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Maroc : deux ans de prison pour avoir dénoncé sa torture

D 3 novembre 2014     H 05:58     A     C 0 messages


Lundi 20 octobre, la cour d’appel de Tanger a condamné à deux ans de prison ferme Wafaa Charaf, une militante du mouvement du 20 février [1] et de l’AMDH [2] accusée d’allégation mensongère de torture. Selon l’ACAT, les autorités marocaines, qui affirment qu’elles luttent activement contre la torture, tentent dans les faits d’imposer la loi du silence en poursuivant les victimes.

Selon Hélène Legeay, responsable Maghreb et Moyen-Orient à l’ACAT, « Le Maroc fait preuve d’une hypocrisie effarante. En façade, il communique sur l’organisation, le mois prochain, du Forum mondial des droits de l’homme avec une place importante réservée aux problématiques de torture et de justice. Dans l’arrière-scène, il poursuit les personnes qui disent avoir été victimes de torture. Sous couvert de lutte contre l’impunité, Rabat entend perpétuer l’omerta. »

Le 27 avril 2014, Wafaa Charaf a participé à Tanger à une manifestation de soutien à des syndicalistes licenciés. En rentrant chez elle, elle a été enlevée par deux hommes qui lui ont bandé les yeux et l’ont embarquée de force dans une voiture et conduite en dehors de la ville. Pendant plusieurs heures, ils l’ont frappée, insultée et menacée en évoquant ses engagements politiques. Puis ils l’ont abandonnée sur place. Elle est allée faire constater ses blessures par un médecin et, le 30 avril, a porté plainte contre X pour torture et enlèvement auprès du procureur de Tanger. Cela lui a valu d’être arrêtée le 8 juillet dernier, placée en détention provisoire et poursuivie pour dénonciation calomnieuse et outrage à agent.

En dissuadant ainsi les victimes de porter plainte, le Maroc se rend coupable d’une violation flagrante de l’article 13 de la Convention contre la torture, selon lequel l’Etat doit garantir aux victimes le droit de porter plainte [3].

L’ACAT est aussi poursuivie devant la justice marocaine pour dénonciation calomnieuse alors que les plaintes pour torture qu’elle a déposées aux côtés de plusieurs victimes sont sérieuses et circonstanciées.

Le 4 mars 2014, le Maroc s’est joint au Chili, au Danemark, au Ghana et à l’Indonésie pour lancer l’initiative mondiale pour la ratification de la Convention contre la torture. Cette initiative, saluée par l’ACAT, doit se traduire par des actes. Au même moment, le royaume chérifien multipliait les mesures de rétorsion à la suite de la convocation par la justice française du patron de la DST marocaine concernant des plaintes pour torture déposées par l’ACAT et plusieurs victimes.

Selon Hélène Legeay, « Avant d’appeler les autres pays à ratifier la Convention contre la torture, le Maroc devrait balayer devant sa porte, en s’assurant que ce texte, ratifiée par le pays en 1993, soit appliquée. »

Le 23 juillet, Oussama Hassan, autre militant de l’AMDH et du mouvement du 20 février, a été condamné à trois ans d’emprisonnement et 10 000 dirhams d’amende lui aussi pour dénonciation calomnieuse pour avoir dénoncé les tortures qui lui ont été infligées par des inconnus à l’issue d’une manifestation à laquelle il venait de participer, le 2 mai dernier.

ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture)

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