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Egypte/Israël/Palestine – Le mur de la honte

D 18 février 2010     H 16:47     A Sellouma     C 0 messages


Dans le conflit israélo-palestinien, on oublie parfois à quel
point les pays arabes jouent un rôle déterminant, ce qui est le
cas de l’Égypte. Durant le siège de Gaza et l’offensive de l’armée
israélienne de l’année dernière, l’armée égyptienne a été maintes
fois déployée pour interdire l’accès à tout produit de première
nécessité : médicaments, nourriture, et même électricité. Nous
avons également pu constater le rôle actif qu’a joué le régime de
Moubarak pour empêcher la tenue de la marche internationale
pour Gaza.
Une fois encore, l’Etat égyptien ne lésine pas sur les moyens
financiers pour étouffer Gaza. En ce moment, sur la bordure de
Rafah, un mur souterrain est en construction pour empêcher et
détruire tout commerce. En effet, depuis le blocus de 2007
imposé par Israël, le principal moyen qu’ont trouvé les Gazaouis
pour survivre a été de creuser des tunnels. Or, le nouveau mur
souterrain prévoit la mise en place d’une série de panneaux en
métal de 13,8 km de long, équipés de capteurs pour détecter
tout mouvement. Il est intéressant de noter que les Etats-unis
apportent une aide logistique au niveau de la détection, et ce
depuis qu’un contrôle farouche est exercé à la frontière de Rafah.
Enfin, pour empêcher toute tentative de creuser en dessous de
ce mur, il est prévu de noyer le sous-sol en acheminant de l’eau
de mer à travers la frontière, à 30 mètres sous le sol. Cette
mesure va aussi à l’encontre des intérêts de la population locale
égyptienne, car non seulement ils ne profiteront plus du
commerce souterrain, mais en plus les terres, gâchées par l’eau
salée, ne seront plus cultivables.
Dans un premier temps, après avoir eu vent de l’information,
des officiels du Hamas ont contacté des responsables égyptiens
sur le sujet, et tenté de négocier. Ces derniers ont d’abord nié les
faits. Ensuite, par la voix du ministre des affaires étrangères, on
apprend que pour des raisons de « sécurité nationale », un mur a
été construit. En plus de jouer la carte de la lutte anti-terroriste
et anti-Hamas, les arguments invoqués reposent sur une vulgate
nationaliste, dernier rempart pour empêcher que le régime
explose, et ultime argument pour justifier sa collaboration avec
Israël.
La région, pas seulement la Palestine, est en état de guerre,
guerre dans laquelle les acteurs sont épisodiquement sommés de
prendre position. Le mur souterrain est symptomatique d’une
volonté de contenir à tout prix de contenir le conflit dans le cadre
des frontières israélo-palestiniennes. Dans un entrevue accordée
à la télévision égyptienne, Hussam Sweilem, général à la retraite,
explique de manière très intéressante les enjeux frontaliers, à
savoir que l’Égypte ne doit en aucun cas servir de base arrière
pour la résistance palestinienne, et que l’Etat ne souhaite
nullement accueillir des camps de réfugiés palestiniens en cas de
défaite, ni subir une annexion du Sinaï par Israël. Autre danger
qui pointe : que se passerait-il si le mur tombait pour de bon ?
Cela entraînerait peut-être une déstabilisation du régime, alors
jugé incapable par Israël et les Etats-Unis.
Mais il persiste qu’avec un tel projet de mur invincible, la
situation risque d’être fatalement plus explosive...par dessus la
frontière. Et le quotidien sera de plus en plus critique pour les
Gazaouis. Derrière le caractère urgent de la situation humanitaire
demeure un vrai problème politique. Sa non-résolution et son
pourrissement ne peuvent qu’entraîner des conséquences plus
graves pour la population. Les perspectives d’amélioration du sort
des Gazaouis sont limitées par le rôle des puissances régionales,
qui collaborent pour la plupart avec les Etats impérialistes que
sont Israël et les Etats-Unis. L’unique possibilité qui se trame
demeure dans la capacité de mobiliser la population en Égypte et
dans le Moyen-Orient. Même si les mouvements sociaux ont subi
de durs revers ces derniers temps, une manifestation à été
organisée au Caire fin décembre durant la visite de Netanyahou,
devant le Syndicat de la presse pour dénoncer la construction du
mur, et soutenir les marcheurs pour Gaza.
Face à Moubarak qui joue sur le repli nationaliste, nous
devons dénoncer un régime qui d’un côté finance des projets
meurtriers contre les Palestiniens et de l’autre affame sa
population, comme ça l’a été durant les émeutes qui découlèrent
de la pénurie de blé en 2008. De même, nous devons soutenir et
amplifier les manifestations devant l’ambassade d’Egypte,
répondre aux slogans déjà scandés en France contre Moubarak,
sans oublier de soutenir la dure lutte que mènent nos camarades
dans la région. Pour la prochaine manifestation pour Gaza qui
aura lieu le 6 février, ne l’oublions pas.

Sellouma