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Le Sahel s’invite dans la campagne présidentielle française

D 13 février 2022     H 19:56     A La rédaction de Mondafrique     C 0 messages


Au vu des derniers événements, la guerre de la France au Sahel s’invitera inévitablement dans la campagne présidentielle. Ce sujet est l’un des quelques dossiers chauds qu’Emmanuel Macron redoute. Mais qui dans l’opposition sera en capacité de porter les fers dans la plaie ? Petite revue des forces en présence.

La guerre au Sahel est un dossier complexe que peu de politiques maitrisent comme on a pu s’en rendre compte lors des débats à l’Assemblée nationale et au Parlement européen.

Dans la tradition française, la gauche a toujours eu la réputation d’être antimilitariste et par conséquent d’être faible sur les sujets de défense. C’est une perception ancrée dans les esprits, alors même que les gouvernements socialistes ont été aussi bons (ou aussi mauvais) que les autres dans le domaine.

Force est de constater que sur les questions militaires et sur celle du Sahel, le mieux préparé est sans aucun doute, Jean-Luc Mélenchon. Il a toujours pris position clairement sur la guerre au Mali et celles-ci n’ont jamais variées. En juin 2021, il déclarait déjà : « nous réclamons que notre pays dise clairement à quelles conditions politiques les militaires français quitteront le Mali. Nous mettons en cause l’impasse politique dans laquelle nous nous trouvons si ce plan n’est pas connu. Sinon, le risque de guerre sans fin nous menace. Et depuis le début nous disons qu’il ne peut être question de partir sans que ce plan soit connu. Le départ dépend de cela. »

Jean Luc Mélenchon : « Mali, une guerre sans fin » !

D’ailleurs dans le petit milieu de la Défense, le chef des Insoumis a la réputation de s’y connaître. Pour preuve, lors de la présentation de son programme présidentiel devant l’Association des Journalistes de la Défense (AJD), il a cassé la baraque selon l’expert Jean-Marc Tanguy, auteur du blog le Mamouth. Pour l’accompagner sur ces questions, il bénéficie des conseils de Bastien Lachaud, futur ministre de la Défense du candidat et « bête noire de Florence Parly ».

Depuis quelques temps, on a vu le député, Eric Coquerel, vice-président du groupe d’amitiés France Cameroun à l’Assemblée Nationale se piquer d’affaires africaines…

Côté Zemmour, qui se trouve à la droite, de la droite de l’échiquier politique, on devrait donc s’attendre à une analyse fine de la guerre dans le Sahel au moins sur le plan militaire, son directeur de campagne étant l’ancien numéro 2 de l’armée de terre, le général Bertrand de la Chesnais. Pour l’instant, on reste sur notre faim, le candidat de Reconquête ne s’est pas exprimé sur le fond du sujet. Lors de l’expulsion de l’ambassadeur de France au Mali, il s’est contenté d’un tweet lapidaire et sans nuance sur un dossier aussi complexe « Nous nous battons pour expulser les djihadistes du Mali, mais le Mali expulse notre ambassadeur. Nos soldats meurent pour un pays qui nous humilie ! Toute la politique africaine de la France est à repenser. » Selon la lettre A, son monsieur Sahel, serait Jean Messiha, énarque, ancien du Rassemblement national devenu chroniqueur chez Cyril Hanouna ! Quant à sa conseillère diplomatique, Caroline Galactéros, ancienne présidente du think tank, Géopragma, elle ne connaît strictement rien à l’Afrique. Reste qu’il peut compter sur l’éternel Monsieur Afrique des réseaux d’extrême droite, l’inusable Bernard Lugan, qui ne dispose dans ces vieilles malles que d’une seule grille de lecture, celle de l’ethnicisme…

Michel Barnier aux cotés de Valérie Pécresse

Difficile de s’y retrouver du côté de Valérie Pécresse tant cela semble être un grand désordre dans son équipe, ce qui explique sa bourde lorsqu’elle a demandé d’expulser l’ambassadeur malien. Il y a quelques jours, le journal en ligne OPEX360, se demandait : « Où est donc passé le conseiller « défense » dans l’équipe de campagne de Valérie Pécresse ? » Bonne question. Cependant la candidate peut toujours compter sur l’eurodéputé Arnaud Danjean, spécialiste averti des questions de défense. Elle pourra compter également sur le vivier des sénateurs de son parti, comme Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Côté diplomatie, son conseiller, Michel Barnier, connaît l’Afrique en tant qu’ancien ministres des Affaires étrangères, il est même un expert de la Côte d’Ivoire puisqu’il était en poste en 2004 lors de l’attaque sur le camp de la force française à Bouaké où 9 soldats français étaient morts. Lors du procès qui a eu lieu en 2021, pour situer les responsabilités des dirigeants de l’époque dans cette affaire, Dominique de Villepin, Michèle Alliot Marie, il a été cité comme témoin. A la barre, l’ancien ministre s’est alors illustré par sa méconnaissance totale du dossier, il n’aurait rien vu, rien su, rien entendu, à la demande de Jacques Chirac… !

Marine Le Pen délaissée

Marine Le Pen vient, elle aussi, de perdre son conseiller défense, puisque le député européen Jérôme Rivière a rejoint l’équipe d’Eric Zemmour. A Bruxelles, il a été remplacé par l’essayiste et eurodéputé Hervé Juvin qui se trouve être également un connaisseur d’Afrique de l’Est. La candidate du Rassemblement nationale peut aussi s’appuyer sur un réseau d’ancien militaires qui lui sont favorables. Côté diplomatie, aucun nom n’émerge pour l’instant, mais il y a fort à parier que si elle gagnait cette présidentielle une foule d’experts autoproclamés se bousculerait au portillon. C’est un classique du genre, dans ce parti comme dans les autres…

Reste que, à cette heure, et au vu des compétences affichées, seul Jean-Luc Mélenchon peut se montrer dangereux dans le débat qui devrait avoir lieu avant la fin février aux parlements, à moins que les autres candidats ne travaillent sérieusement leur dossier.


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