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Côte d’Ivoire : La mort de Gon Coulibaly met à nu les manœuvres du clan Dramane Ouattara

Par T. Briga

D 18 juillet 2020     H 12:34     A T.Briga     C 0 messages


Amadou Gon Coulibaly est décédé. C’est la condition de notre existence à tous. Les êtres naissent avec un ticket de loto de la mort en mains. Les uns prennent leur gain très tôt, les autres, le plus tard possible. Mais c’est le seul loto, où tout le monde gagne toujours à la fin.

Le bal des faux culs.

Gon est mort de maladie. "Il le savait lui même, tout le monde sait, il avait une santé fragile" dixit dame Kandia Camara le 9 juillet 2020 à la TV du régime.

Rien n’interdit donc de supposer que c’est la raison principale pour laquelle il a été préféré aux autres postulants. Gon constituait dès lors une pièce maîtresse dans une stratégie de conservation du pouvoir du clan installé depuis avril 2011.

Sa disparition compromettrait l’aboutissement d’un plan concocté de longue date. Pour la réussite de celui-ci, il incombait au clan de veiller, coûte que coûte, que ce dauphin particulier, arrive sain et sauf aux élections du 31 octobre 2020 et tienne jusqu’à la nomination de son vice-président et après basta.

On comprend mieux pourquoi des sommes colossales provenant des impôts des ivoiriens, ont été englouties pour le soigner dans les meilleurs hôpitaux français. Dommage que Bohoun Bouabré, Jean-Jacques Béchio, Ben Soumahoro et bien d’autres n’aient pu bénéficier du même privilège.

Gon Coulibaly et le pouvoir Dramane, qu’il servait obséquieusement avaient peut-être décidé que ces personnes n’avaient pas le droit de vivre. Que deviennent les auteurs du meurtre à Korhogo du jeune manifestant Kognon Soro, la ville du premier ministre Gon ? Ils courent toujours.

Malgré ces soins onéreux, Gon Coulibaly a rendu l’âme. Cette mort semble être arrivée trop tôt, car elle bouleverse totalement le plan d’Alassane Dramane. La disparition de ce comparse rebat les cartes. Dramane doit improviser et sans doute sortir du bois.

Les faux culs, les hypocrites se sont mis à pleurer avec leurs tombereaux d’éloges. Le titre de "grand homme" attribué à Gon, contraste d’avec la cruauté de certains des actes qu’il a personnellement posés ou dont il a été complice. Il a été un comparse servile, au service du mal.

Quelle a été la part de sa maladie dans son choix, on ne le saura peut-être jamais, il ne nous reste que des suppositions ; quand on sait que l’article 62 nouveau prévoit qu’"en cas de vacance de la Présidence de la République par décès ou empêchement absolu du Président de la République, le Vice -président devient Président de la République" (...).

Avant de choisir ce figurant, Dramane a pris soin de trifouiller en 2020, certains articles de sa discutable constitution de 2016, notamment les articles 55 ; 62 ; 79. Le but, par ce subterfuge, conserver le pouvoir dans un semblant de légalité, sans que cela n’éveille de soupçons de magouilles. La chronologie ci-dessous semble indiquer que tout a été planifié.

Un bouche-trou.

Le 5 mars 2020, sur injonction de ses employeurs français qui refusaient de renouveler son bail de cinq ans à la tête de l’Etat ivoirien, Dramane Ouattara a renoncé à un troisième mandat par une mise en scène grotesque. En réalité, derrière cette comédie de façade se cachait un plan diablement réfléchi pour ne pas lâcher le pouvoir. Cette technique aussi vieille que le monde, consiste à choisir un figurant souvent diminué physiquement et le manipuler tel un pantin.

Gon Coulibaly a subi une lourde transplantation cardiaque en juillet 2012. Ce type d’opération laisse de très graves séquelles. Malgré cet état de santé, c’est lui qui a été choisi contre toute logique pour être le candidat du rhdp. Son décès interroge a posteriori sur les vraies raisons de sa désignation. Quelle a été la part de sa maladie dans ce choix, on ne le saura peut-être jamais, il ne nous reste que des suppositions ; quand on sait que l’article 62 nouveau prévoit qu’"en cas de vacances de la Présidence de la République par décès ou empêchement absolu du Président de la République, le Vice -président devient Président de la République" (...).

Les missions de Gon, une fois déclaré vainqueur par la CEI aux ordres, pourraient se résumer à remettre la réalité du pouvoir au clan en s’appuyant sur des articles modifiés juste avant qu’il ne soit adoubé. Que disent ces articles modifiés pour les besoins de la cause ?

L’article 55 de la Constitution du 08 novembre 2016 énonce que :

"Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct (…). Il choisit un vice président de la République, qui est élu en même temps que lui. (...) " Sa légitimité lui vient du peuple à qui il rend compte.

Cet article 55 a été modifié et publié au j.o du 19 mars 2020. Dans sa nouvelle mouture, l’article 55 nouveau, stipule que :

"Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. (…). Il choisit un vice président de la République, en accord avec le Parlement. (...)" Dans ce deuxième cas, le vice-président se trouve dans une situation bâtarde de soumission et de dépendance, surtout que le nouvel article 79 de 2020, l’oblige à faire acte d’allégeance au président qui l’a désigné en ces termes : "Je jure (...) Que le Président de la République me retire sa confiance si je trahis mon serment"

Cette modification en apparence anodine est le ver placé dans le fruit pour favoriser toute digression légale, comme dirait l’autre, le diable est dans le détail.

Le président élu nommera la personne à qui il doit son élection ou son protégé. Dans la configuration actuelle de la Côte d’Ivoire où Dramane Ouattara a désigné et imposé unilatéralement ce bouche-trou de Gon, il ne peut être exclu que des arrangements peu recommandables aient présidé à cette désignation. Un compromis a certainement été conclu, mais lequel ?

Nommer un Ouattara Vice-président.

On peut imaginer qu’en imposant Gon Coulibaly comme le candidat du rhdp, une fois déclaré vainqueur à la suite d’élections truquées, ne soit obligé de nommer un membre du clan Ouattara. Dramane lui-même ou son frère Téné B. alias photocopie.

Le petit frère de Dramane est réputé posséder plusieurs casquettes. Ministre de son frère par népotisme, serait à la tête d’une armée parallèle de tueurs tout en gérant les fonds de souveraineté ivoiriens dans une opacité totale. La Lettre du Continent qui avait dénoncé ce scandale n’a pas été poursuivie en justice pour dénonciation calomnieuse, contrairement aux braiments du régime.

Son accession au pouvoir d’Etat par ce truchement, transformerait la République de Côte d’Ivoire en un petit royaume dans lequel la dynastie des Dramane s’arrogerait tous les droits de petits roitelets. Malheureusement pour eux, les forces qui régissent l’univers ont décidé qu’il en serait autrement.

Le décès de Gon a mis à nu les calculs machiavéliques du clan de Dramane. Le voici, lui qui croyait manoeuvrer dans l’ombre, obligé de sortir de sa cachette, pour prendre les choses en mains pour la survie de sa famille.

La situation de la Côte d’Ivoire demeure d’autant incertaine, qu’elle n’est pas seule à décider du choix de ses dirigeants. Depuis 1960 et même avant, la France a toujours décidé des dirigeants qu’elle voulait pour la Côte d’Ivoire. Le dernier exemple en date n’est autre que Sarkozy qui avec des armes, a imposé Dramane aux Ivoiriens.

De ce point de vue, la présence du ministre français Le Drian en ce moment en Côte d’Ivoire, ne peut qu’inquiéter tout esprit qui aspire à être maître de son destin.

Contribution de T. Briga