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Tunisie : Latelec-Fouchana – Une lutte exemplaire, une répression pour l’exemple

D 13 septembre 2013     H 05:18     A     C 0 messages


« Travail, liberté, dignité ! » En décembre 2010, commence le soulèvement du peuple tunisien.
Un mois plus tard, une foule immense scande « Dégage ! » devant le ministère de l’Intérieur. Ben Ali
s’enfuit le 14 janvier 2011. C’est le début d’un processus révolutionnaire qui se poursuit aujourd’hui.
Le mouvement social entamé dès 2008 dans le bassin minier de Gafsa trouve un écho dans
les manifestations spontanées des classes populaires à l’intérieur du pays (Sidi-Bouzid,
Kasserine...). Le soulèvement a été relayé et entretenu dans toute la Tunisie par de nombreuses
organisations, réseaux de juristes et défenseurs des droits. Les grèves générales ont porté un coup
fatal à la dictature. La centrale syndicale UGTT a joué un rôle déterminant, et une vague de
syndicalisation a traversé toute la Tunisie post-Ben Ali.

Quelques semaines après la chute de Ben Ali, un syndicat UGTT est créé dans l’usine Latelec
(filiale du groupe français Latécoère, producteur d’équipements aéronautiques pour Airbus,
Dassault, etc.) situé à Fouchana, en banlieue de Tunis. Porté par des ouvrières, il est l’illustration
de cet élan révolutionnaire. Très vite, la direction lui déclare la guerre. Harcèlement, menaces,
tentatives de corruption : fortes de multiples mobilisations, les travailleuses ne cèdent pas.
Les conquêtes sociales sont à la taille de leur combat : encadrement des heures
supplémentaires, respect des normes d’hygiène et de sécurité, augmentation des salaires...

Bientôt, la direction réprime les syndiquées :
mises à pied, violences – puis licenciements abusifs de 10 travailleuses, dont les déléguées syndicales, déclarés illégaux par l’inspection du travail. Depuis des mois, Sonia
Jebali, Monia Dridi et Rim Sboui se battent pour leur réintégration, avec le soutien de plusieurs
organisations et syndicats français. Pour briser définitivement la lutte des ouvrières tunisiennes,
Latelec a rapatrié en France une partie de sa production : en quelques mois, le site de
Fouchana est passé de 450 salariés à 160, mettant de fait au chômage des centaines de
salariées.

La lutte des Latelec illustre l’importance cruciale de la solidarité internationale.
Contrer l’isolement subi par les syndicalistes licenciées passe aussi par la mobilisation des
militant-es français-ses et l’exposition publique des agissements de la maison-mère Latécoère. Le
droit du travail et les libertés syndicales doivent être respectés des deux côtés de la Méditerranée !
C’est que la solidarité nord-sud et la coordination internationale des luttes ne sont plus
seulement une question de principe. Elles deviennent nécessaires face aux multinationales, gérantes
de main-d’oeuvre à l’échelle de la planète. Profitant de la libre circulation du capital – et non de celle
des personnes –, elles mettent les travailleurs en situation de concurrence partout dans le monde. Au
nord, les acquis sociaux reculent – au sud, la condition sociale des travailleurs est une insulte à leur
dignité. Voilà le véritable visage de la « compétitivité », martelée par tous les gouvernements qui
demandent toujours plus d’efforts aux salariés et s’attaquent aux emplois ainsi qu’aux droits des
travailleurs/ses.

C’est dans ce cadre néo-libéral que la Tunisie révolutionnaire voit exploser depuis deux ans
les conflits sociaux. La lutte des Latelec, sanctionnée par un retrait de l’investisseur français, illustre
le dilemme auquel font face les travailleurs dans tous les pays : « Quand on travaille en baissant la
tête, tout va bien, explique Houda, une syndicaliste. Si on la relève, ils dégagent ».

Du 12 au 21 septembre, Sonia Jebali et Monia Dridi sont en France pour présenter la lutte.
Venez les rencontrer et les soutenir – Dates et lieux au verso.

Leur combat est notre combat. Leur dignité est notre dignité.

A la fête de l’Huma
Samedi 14 septembre

L’avenir du syndicalisme en Tunisie
15H00 Stand du Front Populaire, Villages du Monde
Avec Adel Ltif professeur a Paris III et Abdelhafidi Riahi, syndicaliste.

Luttes et droits des femmes au coeur des transformations et des révolutions.
18H00 Stand du Conseil National
Angle des avenues : Aimé Césaire /Oscar Niemeyer
Avec Marie-Georges Buffet et Martine Billard

*

Travailleur/ses du Nord et du Sud : comment lutter ensemble contre la mondialisation néo-libérale ?

Lundi 16 septembre19H00
Bourse du travail de Paris, 3 rue du Château d’eau (Métro République)salle Jean Jaurès (sous-sol)
Avec Sonia Jebali et Monia Dridi du syndicat UGTT en lutte à Latelec-Fouchana un sous-traitant d’Airbus, Héla Yousfi, universitaire, un représentant de l’Union syndicale Solidaires, Fanny Gallois de l’association Peuples Solidaires et un collaborateur du Monde Diplomatique.

Travailleuses et droit syndical. Quels enjeux pour les femmes en Tunisie ?
Samedi 21 septembre 2013 de 14h à 17h30

Bourse du Travail, 85 rue Charlot (métro République), salle "Petite congrès".
Comité de soutien aux syndicalistes de Latelec Fouchana
Avec Sonia Jebali et Monia Dridi du syndicat UGTT en lutte à Latelec-Fouchana un sous-traitant d’Airbus, , Wassila Ayachi (Association Tunisienne des Femmes Démocrates [ATFD] et UGTT), Fanny Gallois (Peuples Solidaires)et Naila Wardi (Front Populaire).

Dans le bouleversement politique et social que vit la Tunisie, les femmes sont
particulièrement mobilisées pour défendre leurs droits. Depuis la défense du droit à l’avortement
jusqu’à la question de l’autonomie et de l’emploi des femmes, les enjeux sont considérables pour
la société tunisienne.
Au coeur de la mondialisation néolibérale, la lutte des « Latelec » en Tunisie est emblématique : les
salarié-es, majoritairement des femmes, s’organisent et exigent à la fois le respect du Code du
travail tunisien, et de leur dignité !
Les entreprises qui délocalisent mettent en concurrence les travailleurs et travailleuses du Nord et
du Sud, afin de les exploiter toujours plus. Les femmes, partout moins bien payées, considérées
comme une main d’oeuvre plus docile, se retrouvent alors sur-exploitées et d’autant plus
précarisées.
A Latelec, la concurrence féroce au sein de l’industrie aéronautique internationale n’hésite pas à
broyer les travailleuses. Mais dans ce contexte très difficile, elles font bloc face au harcèlement et
au mépris de leur hiérarchie et résistent malgré le sexisme omniprésent et les multiples barrières
auxquelles elles se heurtent. Les enjeux y dépassent largement le contexte local : se posent les
questions de l’emploi salarié des femmes en Tunisie, la place des syndicats dans les entreprises
privées, mais aussi la politique néocolonialiste de certaines entreprises françaises, le rôle des
multinationales dans les politiques libérales…
Et au-delà, comment l’émancipation des femmes participe du processus révolutionnaire ?
Parce que partout les femmes sont durement touchées par les politiques libérales, et que les droits
des femmes sont souvent les premiers à être remis en question…Venez débattre avec ces femmes
tunisiennes en lutte.