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Algérie : "Mazal Keyen L’espoir"...Cheb Hasni.

D 21 mars 2022     H 07:30     A Adel Abderzak     C 0 messages


La neutralisation du hirak est une réalité amère mais la "normalisation" de la société ne l’est pas encore ! La répression portée par un article 87-bis qui criminalise tout acte d’opposition ou d’activisme antisystème a certainement brisé la chaine de mobilisation et d’espérances. La résignation et l’envie de partir travaille jeunes et moins jeunes. "L’Etat profond" a gagné un sursis mais a définitivement perdu la société.

Son incapacité à trouver un modèle alternatif à la crise économique et sociale structurelle et répondre aux attentes d’une jeunesse désenchantée le poussera à s’enfermer dans les scénarios autoritaires faciles et amplifier sa violence politique envers la société. Malgré le reflux du hirak réprimé, ce dernier a installé une prise de conscience citoyenne et une politisation anti-systémique impressionnante.

Il y’avait beaucoup d’émotionnel certes mais il y’avait aussi du rationnel, ce besoin d’agora, cette attente de se forger une idée, une conviction, une utopie. Les relais politico-élitistes n’étaient pas la ou trop faibles pour maturer tout ca dans un projet politique fondateur d’une Algérie démocratique et sociale. La responsabilité est collective.

On peut écrire des bouquins, organiser des colloques ou multiplier des pétitions pour comprendre mais écrire une nouvelle histoire pour l’Algérie faite de démocratie et d’émancipation sociale exige engagement, éthique militante, permanence dans les luttes mais aussi se libérer des égos, des jeux de pouvoir et d’overdose d’idéologisation qui sont souvent des facteurs bloquants dans tout mouvement social ou politique. Le hirak est en train de payer pour ça. Les réseaux sociaux ont été le tremplin toxique pour ça. Même la diaspora parisienne ou canadienne n’est pas épargnée.

Il y’a de quoi être sceptique c’est vrai. Les propos très pessimistes et même de rejet de certains activistes profondément engagés dans le hirak ne peuvent être occultés c’est vrai aussi. N’empêche que nous avons plus de 300 detenus.es sur la conscience à libérer par la permanence de notre engagement. N’empêche que nos jeunes mérite travail, études, culture et plaisirs de la vie et non désenchantement et harga et l’Algérie citoyenne n’a pas le droit de les lâcher.

N’empêche que nos filles, femmes et mères méritent mieux que les féminicides, les violences conjugales et la soumission à l’ordre social patriarcal et misogyne amplifiés par des clercs inquisiteurs d’un nouveau temps. N’empêche qu’une Algérie digne doit s’occuper de son prolétariat émietté, précarisée et sous payé dans des entreprises privées et publiques où des oligarques vulgaires font la pluie et le beau temps...et surtout beaucoup d’argent.

La société algérienne entre dans un nouveau cycle où la recherche d’une identité sociale, politique et culturelle doit aboutir à une modernité faite de démocratie et de libération sociale. C’est un cycle certainement long où luttes politiques, mouvements sociaux, pensées critiques seront aussi nécessaires que l’effet universalisant des pulsions émancipatrices qui viennent du monde entier. La génération qui a fait la lutte de libération est presque partie. Celle qui a porté les luttes post-indépendantes est en train de partir. Celle qui a fait mai 68, les révolutions latino-américaines ou les velléités d’un pouvoir ouvrier et autogestionnaire en Algérie après 62 nous disent adieu tous les jours. Le seul espoir d’une Algérie repensée et libérée viendra de cette minorité de jeunes que le hirak a rendu visible. Une jeunesse qui recherche un fil conducteur, une transmission de mémoire fertile et une identité existentielle où le local, le national et l’universel produise cette mixture émancipatrice pour cette Algérie abimée mais si chère à nos cœurs. Wellah mena habsine !

Adel Abderezak