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Eurafrique : On prend les mêmes et on recommence

D 19 mai 2009     H 21:50     A Isabel Ferreira     C 0 messages


Après l’esclavage, la colonisation ; après la colonisation, le
néo-colonialisme ; et après la Françafrique, voici venue
l’heure de l’Eurafrique. Il fallait y penser, les pays
dominants de l’Union Européenne l’ont fait ! A
Les rouages et les moyens peuvent changer, les intérêts
restent les mêmes, les politiques de développement
inchangées, les pillages et
profits plus juteux que
jamais. Un seul mot
d’ordre : exploiter et
mettre au pas ces hommes
et ces femmes qui
« depuis des millénaires
vivent avec les saisons
dans un univers où la
nature commande tout,
incapables de s’élancer
vers l’avenir et de
s’inventer un destin »
(discours de Dakar –
Sarkozy – 2007). Le
continent noir est donc en
proie aujourd’hui encore à
la fièvre impérialiste et
dominatrice, non seulement des anciens Etats colonisateurs
mais également des autres Etats économiquement forts qui se
sont « Unis pour l’Exploitation » (UE). Là où chaque pays
d’Afrique avait jusqu’ici face à lui un prédateur facilement
identifiable en l’ancien exploiteur (France, Grande-Bretagne,
Belgique, Portugal), il s’agit maintenant d’affronter l’Hydre à 27
têtes qui se sont alliées pour frapper encore plus fort. Car là où
les intérêts communautaires rejoignent les profits particuliers,
les forces s’unissent et les « prés carrés » sont bien gardés.
En effet, la politique de domination, d’ingérence et de soustraitance,
non affichée par l’Union Européenne mais infligée
dans les faits au continent noir, illustre parfaitement la
continuité et la parfaite harmonie avec la tradition coloniale. En
plus du système de dépendance mis en place par le Pacte néocolonial
sous De Gaulle et ses « amis de l’Afrique »,
l’asservissement du continent a encore de beaux jours devant
lui. Après quelques timides vélléités de dénonciations de la
Françafrique par certains de ses membres, l’UE s’est finalement
accomodée avantageusement de cette situation, et au lieu de
mettre en place une véritable politique de partenariat Nord/Sud,
se contente d’organiser, d’écrire et de faire signer aux Africains
des « accords » unilatéraux essentiellement économiques
inégalitaires, injustes et désastreux. Qu’ils s’appellent APE
(Accords de partenariat économique) ou PEICD (Pacte
Européen sur l’Immigration Choisie et le Développement), ces
simulacres de coopération ne représentent que la face cachée
des intérêts des lobbies ou des différents Etats membres. L’UE,
refusant de s’asseoir avec les Africains pour discuter, conserve
indécrottablement une approche globale et biaisée du
développement, niant ainsi leurs besoins spécifiques et
prioritaires. Elle exige hypocritement du continent un processus
de croissance et de compétitivité à son image alors que les
besoins élémentaires tels que l’eau ou l’électricité ne sont pas
même acquis.
Et même s’il existe un timide affichage visant à mettre fin
aux conflits, à aider à la construction de la paix ou au respect
des principes démocratiques, les voeux de l’Union restent pieux
et sont contrecarrés par l’influence excessive et les vues
géostratégiques de certains, à commencer par la France. Ainsi,
la première opération militaire de l’UE en Afrique (Artémis en
2003 en RDC), comme la dernière en date au Tchad (Eufor)
n’étaient que des opérations voulues, préparées et financées
par la France, au service de sa diplomatie françafricaine.
D’ailleurs en 2003 en RDC, à la fin des trois mois d’intervention
« européenne », la politique européenne s’est désintéressée du
problème montrant ainsi l’absence totale de projet quant à la
manière de combattre les causes de ce conflit, du moins tant
que ces dernières étaient
conciliables avec ses intérêts
miniers.
Mais cela ne s’arrête bien
sûr pas là. L’Europe-Forteresse
a maintenant son arme de
dissuasion : FRONTEX (agence
européenne pour la gestion de
la coopération opérationnelle
aux frontières extérieures des
états membres du l’Union
Européenne). Ce nouveau
dispositif (justifié par la lutte
contre les passeurs et pour
venir en aide aux naufragés
perdus dans l’océan) permet à
l’Union de mener une guerre
sans merci aux migrants et aux
réfugiés, de verrouiller les frontières et les côtes, aboutissant à
des drames inommables (morts de noyade, faim ou soif ; morts
sous les balles de la police ; camps de rétention où les droits
des étrangers sont bafoués…). Pour l’aider à rester fermée
essentiellement aux Arabes et aux « Nègres », l’Europe a réussi
à « externaliser » le contrôle de l’immigration au moyen
d’accords avec les pays d’origine ou de transit (récompensés
d’une manière ou d’une autre). Ainsi « le sale boulot » est
décentralisé et l’UE sauve une fois de plus les apparences. C’est
dans le même ordre d’idées que le Pacte Européen et son
immigration choisie installe des centres de tri et de recrutement
(CIGEM : Centre d’Information et de Gestion des migrations)
dans les pays d’origine comme à Bamako pour choisir sa main
d’oeuvre hautement qualifiée : la Traite n’est pas loin… Tout ceci
au mépris total des peuples et de leur libre circulation.
L’Union européenne doit se rendre à l’évidence : l’Afrique ne
lui appartient pas et ne lui appartient plus. Elle doit arrêter les
dégâts de façon urgente et laisser l’Afrique aux africains en se
servant de quelques principes qui suivent.

□ Abolition totale de la dette

□ Arrêt du Pacte Colonial et des accords de coopération

donnant droit au pillage des ressources naturelles

□ Libre disposition du continent à ses ressources
naturelles

□ Liberté, indépendance et libre choix du modèle politique

□ Auto-détermination économique

□ Fin de l’idéologie sécuritaire et répressive et de la
criminalisation des migrations

Il s’agit d’inviter les Africains à s’assumer entièrement et
comme l’écrit Mamadou Koulibaly dans son livre Eurafrique ou
Librafrique : « … ni les chefs d’Etat africains, généralement en
place depuis plusieurs décennies, ni les puissances occidentales
qui les soutiennent envers et contre tout, ne veulent perdre le
bénéfice que leur procure l’absence de réelle démocratie dont
naissent des institutions solides qui protègent les citoyens et les
intérêts des populations… ».

Isabel Ferreira