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Libye : Échec et mat...érialisme

D 2 août 2011     H 04:23     A Bertold de Ryon     C 0 messages


L’intervention militaire de la France, et d’autres puissances, en
Libye pourrait produire d’autres résultats que ceux
initialement escomptés.

Aux dernières nouvelles, il n’était
ainsi plus vraiment assuré qu’elle finisse par conduire à la chute
du régime de Muammar al-Kadhafi et à la destruction de ce
dernier.

A titre de symptôme, le magazine souverainiste (donc,
nationaliste français) « Marianne » se demandait-il, le 21 juillet
2011, dans sa newsletter : « Kadhafi a-t-il gagné la bataille de
Libye ? » La veille, le ministre français de la Défense, Gérard
Longuet, avait-il estimé devant des journalistes que « les rebelles
(libyens) ne peuvent pas aller jusqu’à Tripoli », n’ayant selon lui
pas les forces nécessaires pour envisager une prise de pouvoir
dans la capitale libyenne. Jusqu’ici, selon les planifications
politico-militaires, ils étaient censés renverser le régime en place.

Pour la fête nationale française, le président Sarkozy aurait aimé
parler d’autre chose que de la mort de soldats français en
Afghanistan, intervenue quelques jours avant ce 14-Juillet. A tout
prix, selon ce qu’il faisait comprendre à son entourage, il aurait
voulu qu’on célèbre en ce jour-là un triomphe militaire français en
Libye : la reddition ou la mort (sous les bombes) du vieux colonel
Kadhafi. Celui-ci, au pouvoir depuis le 1er septembre 1969, est
cependant suffisamment expérimenté pour déjouer un certain
nombre de plans bâtis sur la Comète.

L’intervention militaire essentiellement franco-britannique,
déclenchée le 19 mars dernier, ne marche vraiment pas comme
elle aurait dû se dérouler… selon ceux qui avaient décidé de la
lancer. A l’époque, Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères
de Sarkozy (au début plus sceptique que son maître quant à
cette intervention), avait assuré qu’elle allait durer « des jours
ou des semaines, mais certainement pas des mois ». Nous voilà
à quatre mois, déjà, de durée des opérations.

Les décideurs avaient éventuellement sous-estimé la base sociale
qui reste, dans certaines parties du pays ou certains groupes de
population, fidèle au régime de Kadhafi. Surtout, au lieu de se
rétrécir - alors que des manifestations contre la dictature
s’étaient déroulées jusque dans des quartiers de la capitale
Tripoli, en février -, elle s’est ressoudée autour de lui. Alors que
l’opposition civile, une fois que le conflit politique s’était
transformé en guerre civile puis celle-ci en guerre conduite de
l’extérieur, s’est retirée de la scène publique. Les
bombardements ne la renforcent pas, ils l’affaiblissent plutôt.

A l’heure des déceptions qui deviennent visibles, certains des
décideurs politiques semblent même modifier leurs plans, en vue
d’un éventuel arrangement avec la dictature. Ainsi, le 10 juillet,
le ministre de guerre sarkozyste, Longuet, avait-il précisé qu’il se
contenterait - comme but politique de l’intervention - que
Kadhafi soit « dans une autre pièce de son palais avec un autre
titre ». Il est probable que des négociations, portant
éventuellement sur un partage du pouvoir entre une partie du
régime et certains dirigeants rebelles actuels ?, soient déjà dans
un stade avancé.

En attendant, la signature d’accords entre les rebelles et les
puissances occidentales, portant non seulement sur le pétrole
mais aussi sur le renvoi en Libye de migrants africains
« indésirables » (accord entre le gouvernement italien de droiteextrême
droite et le « Conseil national de transition » libyen du
16 juin), est un mauvais signe politique pour l’avenir.

Bertold du Ryon