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MALI : la France fait le forcing pour une intervention militaire

D 18 novembre 2012     H 11:04     A Moulzo     C 0 messages


La communauté internationale se dit solidaire du peuple
malien. En effet, de hauts responsables étrangers,
rassemblés le 19 octobre au Mali pour afficher leur soutien
aux Maliens ont déclaré nécessaire « l’organisation d’élections
libres régulières et transparentes au cours du premier trimestre
de l’année 2013 ». Les dés sont donc jetés, il y aura bien une
guerre de libération et ce avant la fin de l’année 2012.

D’ailleurs, le président par intérim du Mali, Dioucounda Traoré,
exige d’ores et déjà la levée des sanctions et demande une
intervention imminente pour permettre au Mali de retrouver son
intégrité territoriale. La présidente de la commission de l’Union
Africaine, la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini Zuma va aussi
dans le même sens en déclarant qu’« il faut envisager une
intervention militaire ».

De son côté, la France, ancien pays colonisateur du Mali fait le
forcing au Nations unies. Le 25 septembre, lors du débat
d’ouverture de la 67e session de l’assemblée générale des
Nations unies, le président de la République française François
Hollande annonçait la couleur : « La situation créée par
l’occupation d’un territoire au Nord Mali par des groupes
terroristes est insupportable, inadmissible, inacceptable, pas
seulement pour le Mali qui est affecté par ce mal terroriste mais
pour tous les pays de la région et au-delà de la région, pour tous
ceux qui peuvent être frappés un jour par le terrorisme. Les
autorités du Mali viennent de nous saisir. Alors il n’y a pas de
temps à perdre. La France soutiendra toutes les initiatives
permettant que les Africains eux-mêmes règlent cette question
dans le cadre de la légalité internationale avec un mandat clair du
Conseil de sécurité. Oui, il faut que le Mali retrouve l’intégrité de
son territoire et que le terrorisme soit écarté de cette zone du
Sahel. » . Le lendemain, ce sera au tour du Premier ministre du
Mali Modibo Diarra d’en remettre une couche : « La présence de
groupes terroristes de différentes nationalités au Mali et dans le
Sahel est une situation qui doit mobiliser toute la communauté
internationale pour une action concertée, rapide et efficace. ».
Mais l’Onu reste prudente d’autant plus que les États-Unis sont
plutôt soucieux du retour à l’ordre institutionnel. Hillary Clinton, la
secrétaire d’État américaine pense que « seul un gouvernement
démocratiquement élu aura la légitimité pour parvenir à une
résolution négociée au Nord ». Son analyse est d’ailleurs
partagée par le secrétaire général des Nations unies, Ban-Ki-
Moon, pour qui « toute solution militaire pourrait avoir de
graves conséquences humanitaires ».

Le Mali, qui refusait toute présence militaire sur son sol, a
maintenant changé de position certainement sous la pression
française. Au mois d’août, lors de sa tournée africaine, le
ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, avait évoqué la
crise malienne avec le dictateur tchadien Idriss Deby Itno. « Le
diagnostic fait par le président Déby sur la situation au Nord
Mali est un diagnostic très sévère. Le président Déby a constaté
que le développement du terrorisme dans cette région constitue
une menace pour l’ensemble des pays de la sous-région. » Bien
évidemment, on peut se fier à l’analyse stratégique de ce pion
de la Françafrique qui s’y connait très bien en matière de guerre
en zone sahélienne.

De son côté, Blaise Compaoré, médiateur officiel de la CEDEAO
sur la crise malienne, recevait au début du mois d’octobre des
représentants du MNLA (Mouvement national de libération de
l’Azawad), chassés du Nord du Mali par les islamistes et réfugies
depuis à Ouagadougou. Un mois auparavant, le nouveau « 
sage » de l’Afrique était reçu à l’Élysée par François Hollande.

Pourtant, la France n’est pas sans savoir qui est Blaise
Compaoré, un dictateur, en place depuis 25 ans et compromis
dans de nombreuses affaires politiques et criminelles non
résolues, comme l’assassinat de son prédécesseur Thomas
Sankara et impliqué dans la déstabilisation de la région lors du
conflit libérien. Bien évidemment, François Hollande qui semble
valider la diplomatie décomplexée de Sarkozy en recevant les
dictateurs Ali Bongo et Blaise Compaoré n’a cure des états d’âmes
des Burkinabés et des Gabonais qui souffrent depuis 25 ans pour
les uns et depuis l’indépendance pour les autres. Pour que la
Françafrique perdure, les bons serviteurs africains doivent être
récompensés et soutenus.

Les islamistes d’Aqmi ne s’y trompent d’ailleurs pas. Pour eux, la
France est à la tête d’une coalition portée par ses alliés locaux.
Selon Yahya Abou El Hamame, nouvel émir d’Aqmi, « l’Occident a
adopté une nouvelle stratégie pour mener "des guerres par
procuration [...] après l’échec de ses interventions directes en
Afghanistan et ailleurs et il "agit aujourd’hui par l’intermédiaire de
ses acolytes locaux », allusion aux États ouest-africains. Le chef
islamiste menace directement la France à travers ses otages
français détenus depuis de longs mois dans le Nord du Mali. « Je
veux dire aux familles des otages que l’option de guerre,
apparemment décidée par M. Hollande, signifiera nécessairement
qu’il aura signé l’arrêt de mort des otages français. [...] M.
Hollande en supportera tout seul la responsabilité », a-t-il déclaré,
accusant le chef d’État français d’avoir « choisi l’escalade plutôt
que la négociation ». Par ailleurs, le jeu de l’Algérie dans cette
crise n’arrange pas la stratégie guerrière de la France car Alger est
contre toute intervention militaire dans le Nord du Mali.

En attendant, le peuple malien à qui personne n’a demandé son
avis souffre en silence de la perte des deux tiers de son territoire
et des sanctions imposées par la communauté internationale. Il
semble qu’il passera une fin d’année sous les bombes de la
coalition africaine, avec le soutien logistique (et certainement
militaire) de la France et de l’Occident, ainsi que l’aval de l’Onu.
Ensuite, comme en Côte-d’Ivoire, les entreprises françaises
pourront continuer à l’exploiter comme avant avec le soutien
logistique de la Banque Mondiale et du FMI. Alea jacta est, le sort
en est jeté !

Moulzo