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Le Franc CFA un outil d’asservissement de l’Afrique

D 5 mars 2017     H 05:46     A     C 0 messages


par Bruno Tinel, Maître de conférences en Economie à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, il a coordonné avec Kako Nubukpo, Martial Ze Belinga et Demba Moussa Dembele l’ouvrage collectif « Sortir l’Afrique de la servitude monétaire. À qui profite le franc CFA ? », La Dispute, 2016.

Deux zones économiques africaines utilisent le Franc CFA pour monnaie. Si le franc CFA apporte une stabilité monétaire, il est source de sous-développement.

Le Franc CFA est une monnaie forte pour des économies faibles. Le cours du Franc CFA était historiquement indexé sur le Franc français, aujourd’hui il est indexé sur l’Euro.

Un franc CFA africain calqué sur le niveau de vie européen

On a gardé cette approche qui peut surprendre et à juste titre. La France et les pays africains en zone Franc CFA n’ont pas du tout le même profil en terme de niveau de développement d’équipement industriel. La France est un vieux pays capitaliste avancé, on a acquis un niveau de PIB par tête élevé. Ce PIB est beaucoup plus faible en Afrique.

La question de fond est donc là : est-ce que ça a beaucoup de sens que les pays africains des zones CFA aient la même monnaie que nous en France ? Deuxièmement ces pays n’ont plus de lien direct avec la France, ils sont indépendants, ils devraient avoir leur propre monnaie.

Non, il ne faut pas avoir peur de l’inflation

Un pays en développement subit de l’inflation. C’est une mécanique connue de tous les économistes du développement. Or les deux zones CFA sont fondées sur l’idée que l’inflation ne peut pas être supérieure à l’inflation moyenne que l’on connaît dans la zone Euro. C’est illogique.

Quand cela arrive, on est obligé de dévaluer le CFA par rapport à l’Euro. Or, les besoins en développement de ces pays supposent que justement le taux d’inflation tolérable soit plus élevé.

La dévaluation brise les peuples

Il y a un débat de fond à avoir en Afrique pour savoir ce qu’est la stabilité monétaire. Cette stabilité monétaire ne doit pas être conçue comme quelque chose de fixe et d’absolue pour tous les pays et ce quelque soit leur développement économique.

Les zones CFA se caractérisent par une inflation très faible. Ce sont de bons élèves en la matière. Elle est plus faible que dans les autres pays africains. Globalement c’est exagéré de dire que la stabilité monétaire est un préalable au développement économique.

On le voit dans les pays en zone CFA. Ils ont de bons résultats en terme d’inflation mais en terme de PIB par tête, ce n’est pas bon du tout.
En dévaluant brutalement la monnaie, on augmente le prix des denrées courantes importées. On dégrade ainsi la situation des ménages.

Quand on est dans une situation où la population est à la limite du seuil de subsistance, ça va avoir des conséquences catastrophiques.

L’Afrique, un marché de consommation pour les produits européens ? Même pas !

Le patriotisme économique français consisterait à dire que les Africains doivent acheter nos voitures et autres produits de notre industrie.

Mais ce n’est même pas possible dans le système actuel ! ils ne sont pas assez riches. Ils achètent peu de voiture. Et quand c’est le cas, ce sont des voitures d’occasion.

Il y a une petite élite très fortunée qui mène un train de vie fastueux. Elle bénéficie du Franc CFA et se maintient au pouvoir grâce à ce système. Mais la population elle, n’a pas ce train de vie. C’est donc un très petit marché pour les sociétés européennes.

« Il y a une petite élite très fortunée qui mène un train de vie fastueux. Qui bénéficie du Franc CFA et qui est maintenu au pouvoir grâce à ce système »Bruno Tinel, Maitre de conférences
En réalité si on veut un discours sur les intérêts nationaux francais en Afrique ça serait de dire : la France n’a pas intérêt à soutenir le sous-développement dans ses anciennes colonies.

Le CFA à l’origine des mouvements migratoires

Ces immenses mouvements migratoires sont l’un des sous-produits du mal développement de ces zones de l’Afrique. Les zones Franc CFA sont un échec, non pas en terme de stabilité monétaire on l’a bien compris mais en terme de développement économique.

Et les migrations sont la conséquence de ce mauvais développement. Migrer ce n’est pas marrant. Quitter son pays se fait dans des conditions extrêmement dangereuses.

Le fondement de ces migrations est le mal développement et par voie de conséquence, le Franc CFA.

Propos recueillis par Aladine Zaïane

Source : http://www.streetpress.com

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