Vous êtes ici : Accueil » Afrique de l’Est » Somalie » SOMALIE : La famine affecte surtout les femmes et les enfants

SOMALIE : La famine affecte surtout les femmes et les enfants

D 2 septembre 2011     H 05:20     A IRIN     C 0 messages


MOGADISCIO/NAIROBI/DADAAB - Au moment même où les Nations Unies viennent d’annoncer que la famine s’était étendue à plusieurs autres régions du sud et du centre de la Somalie, des communiqués provenant de la capitale, Mogadiscio, indiquent que la détresse des personnes déplacées par la sécheresse, des femmes et des enfants surtout, était encore en train de s’aggraver ; selon certains rapports, les forces gouvernementales et les milices d’Al-Shabab entraveraient la distribution de l’aide dans les régions qui sont entre leurs mains.

« La situation est telle que la majorité de ceux qui atteignent Mogadiscio sont des femmes et des enfants, parce que la plupart des hommes sont restés dans les régions contrôlées par Al-Shabab, de peur de se faire arrêter par les forces gouvernementales comme partisans d’Al-Shabab, » a dit à IRIN Su’di Mohamed Ali, directeur de l’administration et des finances au ministère de la Promotion de la Femme et des Affaires familiales. « C’est souvent Al-Shabab même qui empêche les hommes de se rendre dans des zones contrôlées par le gouvernement.  »

Anbiya Abdulkadir Osman, mère de cinq enfants, a dit à IRIN que son mari avait été abattu le 27 juillet par un milicien d’Al-Shabab près d’Afgoye, « après avoir refusé d’obéir aux miliciens qui lui avaient interdit de partir avec nous. Maintenant, je suis toute seule ; je vis dans la rue, sans nourriture, sans abri ni eau. Je prie Dieu de m’envoyer de l’aide. »

Ali Barre Hirsi, connu aussi sous le nom d’Ali-Gab, commandant de la Division centrale de la police de Mogadiscio, a indiqué : «  .C’est notre devoir bien sûr d’assurer la sécurité dans les régions contrôlées par le gouvernement, comme Mogadiscio ; nous arrêtons les suspects et nous les remettons à la justice. Jusqu’à présent, nous avons arrêté plusieurs suspects qui accompagnaient les personnes déplacées par la sécheresse et nous les avons transférés à l’agence du renseignement, afin de vérifier leur appartenance présumée à Al-Shabab. Ils seront traduits en justice dès que les investigations seront terminées. »

Rejetant comme infondées les accusations de détournement de vivres par les forces du gouvernement, M. Hirsi a dit que la police n’interférait pas avec la distribution de l’aide, mais qu’elle « ne faisait qu’assurer la sécurité des camps de PDI ». Un PDI avait indiqué à IRIN que les forces gouvernementales s’emparaient de l’aide alimentaire fournie par les organisations humanitaires.

La pire crise humanitaire

Le 3 août, les Nations Unies ont annoncé que trois nouvelles régions du sud de la Somalie - certaines zones de la région de Shabelle, le Corridor d’Afgoye et une partie de Mogadiscio - avaient atteint l’état de famine.

Le Corridor d’Afgoye, situé à 25 kilomètres à l’ouest de Mogadiscio, aurait accueilli, selon les estimations, 400 000 PDI depuis 2007.

D’après le Réseau des systèmes précoces d’alerte contre la famine [ http://www.fews.net/docs/Publications/FSNAU_FEWSNET_030811press release_final.pdf ] (FEWS NET), la situation [actuelle] de la sécheresse représente la crise humanitaire la plus sévère dans le monde aujourd’hui et la pire crise en termes de sécurité alimentaire en Afrique depuis la famine des années 1991-1992 en Somalie.

Le 20 juillet, les Nations Unies ont décrété l’état de famine dans les régions de Basse-Shabelle et du sud de Bakool [ http://www.irinnews.org/fr/ReportFrench.aspx?reportid=93289 ] dans le sud de la Somalie, indiquant que la situation pourrait encore empirer parce que les effets de la sécheresse étaient exacerbés par l’insécurité, le manque d’aide et l’inflation des prix alimentaires.

La mise à jour de l’enquête nutritionnelle prévue pour le 8 août confirmera probablement l’extension de la famine aux régions de Gedo et de Bay, dans le sud et le centre de la Somalie, a dit Grainne Moloney, conseillère technique en chef de l’Unité d’analyse de la sécurité alimentaire et de la nutrition de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO/FSNAU) pour la Somalie.

La dernière enquête de la FSNAU avait enregistré des taux de malnutrition aiguë globale (MAG) de plus de 50 pour cent dans certains endroits de Bay et de Gedo, a-t-elle expliqué. « La situation là-bas s’est probablement détériorée. » Un taux de MAG supérieur à 10 pour cent signifie en général une situation d’urgence [ http://www.irinnews.org/report.aspx?reportid=93128 ] . Les données nutritionnelles et les taux de mortalité brute en Somalie sont les pires qui aient été enregistrés presque partout dans le monde au cours des 20 dernières années, a confirmé Mme Moloney, « à l’exception peut-être de la Corée du nord [dans les années 1990], mais nous n’avons pas vraiment de données correctes pour ce pays. »

La FSNAU a confirmé le 3 août sur la base des données nutritionnelles qui manquaient [à la dernière enquête], que la famine s’était étendue. « Nous attendions les résultats concernant ces zones, » a t-elle dit. La distribution de l’aide dans toutes les régions qui constituent maintenant la zone de famine reste problématique en raison de la mainmise d’Al-Shabab sur la région.

Mme Moloney a exhorté la communauté des donateurs à maintenir un flux régulier d’aide humanitaire pendant encore au moins 18 mois. « Les prochaines pluies sont attendues en octobre, mais les récoltes ne seront pas arrivées à maturité avant janvier [2012]. Les gens ont perdu tous leurs animaux et les prix alimentaires sont extrêmement élevés ; il faudra donc au moins trois ou quatre saisons pour remonter la pente. Les conditions de la famine ne risquent pas de disparaître dans l’immédiat. »

Les responsables des organisations locales de la société civile tentent difficilement de trouver de quoi abriter et nourrir les personnes déplacées arrivant à Mogadiscio.

« Ici nous avons quelque 250 familles. Nous avons distribué des abris pour 100 d’entre elles et nous continuons à chercher des abris pour les 150 familles restantes, » a dit Mohamed Abdi Dhodo, un des responsables d’Abyan Organisation, une organisation non gouvernementale (ONG) locale. « Pour ce qui est de la nourriture, nous leur donnons à manger une fois par jour. Nous utilisons au moins trois sacs [de 50 kilos chacun] de riz par jour, mais nous n’avons reçu que 25 sacs des organisations humanitaires internationales. Notre problème est que nous n’avons aucun médicament pour les enfants et les mères malades. »

La détérioration de Dadaab

On estime que quelque 400 000 Somaliens ont trouvé refuge dans les camps de Dadaab, dans le nord-est du Kenya. La situation se détériore rapidement du fait que des centaines de personnes continuent à arriver chaque jour, mettant à rude épreuve les services de base dans des camps déjà débordés.

Dans ces camps, des habitants à long terme qui ont ouvert des petits commerces, ont dit à IRIN que les prix alimentaires avaient plus que doublé et que le nombre de leurs clients diminuait.

« La vie devient très difficile : Nous achetons aujourd’hui le kilo de sucre à 120 shillings kenyans [1,20 dollars], contre 70 shillings il y a quelques jours, » a dit à IRIN Omar Jelle, père d’un enfant , qui a aussi la responsabilité de huit membres de sa famille.

Le début du Ramadan, un mois sacré de jeûne pour les musulmans, au début août n’a fait qu’aggraver la situation pour les nombreuses familles de réfugiés qui sont obligées d’accepter de nouveaux arrivants tous les jours.

« Chaque famille accueille au moins deux [nouvelles] familles dans un emplacement censé correspondre aux besoins d’une seule famille, » a indiqué un réfugié. « Tandis que les nouveaux arrivants attendent de se faire enregistrer et de recevoir de la nourriture, ils partagent le peu dont disposent les anciens réfugiés, y compris le peu d’eau disponible. »

Dans le même temps, les communautés kenyanes locales qui vivent aux alentours des camps de Dadaab ont exprimé leurs inquiétudes face à l’augmentation incessante du nombre de réfugiés. Les locaux disent que les nouveaux arrivants s’installent sur les terrains dont ils se servent habituellement pour faire paître leurs troupeaux.

En outre, les locaux se plaignent d’un manque de soutien de la part des agences humanitaires qui assistent les réfugiés. « Nous pensons que nous devons être pris en considération, car nous aussi sommes affectés par la sécheresse, » a dit à IRIN Jama Ali, un habitant de Dadaab.

Source : http://www.irinnews.org