbon de bois, car cela a déjà un impact négatif sur l’environnement au Somaliland, et l’ensemble de nos forêts se sont transformées en déserts », a déclaré Shukri Ismail H. Bondare, ministre de l’Environnement et du Développement de l’élevage du Somaliland. « Le gouvernement du Somaliland a détaxé les réchauds à GPL [gaz de pétrole liquéfié] et à kérosène, afin de résoudre ce problème », a-t-il ajouté.

Le gouvernement prévoit de mettre en place des facilités de crédit pour permettre à plus de personnes d’acquérir des poêles à pétrole, a déclaré M. Bondare, indiquant que le kérosène pouvait aussi être détaxé.

L’adoption de sources d’énergie nouvelles se fait lentement.

« J’ai acheté un réchaud à kérosène pour ma famille, car c’est moins cher que le charbon de bois. Depuis, ma famille utilise un litre de combustible par jour, ce qui coûte 7 000 shillings (1,07 dollar) », a déclaré Aw Isse Ahmed, père de sept enfants, à Hargeisa.

Mais les habitants continuent de préférer le charbon de bois. « Les habitants du Somaliland ne cesseront jamais d’utiliser des poêles à charbon pour cuisiner, sauf si les circonstances de la vie les obligent à trouver d’autres solutions, parce qu’ils ont toujours eu l’habitude d’utiliser du charbon de bois », a déclaré Ali Sh, un étudiant de l’Université d’Hargeisa.

Le manque de communication et de visibilité est aussi un problème. « Nous ne savons pas comment utiliser le kérosène ou le GPL, alors que nous savons utiliser le charbon de bois », a déclaré Amina Omar, une mère de famille âgée qui vit à State House, le plus grand camp pour personnes déplacées d’Hargeisa.

Les autorités du Somaliland demandent de l’aide à la communauté internationale.

« Nous prions la communauté internationale de nous aider à acquérir des énergies de cuisson alternatives, telles que le kérosène, le GPL et l’énergie solaire », a déclaré le ministre, M. Bondare.