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Côte d’Ivoire : Ouattara ou le pouvoir illusoire

D 6 août 2011     H 22:41     A Paul Martial     C 0 messages


C’est avec luxe et ostentation que Ouattara s’est fait investir Président de la République ; les milliers d’euros engloutis dans cette cérémonie paraissent bien indécents au regard de la situation désastreuse des populations suite aux affrontements violent dont Gbagbo et Ouattara furent les protagonistes.
Après avoir vaincu le camp Gbagbo, suite à une victoire électorale contestée, avec l’aide des troupes de l’ONU et de la France, les vraies difficultés commencent pour Ouattara.

En effet les partisans de l’ex gouverneur de la BCEAO sont hétéroclites, il y a les anciens rebelles, les Forces nouvelles, qui dirigent la partie nord du pays depuis la tentative ratée du coup d’état de 2002 qui se reconnaissent dans Guillaume Soro du moins officiellement.

Ces Forces nouvelles rebaptisées avant l’offensive, du nom moins partisan des Forces Républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) sont dirigés par des Commandants de Zone ou ComZones. Ils règnent en maître et profitent de leur pouvoir absolu pour s’enrichir par le racket de la population, par des investissements y compris dans des opérations économiques dont la légalité apparaît plus que douteuse.
Ouattara a déclaré, lors de son investiture, qu’il voulait que la Côte-d’Ivoire devienne un pays de droits. Si cette déclaration est autre chose qu’un effet d’annonce, son travail risque d’être long et compliqué. Cela implique déjà qu’il fasse le ménage dans son propre camp, ce qui est loin d’être gagné. Rétablir les prérogatives de l’Etat revient à ôter le pouvoir politique et donc économique des FRCI sur toute la partie nord du pays, alors que ces derniers tentent, par ailleurs, de reproduire à Abidjan ce qu’ils font dans leur fief.

De plus les FRCI sont loin d’être unis et beaucoup de spécialistes ont noté l’absence de coordination entre les différents chefs de guerre lors de la prise d’Abidjan. Des divergences qui risquent donc de se régler de manière violente, à l’image des affrontements qu’il y a eu entre les forces loyales à Soro et ceux du Commando Invisible qui menait des opérations de guérilla à Abidjan contre les troupes de Gbagbo avant la venue des FRCI.

Ces combats violents, à l’arme lourde entre les FRCI et les hommes du commando invisible, ont causé la mort de leur dirigeant Ibrahim Coulibaly, qui pourtant s’était rallié à Ouattara, mais se posait en concurrent de Soro.
Après les vaines tentatives d’étouffement, l’ONUCI a essayé de relativiser les crimes de guerre des FRCI mais la pression des grandes organisations de défense des droits humains ont eu raison de ces manœuvres. Ouattara s’était alors engager à poursuivre touts les coupables à ce jour seuls les hommes de Gbagbo sont inquiétés.

Deuxième tension, cette fois du côté politique. Lors du second tour, une alliance électorale s’est nouée entre Konan Bedie, candidat du RDPCI arrivé en 3e position, et le FDR de Ouattara ; ce dernier a offert la primature à un membre issu du RDPCI. Promesse toujours non honorée puisque Soro continue à cumuler les postes de premier Ministre et de Ministre de la défense. Certes, en échange, Ouattara s’est montré généreux avec les caciques du Parti fondé par Houphouët Boigny en leur offrant les directions de la société pétrolière Pétroci, de Versus Bank, du journal Fraternité Matin, du port d’Abidjan, de la Société de raffinage (SIR) etc. Mais tout de même dans le camp Bedié des voix s’élèvent pour demander l’application immédiate de l’accord.
Dépendant militairement des FRCI de Soro, politiquement du RDPCI de Bédié, Ouattara est redevable aussi à la France qui fut d’une aide décisive, pas seulement pour la capture de Gbagbo, mais tout le long de l’offensive militaire. Avec un prêt de 400 millions d’euros les multinationales françaises espèrent rafler les marchés de la reconstruction du pays
Le maintien du positionnement militaire de la France en Cote d’Ivoire indique bien que le nouvel élu est totalement soumis à la France et à ce titre rien ne lui sera refusé. Ainsi le retour sur investissement de l’intervention militaire est assuré pour le plus grand profit des multinationales françaises et pour le plus grand malheur des populations ivoiriennes.

Paul Martial